Le président du gouvernement a brisé son silence mardi soir en s'adressant aux Tunisiens via un discours diffusé sur la chaîne nationale. Après un bref exposé portant sur le bilan (positif) de son gouvernement, Chahed s'est directement attaqué au directeur-exécutif du mouvement de Nidaa Tounes, Hafedh Caïd Essebsi, en le nommant lui et ses ‘camarades'. Ainsi, il a dressé un tableau noir du rendement de Hafedh à la tête de Nidaa Tounes l'accusant d'avoir détruit le parti en faisant fuir tous ses cadres citant, aussi, l'éparpillement du bloc parlementaire et l'échec des élections législatives partielles en Allemagne et les Municipales. Pire encore, Youssef Chahed a déclaré que la crise interne du Nidaa, causée par HCE, a fuité pour atteindre l'Etat et ses institutions. Une déclaration grave qui pose plusieurs questions. Si Nidaa Tounes est dans un état aussi dangereux que cela et qu'il menace même l'Etat et ses institutions, pourquoi Chahed a-t-il attendu que ces mêmes menaces lui soient directement adressées pour réagir ? Si Chahed est aussi conscient que cela de la gravité de la situation, comment a-t-il pu participer activement à la campagne électorale des municipales de Nidaa Tounes il y a à peine quelques semaines de cela ? Comment a-t-il pu continuer à faire partie de ce mouvement dont une bonne partie des dirigeants est accusée d'implication dans des affaires de corruption dont la fameuse affaire de Chafik Jarraya ? Par ailleurs, Youssef Chahed, qui nous apprend aujourd'hui que Nidaa Tounes est fini à cause de Hafedh et ceux qui l'entourent, est le même qui a présidé, en 2015, la Commission des 13 qui s'est chargée d'organiser et de faire réussir le controversé congrès de Sousse (janvier 2016). Un congrès qui a connu l'ascension vertigineuse de Hafedh Caïd Essebsi à la tête du Nidaa... Comme le passé finit toujours par nous rattraper, ces données nous amène à deux conclusions. Soit Youssef Chahed est un fin stratège visionnaire qui prépare tout à l'avance (et là on parle d'années d'avance) soit il a décidé de revoir son soutien à HCE parce que ce dernier a décidé de faire de lui un deuxième Habib Essid. Dans les deux cas de figure, Chahed doit faire beaucoup plus pour convaincre de son changement réel et profond. En ce qui concerne la suite de ce dramatique feuilleton mortellement ennuyant, il faudrait attendre le retour du père pour y voir plus clair. En France pour une rencontre portant sur l'avenir de la Libye, le président de la République est plus attendu que jamais. Son retour au bercail pourrait signer la fin de la récréation, la reprise des discussions et la fixation du sort du président du gouvernement voire de tout le pays.
