L'Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT) et l'Union Tunisienne de l'Industrie, du commerce et de l'Artisanat (UTICA) ont accordé leurs violons sur la centralisation des négociations collectives sur la majoration des salaires dans le secteur privé. Cet accord a été conclu lors d'une réunion du comité central des négociations composé de cinq membres du Bureau exécutif de la centrale syndicale et d'autant de représentants de la centrale patronale, qui s'est tenue mercredi. «Les partenaires sociaux se sont mis d'accord sur des négociations centralisées au regard de la situation politique et économique fragile du pays », a expliqué le secrétaire général de l'UGTT chargé du secteur privé, Mohamed Ali Boughdiri. L'organisation ouvrière ne souhaitait pas au départ des négociations centralisées puisque l'accord qui serait conclu au niveau central est susceptible d'être remis en cause à des échelons inférieurs (secteurs ou entreprises en difficultés) comme ce fut le cas lors du précédent round du dialogue social. L'accord initial conclu le 10 mars dernier entre les deux organisations prévoyait en effet des négociations sectorielles qui devaient prendre en considération les spécificités et la situation de chaque secteur d'activité économique à travers la mise en place de commissions mixtes couvrant les 54 secteurs d'activités économiques régies par des conventions sectorielles (44 conventions collectives sectorielles ont été signées entre l'UGTT et l'UTICA et dix autres ont été signés avec des syndicats patronaux indépendants comme la Fédération tunisienne de l'hôtellerie et la fédération de l'enseignement privé). L'UGTT et l'UTICA ont cependant estimé que des négociations sectorielles risquent de durer plus de neuf mois et de créer des tensions sociales dans plusieurs secteurs et au sein de plusieurs entreprises, ce qui pourrait d'envenimer le climat social et d'abaisser la productivité dans un contexte général marqué par une conjoncture économique maussade et une forte instabilité politique. Les négociations centralisées ne concerneront pas uniquement la majoration des quelque 1,5 million de salariés du secteur privé couverts par les conventions collectives sectorielles. La centrale syndicale s'est en effet attaché à que le nouveau round de dialogue social touche également les aspects réglementaires régissant les relations professionnelles à la lumière des mutations après la révolution, dont les nouvelles dispositions de la Constitution de 2014, le Pacte social et le programme national relatif au travail décent. Ainsi, la convention cadre régissant le dialogue social et les 54 conventions collectives sectorielles devraient être révisées pour englober de nouvelles dispositions relatives, entre autres, au classement professionnel, au droit syndical, aux mesures disciplinaires, à la prise en considération de l'expérience professionnelle, aux délais de titularisation et à la durée des stages et des périodes d'essai. Dans ce cadre, l'UGTT a déjà présenté au ministère des Affaires sociales, qui joue le rôle d'arbitre en matière de dialogue social, de nouveaux projets de conventions sectorielles couvrant plusieurs secteurs tels que les centres d'appels, l'audiovisuel, l'industrie pharmaceutique, l'aquaculture et la conservation des produits de la mer et l'agriculture. Pour rappel, le dernier round des négociations sociales dans le secteur privé pour les années 2016 et 2017, qui a été signé mars 2017 a été extrêmement difficile au regard de la conjoncture économique difficile qui prévalait alors dans le pays. Un accord prévoyant une majoration de 6% du salaire de base et des primes fixes avait été finalement signé après plusieurs mois de frictions.