Le Temps-Agences - L'aviation d'Ankara a bombardé dimanche le nord de l'Irak d'où opèrent des combattants kurdes, mettant de nouveau à exécution les menaces d'intervention de la Turquie chez son voisin pour y éliminer les sanctuaires rebelles. Selon Jabbar Yawa, porte-parole des "peshmergas", les forces de sécurité de la région autonome du Kurdistan irakien, des chasseurs bombardiers turcs ont visé des villages dans le secteur du massif du Qandil, dans l'extrême nord-est de l'Irak, aux confins des frontières de la Turquie et de l'Iran. Cette zone montagneuse, boisée et très escarpée, sert de repaire aux combattants du Parti de travailleurs du Kurdistan ( PKK ), en lutte contre le pourvoir central d'Ankara. L'armée turque a indiqué dans un communiqué que les raids aériens dans le massif de Qandil, mais aussi dans les régions de Zap, Hakurk et Avasin, avaient commencé à 01H00 locales (23H00 GMT) et que tous les avions étaient rentrés à leur base à 04H15 (02H15 GMT). L'armée a aussi procédé à des frappes d'artillerie. Dans un discours retransmis à la télévision, le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan a estimé que cette opération "contre des cibles de l'organisation terroriste dans le nord de l'Irak" avait été "réussie". Il a réaffirmé qu'Ankara était prêt à utiliser les moyens diplomatiques, économiques et militaires pour mettre en déroute les rebelles. "Cette lutte sera poursuivie dans le pays et hors du pays avec détermination", a-t-il dit. "De telles opérations vont se poursuivre si nécessaire", a pour sa part prévenu le vice-Premier ministre turc Cemil Cicek. Le PKK a affirmé sur son site internet que les bombardements avaient duré huit heures et avaient été "effectués par des dizaines d'avions". Jabbar Yawa a lui fait état "de huit avions de combat turcs qui ont bombardé des villages frontaliers, notamment le village de Pashashan". Il a assuré que les frappes turques avaient endommagé plusieurs ponts qui relient les villages dans cette région très difficile d'accès. "Des familles ont fui ces villages et se sont réfugiés dans des localités voisines", a ajouté le porte-parole. "Nous avons envoyé nos patrouilles de gardes frontières pour aider les éventuelles victimes et évaluer les dégâts", a également déclaré M. Yawa. Le 1er décembre, la Turquie, qui cherche à déloger le PKK de ses sanctuaires dans le nord de l'Irak, avait mené une première opération limitée visant un groupes de combattants kurdes en territoire irakien. Ankara avait annoncé de "lourdes pertes" dans les rangs du PKK, qui avait démenti avoir perdu des hommes. Le PKK, une organisation considérée comme terroriste par Ankara, Washington et l'Union européenne, a utilisé dans un passé encore récent ses bases en Irak --où sont cantonnés quelque 3.500 combattants-- pour lancer des attaques en Turquie. Ankara a menacé à plusieurs reprises d'intervenir directement en Irak, si Bagdad n'était pas en mesure d'empêcher les opérations du PKK à partir de cette zone, qui est sous le contrôle des autorités régionales kurdes. Le PKK est une rébellion autonomiste en lutte contre le pouvoir central d'Ankara depuis 1984. Ces années de violences ont coûté la vie à plus de 37.000 personnes. Le 21 octobre, des rebelles venant du Kurdistan irakien avaient tué 12 soldats turcs lors d'une attaque près de la frontière irakienne, et le Parlement turc avait autorisé le gouvernement à mener une intervention militaire en Irak. Cette perspective avait mobilisé la communauté internationale, notamment les Etats-Unis, alliés de la Turquie et grands soutiens du Kurdistan irakien, qui y voyaient un risque de déstabilisation de la seule région d'Irak relativement épargnée par la violence. Le gouvernement de Bagdad et les autorités régionales kurdes d'Irak s'étaient alors engagées à prendre des mesures pour limiter les mouvements et la liberté d'action des éléments du PKK installés en Irak.