- Les citoyens n'ont pas confiance en les moyens de l'Etat pour assurer leur protection contre les barons de la corruption, de la contrebande et des malversations et, pour ces raisons, il y a des gens qui craignent pour leur vie, bien qu'ils possèdent des dossiers assez consistants, pour s'attaquer à cette faune malfaisante. En outre, le pouvoir de l'argent n'est plus à démontrer et des personnes qui osent s'attaquer à la pieuvre de la corruption risquent de devenir des accusés, avec tout ce qu'ils peuvent encourir comme peines et souffrances. Même le président de l'INLUCC et ses membres n'ont pas échappé à la règle, avec des personnes malveillantes qui usent de tous les moyens et de tout ce dont ils disposent, pour les diffamer et les intimider. C'est ainsi que les plaintes anonymes déposées auprès de l'Instance nationale de lutte contre la corruption (INLUCC) représentent 27,39 pc du nombre total des dossiers. C'est le plus fort taux des requêtes enregistrées, indique l'INLUCC dans son rapport de l'année 2017, présenté à Tunis. Il s'explique, d'après l'Instance, par "la peur des poursuites qui pourraient en découler". Selon le rapport, l'INLUCC a transféré cinq plaintes pénales à la justice pour stigmatisation et intimidation des dénonciateurs de corruption par l'administration ou certains responsables de l'entreprise dans laquelle ils sont employés, et ce conformément à l'article 35 de la Loi organique sur la dénonciation de la corruption et de la protection des lanceurs d'alerte. L'INLUCC a déclaré avoir fourni une protection pour huit dénonciateurs de faits de corruption, notant que les lanceurs d'alerte subissent de vraies pressions : harcèlement, représailles... Concernant le secteur de l'information et de la communication, l'INLUCC indique avoir transféré 33 dossiers à la justice pour "atteinte à la réputation sur les réseaux sociaux". Ces plaintes ont été déposées auprès des tribunaux de première instance de Tunis, de l'Ariana, de Ben Arous, de la Manouba et de Sidi Bouzid. A elle seule, l'INLUCC a saisi la justice à 70 reprises contre des sites électroniques pour des publications portant atteinte à l'Instance et à son président. S'exprimant à ce sujet, le président de l'INLUCC, Chawki Tabib, a précisé que "l'Instance qui respecte la liberté d'expression et la considère comme un principe sacré rejette catégoriquement les campagnes de diffamation à la solde de certaines parties et les fausses allégations". Par ailleurs, Mohamed Ayadi, membre de l'INLUCC, a appeléb à activer le Conseil supérieur de lutte contre la corruption et de recouvrement des avoirs et biens de l'Etat. Ce conseil qui a pour mission de coordonner les travaux des commissions et instances en charge du recouvrement des biens et avoirs mal-acquis et de la lutte contre la corruption, ne s'est réuni que deux fois depuis sa création, et ce malgré l'importance de son rôle", a-t-il dit lors d'une conférence de presse organisée samedi pour présenter le rapport annuel de 2017 des activités de l'instance. Cette structure a, notamment, pour mission de suggérer des mécanismes juridiques pour assurer le bon fonctionnement des commissions et des structures intervenant dans ce domaine. Ayadi a, en outre, appelé à élaborer et à activer les textes d'application des lois relatives à la lutte contre la corruption, notamment la Loi sur le droit d'accès à l'information. Il a, par la même occasion, appelé à fournir l'aide financière et humaine nécessaires au pôle judiciaire économique et financier et à la Cour des comptes et à former les juges dans le domaine de la bonne gouvernance et de la lutte contre la corruption. Il a révélé que l'Instance a élaboré, dans son rapport de l'année 2017, 163 recommandations contre 152 en 2016. Ayadi a indiqué que le rapport comporte des recommandations pour le renforcement des mécanismes de contrôle des recrutements dans la fonction publique. Selon lui, il faut réviser, voire suspendre, les accords conclus entre certaines administrations et syndicats, pour l'ajustement des procédures de recrutement par rapport aux familles des agents publics, conformément au principe de l'égalité devant l'administration publique.