Malgré le mécontentement général face à la flambée des prix et la perspective de la grève des fonctionnaires de l'Etat et des agents du secteur public, le 17 janvier, pour cette même raison, le syndicat des agriculteurs de Tunisie (SYNAGRI), par la bouche de son président Karim Daoud, a réclamé, hier, lors d'un point de presse, à Tunis, l'application de la réalité des prix pour les produits agricoles. Selon lui, la demande est justifiée par la hausse des coûts de production ayant réduit à zéro la marge bénéficiaire des agriculteurs de toutes les filières, mais sa satisfaction entraînera de grandes augmentations des prix actuels. Evoquant la crise que traverse justement le pays, à cause de la détérioration du pouvoir d'achat, certains journalistes présents ont noté que la presse, et derrière elle l'opinion publique et les consommateurs, ne pouvait pas relayer ni soutenir une telle demande, du moins dans l'état actuel des choses. Rectifiant le tir, le président du SYNAGRI et autres membres de son bureau exécutif ont souligné être du côté des consommateurs et des travailleurs et qu'ils réclament un réajustement à l'aide de subventions étatiques comme c'est le cas dans tous les pays du monde, développés et émergents qui subventionnent le secteur agricole. D'après eux, après celle du lait, les autres filières agricoles sont menacées d'effondrement à défaut d'une intervention du gouvernement pour rééquilibrer la situation et ajuster les prix en fonction des coûts de production. Ils ont prédit un effondrement total de la filière des tomates à partir du mois d'avril prochain, signalant que le gouvernement a accepté pourtant de subventionner le lait importé, à hauteur de 700 millimes le litre. Mise à niveau Les responsables du SYNAGRI ont affirmé que la production agricole est bonne et répond aux besoins de sorte qu'il ne s'agit pas d'un problème de production mais de rendement et de productivité, ce qui nécessité une mise à niveau générale du secteur agricole tunisien. D'autant plus que l'accord de libre-échange complet et approfondi (ALECA) devant être signé avec l'Union européenne va s'étendre aux produits agricoles et exposer l'agriculture tunisienne à une concurrence qu'elle n'est pas en mesure de supporter. Ils ont préconisé un moratoire de dix ans en la matière. Un agriculteur et éleveur de la région de Béja, WassimSellaouiti, a indiqué que face à la hausse des coûts de production, il a vendu ses 120 vaches laitières et renoncé à cette activité, de sorte que les agriculteurs font réellement face à de grands problèmes qui attendent d'être réglés. Des agriculteurs ont eu affaire à la justice pour n'avoir pas pu honorer leurs engagements financiers, tandis que d'autres ont fui le pays. Le SYNAGRI a dit avoir des propositions, déplorant « l'indifférence de l'autorité de tutelle » pour l'organisation d'un débat général avec les producteurs agricoles en vue d'éviter un effondrement général du secteur.