« The Wandering Earth », sonne juste. D'abord parce que le film de science-fiction chinois parle d'une planète terre errante et d'un soleil qui ne peut plus la réchauffer, du calvaire humain face à la bêtise humaine, pour nous inviter à réfléchir au sens de nos actes ainsi qu'à leurs conséquences. Ensuite parce qu'il s'agit de la première surproduction chinoise de science-fiction avec un budget de 44 millions d'euros, qui raconte l'histoire d'une terre gérée par un gouvernement mondial uni et qui se fait sauver par un Chinois. Un marqueur symbolique assez fort qui présage d'un avenir de l'humanité en dehors de l'hégémonie culturelle et technologique des Américains. L'immersion est totale avec ce chef-d'œuvre du cinéma qui impressionne de par la représentation de l'espace et de la planète terre complètement ruinée, avec des séquences sublimes et techniquement incroyables. Mais au-delà du côté extraordinaire de ce film qui a drainé en l'espace de trois semaines uniquement (dès sa sortie en février 2019) , quasiment 80 millions de spectateurs avides de sensations fortes, celui-ci informe d'un changement de donne assez fort et qui ne peut passer inaperçu, du fait que la Chine est désormais une grande puissance qui peut prétendre à concurrencer le cinéma américain ayant dominé pendant près d'un demi-siècle. Ici les personnages protagonistes sont des Chinois qui unissent leurs efforts avec des personnes à l'identité humaine qu'ils soient Russes, Français ou autres. Mais plus de place désormais aux Américains et leurs prétentions hégémoniques. Le message est clair, si l'on rappelle aussi les projets à venir d'un pays qui dans la réalité ambitionne de créer d'ici l'an 2022 la plus grande station spatiale dans le monde. L'Homme, un être fragile dans un monde intelligible à la raison humaine Le film qu'on peut regarder désormais sur Netflix, déploie une grande maîtrise du récit et de l'emploi du futur pour raconter les choses du passé et nous propose ainsi une lecture amère mais nécessaire d'une planète terre que des scientifiques s'emploient à sortir du système solaire pour éviter sa destruction totale par Jupiter. On y dresse le portrait de personnages qui renouent avec leur humanité dont Liu Peigiang qui fait partie de cette équipe et qui a quitté la planète terre depuis dix ans en vue de participer à la réalisation de ce projet grandiose pour assurer la viabilité d'une humanité menacée de distinction. Mais sous la rationalité de la science et d'un monde intelligible à la raison humaine, le film laisse apparaître une véritable histoire enfouie et qui en dit long sur la fragilité de l'Homme et ses incertitudes face à une vie terrestre qui menace de s'effondre. Cela est d'autant plus visible à travers la relation du scientifique Liu Peigiang à son fils et à sa fille adoptive, son dévouement pour la planète terre et le choix qu'il a fait de se sacrifier pour que l'humanité revive… Sans oublier le personnage si attachant du fils, Liu Qi qui emmène sa sœur adoptive dans une aventure spatiale hasardeuse et prend sur lui de la ramener à la maison et finit par honorer ses promesses. Cela nous permet de cerner l'Homme au prisme de son rapport à l'Autre et atteste, par ailleurs, de la beauté d'une écriture pour le cinéma de science-fiction et de son habileté à nous toucher au plus profond de nous-mêmes et à interroger notre humanité.