Le représentant de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) en Tunisie et le ministre de la Santé redoutent une deuxième vague épidémique après l'assouplissement des règles du confinement prévu le 4 mai. Mais certains experts mettent en doute un tel scénario et pensent que le Covid-19 va devenir un virus saisonnier. Alors que la Tunisie s'apprête à entrer dans une phase de déconfinement progressif à partir du lundi 4 mai, la crainte de la résurgence de l'épidémie du coronavirus s'accroit. Le ministre de la Santé, Abdellatif Makki, n'a pas exclu une deuxième vague épidémique lors de la conférence de presse tenue mercredi au siège du gouvernement à la Kasbah. «Nous ne sommes pas à l'abri d'une deuxième vague de contamination au coronavirus», a –t-il averti. Et d'ajouter : «Nous avons réussi à contrôler la première vague de l'épidémie mais cela demeure un résultat temporaire et sensible qui dépendra de la conduite et de l'engagement du citoyen durant la prochaine étape». De son côté, le représentant de l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) en Tunisie, Yves Souteyrand, a estimé que «la Tunisie a réussi à faire face à la première vague de contaminations, mais n'est pas à l'abri d'une seconde vague épidémique». Il a également indiqué que «le déconfinement progressif ne veut dire en aucun cas l'éradication du virus surtout que le nombre des tests de dépistage effectués est très faible et rendrait difficile la détermination de la face cachée de l'épidémie en Tunisie». Certains spécialistes pensent par ailleurs que la résurgence du Covid-19 est quasiment inévitable, notant que la montée du mercure dans la prochaine semaine n'est pas capable de ralentir la propagation du virus ou la stopper. C'est notamment le cas du Professeur Amine Slim, ancien chef de service du laboratoire de virologie de l'hôpital Charles Nicolle de Tunis et actuel expert auprès de l'Organisation mondiale de la santé (OMS). «Il ne faut pas trop compter sur la hausse du mercure pour venir à bout du Covid-19 même si l'intensité de transmission des virus respiratoires a souvent tendance à baisser quand les beaux jours s'installent. Mais des cas de SARS-CoV-2 existent aussi dans des pays chauds en Afrique ou en Asie comme la Côte d'Ivoire, le Nigeria et l'Arabie Saoudite », souligne le Professeur Slim. «En été, la climatisation des espaces clos comme les administrations, les grandes surfaces et les hôpitaux et les casernes pourrait accélérer la propagation du Covid-19 », ajoute-t-il. Un virus saisonnier ? Selon Professeur Amine Slim, le plus grand risque pourrait survenir de l'ouverture des frontières aériennes et maritimes. «Nous sommes aujourd'hui certains que la Tunisie n'enregistrera que des cas sporadiques de Covid-19 tant que les frontières resteront fermées. Mais combien de temps peut-on tenir ? Nous serons contraints dans un, deux ou trois mois tout au plus à rouvrir nos frontières, et là on ne sait pas comment la situation va évoluer », s'inquiète-t-il. D'autres experts pensent cependant que l'épidémie du coronavirus va ralentir et probablement s'estomper sous l'effet de la chaleur estivale. « Actuellement, on ne voit une deuxième vague dans aucun pays du monde, seulement des cas sporadiques et des réimportations issues de la phase pandémique actuelle. De nombreuses données inconnues demeurent concernant ce virus. L'environnement existant au moment où il s'est propagé n'est plus le même aujourd'hui», argumente le Pr Jean-François Toussaint, directeur de l'Institut français de recherche biomédicale et d'épidémiologie. Cité par le journal français «Le Point », le Pr Toussaint estime qu'il y a une corrélation possible entre la température et la diffusion du Covid-19. «Ce sont dans les zones avec des températures autour de 10 degrés que l'épidémie a connu le plus important démarrage. Cette température pourrait représenter un optimum thermique : c'est entre 20 et 55 degrés de latitude, que se concentre 90 % de la mortalité alors que l'ensemble du continent africain ne comptabilise que 1 490 décès pour 32 430 cas ce 28 avril. L'hypothèse de la saisonnalité est donc à envisager», détaille-t-il. Même son de cloche chez le très controversé professeur Didier Raoult, spécialiste des maladies infectieuses et directeur de l' 'Institut hospitalo-universitaire de Marseille : « On suit avec énormément de tests cette épidémie. On a eu un pic et depuis, on a une décroissance continue. C'est une courbe en cloche, typique des épidémies. La plupart du temps, ça se passe en une seule courbe», a –t-il fait remarquer dans une vidéo diffusée sur YouTube. «L'histoire de rebond est une fantaisie inventée à partir de la grippe espagnole. Les épidémies commencent, s'accélèrent, culminent - c'est le moment maximal de transmissibilité - et elles diminuent et disparaissent, et on ne sait pas pourquoi», a ajouté l'infectiologue.