La démission en bloc du gouvernement libanais ne suffit pas à apaiser la colère de nombreux Libanais qui la jugent insuffisante pour répondre à la tragédie de l'explosion du port de Beyrouth et réclament le départ de l'ensemble d'une classe politique accusée de corruption généralisée. Une manifestation avec pour mot d'ordre "Enterrez d'abord les autorités" était prévue près du port, où ont explosé le 4 août quelque 2.750 tonnes de nitrate d'ammonium, faisant au moins 171 morts, 6.000 blessés et des centaines de milliers de sans-abri en détruisant une partie de la ville. Les recherches se poursuivaient mardi dans les décombres pour tenter de retrouver les 30 à 40 personnes encore portées disparues. "Notre maison est détruite et nous sommes seuls", a déclaré Khalil Haddad, un habitant de la ville. "On verra bien : peut-être qu'on aura de l'aide et surtout, peut-être qu'on connaîtra la vérité." Le Premier ministre, Hassan Diab, en annonçant lundi la démission de l'ensemble du gouvernement après celles de quatre ministres en deux jours, a accusé la corruption généralisée d'être à l'origine de la catastrophe. "J'avais dit auparavant que la corruption était enracinée à tous les échelons de l'Etat mais j'ai découvert que la corruption était plus forte que l'Etat", a-t-il dit lors d'une allocution télévisée en accusant l'élite politique d'avoir empêché des réformes. Les discussions engagées en mai entre son gouvernement et le Fonds monétaire international (FMI) pour tenter de résoudre la crise économique et financière qui affaiblit le Liban depuis plusieurs années ont échoué faute d'accord sur l'ampleur des pertes à faire supporter aux banques et à leurs actionnaires. "La démission du gouvernement n'est pas le point final", estime le tract appelant à manifester qui circule sur les réseaux sociaux. "Il y a encore (le président Michel) Aoun, (celui du Parlement, Nabih) Berri et l'ensemble du système." Pour Avedis Anserlian, un bijoutier dont la boutique a été détruite par l'explosion, "le fait que le gouvernement ait démissionné est une bonne chose. Mais on a besoin de sang neuf, sinon ça ne marchera pas." Michel Aoun doit consulter les différents groupes du Parlement avant de désigner un nouveau Premier ministre et il sera contraint de réunir le candidat assuré du soutien le plus large. Une tâche d'autant plus ardue que la situation dans laquelle se trouve le pays risque de dissuader certains candidats potentiels au poste.