Au moins dix personnes ont été tuées hier à Kaboul lors d'un attentat contre le convoi d'Amrullah Saleh, premier vice-président connu pour être anti-talibans, alors que des pourparlers de paix entre les insurgés et le gouvernement afghan doivent démarrer à Doha. "Ce matin alors que nous nous rendions à mon bureau, notre convoi a été attaqué. Je vais bien (...) j'ai des brûlures sur le visage et la main", a raconté M. Saleh dans une vidéo publiée sur Facebook, la main recouverte d'un bandage. "Malheureusement dix civils, la plupart des gens qui travaillaient dans cette zone, ont été tués et quinze autres, dont certains des gardes du corps du premier vice-président, ont été blessés", a déclaré Tariq Arian, un porte-parole du ministère de l'Intérieur. "L'explosion d'aujourd'hui n'a rien à voir avec nous", a réagi le porte-parole des talibans Zabihullah Mujahid. "Un magasin qui vend des bouteilles de gaz a aussi pris feu, faisant exploser les bouteilles", a raconté Abdullah, un commerçant qui, comme de nombreux Afghans, n'utilise qu'un seul nom. Le président afghan Ashraf Ghani a condamné l'attaque d'hier. La délégation de l'Union européenne en Afghanistan a quant à elle dénoncé "un acte désespéré de ceux qui veulent gâcher les efforts de paix". Mohammad Masoom Stanekzai, chef de l'équipe de négociateurs de Kaboul pour les pourparlers de paix avec les insurgés, a appelé à l'arrêt des violences pour faciliter le processus de paix. "Le meurtre du peuple doit cesser", a-t-il tweeté Ancien chef des services de renseignement afghans, Saleh avait déjà échappé à une tentative d'assassinat l'été dernier pendant la campagne présidentielle. L'attaque contre ses bureaux avait fait au moins 20 morts, pour la plupart des civils, et 50 blessés. "Après huit heures de combat, je suis retourné à mon bureau, pour voir mes amis et collègues massacrés", avait-il raconté quelques mois plus tard au site indien The Print. "Ils m'ont manqué", avait-il commenté ajoutant que "le cerveau (de l'attaque) était l'ISI", l'agence de renseignement militaire du Pakistan, dont il avait dénoncé "l'effrayante ingérence" dans le pays. Dans un tweet, le ministère des Affaires étrangères pakistanais a "fermement condamné" ce nouvel attentat. "C'est un soulagement que le premier vice-président soit indemne", a poursuivi Islamabad, que Kaboul et Washington accusent de soutenir les talibans, ce que le Pakistan nie. L'attaque d'hier intervient alors que des négociateurs afghans et talibans doivent entamer des pourparlers de paix inédits au Qatar. Dimanche, M. Saleh avait déclaré que l'engagement des talibans pour la paix serait mesuré dès le début des négociations. "Le premier test pour les talibans est (un) cessez-le-feu", avait-il dit à la chaîne privée afghane Tolo News. "Certains éléments parmi les talibans se fichent d'un échec des négociations", a expliqué Atta Noori, un analyste politique basé à Kaboul. Les insurgés ont été enhardis, selon des observateurs, par la signature d'un accord en février avec Washington, qui entérine le retrait des troupes américaines d'ici mi-2021. "Ils savent que le gouvernement afghan faiblit, alors que la communauté internationale s'y intéresse de moins en moins et porte plus d'attention aux talibans", a continué M. Noori. "Les talibans veulent leur Emirat à tout prix et que personne ne s'oppose à eux". Prévue en mars, l'ouverture d'un dialogue de paix, inédit entre les deux camps, a été reportée à plusieurs reprises du fait de désaccords autour d'un échange de prisonniers aujourd'hui presque achevé.