Dans une mise en scène, une dramaturgie et une scénographie de Fadhel Jaïbi, la nouvelle pièce théâtrale « Martyr », produite par le Théâtre National Tunisien, a été jouée récemment sur les planches de la salle du Théâtre du « 4è Art », à Tunis. Une immersion dans les sources de la radicalisation religieuse des jeunes qui constitue aujourd'hui un fléau planétaire à combattre. Un public assez restreint et qui avait tant attendu la reprise des représentations théâtrales sous nos cieux, à cause de la pandémie du Covid-19 qui persiste et signe encore, avait suivi, durant près de deux heures, la première de ce travail assuré par le Jeune Théâtre National 2020, soit le bon cru de l'Ecole de l'Acteur du TNT. Une dizaine de comédiens et comédiennes sont généreux dans leur jeu Ils s'y sont d'ailleurs surpassés dans leur rôle respectif. L'effort, voire le plus, était recommandé dans un spectacle théâtral visuel et mouvementé et au rythme soutenu. Les comédiens se nomment : Aws Al Zubaidy, Nouha Naffeti, Malek Chafroud, May Al Salim, Clara Fetoui El Hawa, Mahdi Ayed, Siwar Abdaoui, Amen Allah Atrous et Hamza Ouertatani. Adaptée de l'œuvre du dramaturge allemand Marius Von Mayenburg, les événements de cette pièce se passent dans un lycée en Allemagne. L'adaptation théâtrale de « Martyr » a été fidèle à l'original, dans la mesure où l'on retrouve les personnages sous leur prénom allemand. Mais ce qui « saute aux yeux », c'est que la fable colle parfaitement aux réalités tunisiennes dans un conflit au quotidien né de la « contamination » du jeune Benjamin par l'extrémisme religieux. Le parallélisme s'annonce de lui-même, car l'extrémisme dans les religions monothéistes reste le même. Dans la pièce, il s'agit de la religion chrétienne et aucun signe, aucun mot ne renvoie à la religion musulmane. C'est là la force de distiller la critique de l'extrémisme amenant inéluctablement au terrorisme quelle que soit la religion monothéiste ou autre croyance, soit-elle. Car il s'agit d'un dogmatisme qui vient basculer les normes et règles sociales, éducationnelles et personnelles, pourtant bien ancrées dans un pays. L'exemple de Benjamin, « séquestré dans les abysses du discours théologique », est-il le microcosme d'une société comme aveuglée par les nouvelles « conceptions » religieuses, dans le sens de la lecture et de l'interprétation déviées de leur sens propre. Ces interprétations ouvrent sur une vie enfermée qui ne peut accoucher que de terroristes en puissance ! La première scène de « Martyr » annonce la couleur avec Benjamin, isolé au bord de la piscine et refusant de participer à la séance de natation au cours d'un cours d'éducation physique. Il refusera à cor et à cri à se déshabiller et à porter un maillot de bain, malgré l'insistance de son professeur. La pièce nous expose des faits dangereux, après que la gangrène ait pris. Le mal est fait et les tentatives de rééduquer le jeune Benjamin s'avèreront très difficiles. La lutte est acharnée et les conflits augmentent de jour en jour entre un élève têtu et obstiné à « défendre » ses fausses convictions envers ses camarades, sa famille, ses professeurs et l'administration de son lycée. Ne faudrait-il pas revoir toute les règles éducationnelles au sein de la famille, de l'école et de la société en général ? Pour endiguer ce fléau dévastateur. L.B.K