Des députés soulèvent les questions de l'employabilité des diplômés, de la faiblesse de l'encadrement, de la concertation avec les enseignants, de la médiocrité du niveau, du manque des cadres catégorie A, etc … La Chambre des députés a adopté, hier, la nouvelle loi d'orientation de l'enseignement supérieur qui va remplacer celle du 28 juillet 1989. L'importance de cette loi a été révélée par le large débat qu'elle a suscité et qui a duré plus de trois mois. En effet, elle a soulevé des remarques là où elle est passée. Ainsi, d'une part, le Conseil Economique et Social a avancé une multitude de propositions pour l'enrichir et réviser plusieurs de ses articles. D'autre part, les commissions parlementaires spécialisées, auxquelles a été soumis le projet, ont soulevé plusieurs interrogations concernant divers articles et ont suggéré des rectifications à la version présentée. Par ailleurs, le projet initial a été révisé en vertu de ces suggestions. Beaucoup de députés ont demandé la parole, hier, pour exprimer leurs points de vue se rapportant au débat général sur le projet de loi. D'autres députés ont pris la parole lors des débats par article. Les députés ont soulevé notamment les questions suivantes :
Foued Gargouri, RCD : A demandé de placer le financement de l'Etat en 1ère position des ressources de l'enseignement supérieur (article 35) pour affirmer sa gratuité. Laquelle gratuité a été signalée dans l'article 7. Donc, le projet serait plus harmonieux si la contribution de l'Etat était placée en pôle position.
Mohamed Thameur Driss, Ettajdid : A remarqué que si la réforme est impérative, elle aurait dû se faire dans un esprit de concertation prend en considération l'avis des divers intervenants de la scène universitaire et qui concrétise un esprit de liberté et de démocratie. Or, il a signalé que l'absence de concertation et la notion de nomination, trop présente dans le projet, sont en contradiction avec cet esprit de démocratie. Il a notifié, aussi, que l'argumentaire présenté par le ministère insiste sur le cadre juridique pour justifier le recul du niveau des diplômés du supérieur. Mais, ce justificatif n'est pas plausible car l'enseignement supérieur n'est pas un service classique et l'apport des enseignants est important dans le résultat. Il a expliqué qu'on ne pouvait pas s'attendre à de bons résultats alors que plusieurs établissements supérieurs ne disposent d'aucun cadre de catégorie A. En plus, il a émis des réserves sur les éventuels dérapages qui peuvent survenir dans l'attribution d'un aspect commercial à l'établissement supérieur. A souligné, également, la nécessité de placer la contribution de l'Etat en pôle position de l'article 35 pour confirmer le principe de la gratuité. Il a regretté l'absence d'un recours systématique aux élections dans les structures de l'enseignement supérieur. Il a conclu que de telles imperfections suscitent des réserves et font qu'elles n'acquierent pas l'unanimité.
Ameur Ben Abdallah, RCD : A demandé des précisions sur les délais des décrets d'application en rapport avec cette loi. Il a suscité, aussi, des explications sur les effets éventuels de ce projet de loi sur l'employabilité des diplômés du supérieur et la synergie entre la formation et l'emploi.
Mohamed Rached Belkadhi, MDS A reproché la faiblesse de l'infrastructure qui est nécessaire pour garantir le résultat suite à l'extension de l'université. Il a noté le manque de laboratoires et de ressources humaines qui peuvent assurer la formation adéquate. Il s'est interrogé sur la qualité demandée en l'absence de cadre catégorie A dans plusieurs établissements supérieurs.
Faten Ben Amor, RCD : S'est interrogé sur la situation des enseignants hospitalo-universitaires qui relèvent de deux ministères (la santé et l'enseignement supérieur). A proposé de prendre en considération les synthèses des recherches médicales dans l'évolution de la carrière universitaire de l'enseignant.
Hamouda Trabelsi, RCD : S'est interrogé sur les aspects de complémentarité entre l'enseignement supérieur et la recherche scientifique.
Mongi Khammassi, PVP : A sollicité des précisions sur la recevabilité du projet de loi révisé sans avoir été soumis, de nouveau, au Conseil constitutionnel. Par conséquent, il a demandé de reporter le vote de cette loi afin de permettre davantage de débat avec les divers intervenants sur la scène universitaire et, notamment, les enseignants.
Zouhaïr Bel haj Salem, PUP : A constaté que le vote de cette loi passe outre à une large volonté de plusieurs composantes de la société civile et de la scène universitaire d'approfondir le débat sur l'avenir de l'université qui est un acquis national. Il a regretté l'absence d'un Conseil supérieur de l'enseignement supérieur qui aurait pu centraliser le débat sur une question aussi importante. Il a déploré la multiplication des renvois à des décrets dans des questions de principes qui devraient être intégrés dans les textes de lois. Il a précisé que l'autorité accordée aux recteurs est très large et il aurait préféré qu'elle soit accordée à un conseil d'élus pour éviter les dérapages. Il a constaté que ce projet de loi prône la nomination alors que l'orientation générale opte pour les élections, même pour des représentants des élèves des 5ème et 6ème dans l'enseignement primaire. Il a rappelé que les procédures adaptées actuellement limitent les élections des doyens à moins de 10 % des établissements supérieurs car cette élection est conditionnée par un nombre minimal d'enseignants de la catégorie A. Finalement, il a remarqué qu'on ne pouvait pas exiger la qualité de l'enseignement alors qu'il n'y a pas un encadrement de qualité. En conséquence, il a proposé de multiplier les recrutements dans la catégorie A pour renforcer l'encadrement.
Mounir Ayedi, PUP : A remarqué que la révision du projet initial n'a pas touché des questions importantes comme le respect du droit syndical, les élections des structures qui dirigent les établissements supérieurs, la création du Conseil Supérieur de l'enseignement supérieur et d'autres problématiques fondamentales. Il a relevé que la révision s'est limitée à des points secondaires. Il a demandé, aussi, l'avis du ministre sur les remarques du Conseil Economique et Social et sur les propositions de la Fédération Générale de l'Enseignement supérieur
Adel Chaouch, Ettajdid A signalé que le débat actuel montre que l'université refuse d'être gérée comme un établissement commercial. Il a remarqué que l'université tunisienne vit une crise de croissance qu'il faut gérer positivement en sollicitant la participation de tous les intervenants et, notamment, les représentants des étudiants et des enseignants.
Abdallah Chebbi, RCD : A demandé que l'université soit réservée à l'acquisition des acquis scientifiques et de l'éloigner de la politique.
Amara Abbassi, RCD : A remarqué que la loi renvoie à plus de 20 décrets ce qui diminue sensiblement son efficacité. A demandé des précisions sur la question.
Abdelhamid Ben Mosbah, UDU : A soulevé la question de l'absence de concertation préalable avec les divers intervenants sur la scène universitaire et a émis des réserves sur l'efficacité d'une telle procédure. compte-rendu de Mourad SELLAMI
Les réponses du ministre et le reste du débat paraîtront dans notre édition de demain