Le jeune dévoyé, triste héros de cette affaire, n'a pas eu à réfléchir longtemps pour trouver une sale besogne qui lui rapporte son pain ou gain quotidien, pratiquement sans coup férir. Il suffit pour cela qu'il se montre rapide comme l'éclair, lors des opérations qu'il effectue et surtout qu'il prenne ses jambes à son cou, une fois son méfait accompli. Comme quoi, compter énormément sur ces deux qualités physiques de base est d'une importance cruciale dans ce métier et que ceux qui prétendent devenir des braqueurs chevronnés doivent en être génétiquement pourvus. En réalité, c'est depuis sa prime jeunesse que notre lascar en a découvert les vertus comme le révèlent les dix mandats de recherche lancés contre lui pour différents motifs dont notamment l'usage de la violence aux dépens de paisibles citoyens qui ont déjà fait les frais de son maniement expert du fameux rasoir dont il ne se sépare jamais. Aimant prendre beaucoup de risques, il a choisi le carrefour de Bab Sidi Kacem en plein centre de la capitale, près de la faculté des sciences humaines du boulevard 9 avril, comme théâtre de ses opérations. C'est par là que transitent des milliers de voitures par jour et elles sont obligées de s'arrêter aux feux rouges, ce qui lui permet de prendre tout son temps pour en choisir une proie bien dodue. Ce sont plutôt les femmes, sagement assises sur le siège du mort (comprenez par là, le siège avant droit de la voiture), qui l'intéressent surtout si un joli collier en or, qui orne leur cou, scintille au soleil. Il ne se fait pas alors prier pour profiter du court instant de l'arrêt du véhicule pour ouvrir la portière et d'une main leste se saisir du bijou resplendissant, du sac à main, des lunettes ou du portable qui traînent sur le tableau de bord. L'effet de surprise passé et le voilà qu'il dégringole à grandes enjambées la célèbre côte de Bab Sidi Kacem pour se fondre dans la foule des badauds. Un scénario qu'il a mis astucieusement au point et qu'il lui a toujours réussi. Bien entendu, les plaintes s'amoncelèrent au poste de police de la cité Hélal, toute proche et les agents ne tardèrent pas à porter leurs soupçons sur certains énergumènes du quartier. Ils dressèrent alors un piège efficace au braqueur qui mit fin à ses activités délictueuses. Lors de son arrestation, les auxiliaires de la justice trouvèrent sur lui, outre le rasoir, des comprimés d'une drogue hallucinante qu'il utilisait pour se doter de cette témérité sans limite. Ecroué, il a été présenté à un juge d'instruction du tribunal de première instance de Tunis.