Le parti libre du Destour avait trouvé, au cours du congrès de la rue du Djebel en mai 1933, un grand soutien de la part des militants qui y avaient assisté nombreux, pour appuyer les membres du bureau exécutif et louer leur action contre le colonialisme et leur lutte continue pour la libération du pays. Ce congrès trouva un écho favorable tant auprès des militants que les observateurs venus y assister de divers pays que ce soit du Maghreb ou du Moyen-Orient. De nouveaux membres, jeunes, dynamiques et réputés pour leur fermeté et leurs idées constantes et radicales, avaient intégré désormais le bureau exécutif du Destour, tels que Mahmoud Matéri, alors jeune médecin, ou Habib Bourguiba , jeune avocat et son frère M'hamed. Le leader Bourguiba qualifia ultérieurement ce congrès d'historique. Ce fut au sein de ce congrès que fut discutée la stratégie du partie. Il importait en effet pour ces jeunes qui venaient d'intégrer le parti, de préconiser une nouvelle stratégie, la plus adéquate pour arriver au but final à savoir l'indépendance. Pour cela il fallait cesser avec la méthode de concertation qui n'apporta pas ses fruits. Il y a eu donc au cours de ce congrès un appel à la fermeté et au radicalisme. Finis les demi-mesures et les moyens pacifiques. Le mot d'ordre était à la lutte sans merci et par tous les moyens. Cette résolution suscita la colère des autorités coloniales qui y répondirent par une répression tous azimuts. Des militants furent placés sous contrôle administratif en vertu de ce qu'on avait appelé les décrets scélérats en mai 1933. Des journaux tels que " l'Action Tunisienne " ou " la voix du peuple "étaient suspendus. Le parti du Destour était menacé de dissolution. Le nouveau Résident Général, Marcel Peyrouton, qui remplaça François Manceron, profita de l'occasion pour semer la zizanie et créer la discorde entre les membres du Destour. En effet ayant rencontré certains d'entre eux, il essaya d'user de sa ruse, pour leur promettre d'une part certaines réformes, et leur demander en contrepartie de revenir sur les résolutions prises au congrès de la rue du Djebel, afin de revenir à la concertation avec les autorités coloniales. Ce qui suscita l'indignation de tous ceux qui avaient refusé cette rencontre qu'il considéraient comme étant une forme de collaboration. Par ailleurs, Bourguiba avait démissionné du bureau exécutif suite aux réprimandes dont il fit l'objet, après avoir accompagné une délégation de dignitaires qui s'étaient rendus chez le Bey pour protester contre l'inhumation du fils d'un naturalisé dans le cimetière musulman de Monastir. Plusieurs membres du bureau exécutif avaient donc, suite à ces événements,décidé de se retirer du parti du Destour. Ce fut au congrès de Dar Ayed à Ksar Hellal, organisé le 2 mars 1934, que la scission fut décidée par un certain nombre de destouriens qui votèrent la dissolution du bureau exécutif. Les protagonistes se réunirent le 27 avril 1934 à la rue Gharnouta à Tunis, pour décider l'exclusion de tous les dissidents du parti du Destour. Ce fut dans ces circonstances qu'était né le parti du Néo-Destour. Ses nouveaux membres, jeunes pour la plupart, et de culture pluridimensionnelle, ayant été formés en Europe tels que Bourguiba, Matéri ou Ben Youssef, étaient décidés d'en finir avec les méthodes figées et conservatrices. Le Néo-Destour prendra petit à petit le pas sur le Destour, qui finira par s'éclipser surtout après le départ au Moyen-Orient de plusieurs de ses membres, dont Thâalbi, qui pourtant avait tout fait en vue d'une une réunification du Destour et d'une réconciliation de ses membres. En vain, car la divergence d'idéologie et de méthode de travail, empêchait la moindre réconciliation voire le moindre rapprochement entre les protagonistes, qui pourtant œuvraient pour un but commun.