Le prix du pétrole galopait hier vers la barre des 120 dollars le baril, certains le voyant même bientôt à 130 dollars, sous l'impulsion d'une série de facteurs: réticence de l'Opep à produire plus, fonte des stocks, sous-investissement dans le secteur, risques géopolitiques accrus et dollar faible. Il y a à peine quatre mois, le débat faisait encore rage entre experts pour savoir si l'on verrait un jour le baril de brut atteindre le seuil mythique de 100 dollars. Ce fut chose faite le 2 janvier. La hausse des prix du pétrole s'est ensuite brutalemement accélérée, au point de battre les pronostics les plus audacieux : après avoir depassé 110 dollars le 14 avril, le prix du baril taquine dorénavant les 120 dollars. Mardi, il s'est hissé jusqu'à 118,06 dollars à New York, un nouveau record. Le pétrole a donc fait en sept mois à peine un chemin qu'il avait mis quatre ans à parcourir: passé de 40 à 80 dollars entre 2004 et fin 2007, il a depuis lors gagné presque 40 dollars. "Le pétrole poursuit sa course, semble-t-il sans relâche, vers les 120 dollars", notait Mic Mills, du courtier en ligne Tradindex. Les raisons de cet emballement sont multiples. En toile de fond, l'industrialisation à cadence rapide des pays émergents, menée par le dragon chinois, entraîne une forte hausse des besoins mondiaux d'hydrocarbures. Le cartel pétrolier s'est contenté d'annoncer mardi qu'il allait accroître de 5 millions de barils par jour sa capacité de production d'ici 2012, pour calmer une inquiétude de fond, autre composante essentielle des prix actuels : s'alarmant du sous-investissement dans le secteur pétrolier, le marché doute que les pays producteurs puissent répondre, à long terme, aux besoins mondiaux. Facteur plus récent mais essentiel, la dépréciation continue du dollar, dont la valeur, à près de 1,60 dollar pour un euro, n'a jamais été aussi basse, a aussi largement participé à la flambée. Elle incite les fonds d'investissements à acheter des matières premières vendues en dollars pour se prémunir contre les risques d'inflation. Les analystes de Barclays Capital visent déjà la dizaine du dessus: ils estiment "possible que les prix grimpent jusqu'à 130 dollars".