Le Temps-Agences - Les ministres de l'Intérieur des Vingt-Sept ont entériné un accord très controversé fixant à 18 mois la durée maximale de détention des immigrés clandestins avant leur expulsion vers leurs pays d'origine. Ils ont ainsi adopté un compromis passé entre la présidence slovène de l'Union européenne et des membres du Parlement européen, qui doit encore confirmer son assentiment ce mois-ci lors d'un vote où chaque voix comptera. "J'espère vraiment que le Parlement votera en première lecture", a déclaré le ministre slovène de l'Intérieur, Dragutin Mate. "Sinon, c'est le scénario-catastrophe. Il faudrait tout recommencer à zéro, cela prendrait au moins trois ans." Après trois ans de négociations sur la "directive retour", qui entrera en vigueur en 2010, l'UE a adopté comme durée maximale la norme britannique et allemande et a fixé à cinq ans l'interdiction de pénétrer à nouveau sur son territoire. Les défenseurs des droits de l'homme ont protesté contre ce projet qu'ils jugent très dur, puisque la durée maximale de la détention n'est par exemple que de 32 jours en France. La durée maximale sera de six mois, avec la possibilité de l'allonger de 12 mois dans certaines circonstances, par exemple le manque de coopération du pays d'origine de l'immigrant illégal qui refuserait son retour. Les pays membres seraient autorisés à maintenir une durée de détention inférieure à 18 mois et seuls les huit pays où la durée de détention est supérieure à cette durée ou qui n'ont pas de règle fixe devront adapter leur législation. Mais les défenseurs des sans papiers estiment que la directive européenne risque d'inciter les Etats membres à s'aligner sur la durée maximale prévue par l'accord. En outre, le texte prévoit que les enfants peuvent également être détenus, mais pendant une durée aussi brève que possible. Le ministre français de l'Immigration, Brice Hortefeux, a toutefois annoncé que la France ne modifierait pas sa loi. "Ça ne changera rien pour le système français", a-t-il déclaré en assurant que la durée maximale de rétention resterait de 32 jours, la moyenne se situant à 12 jours à peine. Le commissaire européen chargé du dossier, Jacques Barrot, s'est emporté contre les critiques qu'il juge injustes. "Je crois qu'il ne faut pas caricaturer, cette directive constitue un progrès incontestable", a-t-il dit en rappelant qu'il s'agissait des normes du Conseil de l'Europe et que cela permettra d'harmoniser des pratiques législatives disparates qui sont mises à profit par les "passeurs" d'immigrés clandestins. Tous les Etats membres devront accorder aux immigrés illégaux un droit de recours contre la décision d'expulsion et financer leurs droits de représentation devant la justice ainsi qu'une assistance linguistique et les soins médicaux. Le texte adopté prévoit que la détention ne doit être qu'un dernier recours, lorsque des mesures moins coercitives ne peuvent être appliquées pour des raisons de maintien de l'ordre. Les défenseurs des droits de l'homme ont appelé le Parlement européen à rejeter cette législation. Les conservateurs et les libéraux la soutiennent, mais les socialistes de même que les écologistes et les communistes y sont opposés sous sa forme actuelle, ce qui rend l'issue du vote difficile à prédire.