Le Tunisien ne travaille que huit minutes par jour ? Le vrai du faux    Tunis : arrestation d'un takfiriste recherché    Première expulsion d'un demandeur d'asile du Royaume-Uni vers le Rwanda    Taboubi : l'UGTT représente une force que nul ne peut ignorer !    Djebel Jelloud : un élève placé en garde à vue après avoir agressé son enseignant    20e édition du Pamed, jusqu'au 3 mai à Yasmine Hammamet : La production animale entre projets et défis    Mineurs et criminalité : Coupables ou victimes ?    Changement climatique : L'agriculture demeure le principal driver de la croissance    CONDOLEANCES DE LA CCITF    Sanctions confirmées par l'Agence mondiale antidopage contre la Tunisie    DECES : Dr Lamine MEZIOU    Place Mohamed Ali-Hammi : Inauguration du siège de l'UGTT    Tunisie – Electricité: Des projets de 500 mégawatts à partir des énergies renouvelables avant fin juin 2024    Pourquoi : Ni vu, ni connu !    Vie associative | Génération mécénat    INM: Les quantités de pluies enregistrées en millimètres durant les dernières 24H    Exclusif: La ministre de l'Education en visite dans le gouvernorat de Nabeul    «La journée des Talents» à l'Institut Supérieur des Langues de Tunis (Islt) : Graines de talents    Célébration du «Jazz Day» au Goethe Institut, le 2 mai 2024 : Sous le signe de la virtuosité    Rencontre avec Selma Baccar : «Le cinéma d'auteur est un cinéma d'engagement»    Quelle est l'origine du 1er-Mai, journée de lutte pour les droits des travailleurs ?    Météo du 1er Mai: Des nuages passagers sur la plupart des régions    TPR: Un bénéfice net de plus de 41 millions de dinars en 2023    CONDOLEANCES : Noureddine KETARI    USA – Pris d'assaut de campus Columbia : Arrestations massives lors d'une manifestation pro-Gaza    En légère hausse, le TMM s'établit à 7,96%, en avril 2024    Elections de la FTF : rejet des listes de Ben Tekaya et Tlemçani    Tunisie – Chebbi : Le front du salut ne présentera pas de candidat aux présidentielles    Sonia Sahli nouvelle Déléguée Générale au Conseil Bancaire et Financier    Refus de libération de Fathi Dammak    1er mai: Ce mercredi, accès gratuit aux musées    Bayern Munich - Real Madrid : Sur quelle chaîne voir le match de la Ligue des champions ?    Les Totally Spies sont de retour après 11 ans d'absence : Date et chaîne de diffusion    Malmö Arab Film Festival 2024 : Des artistes et réalisateurs tunisiens se distinguent (palmarès)    Attaque armée dans un restaurant célèbre à Istanbul    En solidarité avec Gaza : Les étudiants tunisiens descendent dans la rue    Tunisie Telecom remporte le prix Brands pour la publicité ramadanesque la plus engagée    City Cars augmente ses revenus de 29,1% au premier trimestre 2024    Tunisie – Jumelage entre l'amphithéâtre d'El Jem et le Colosseo de Rome    WTA 1000 de Madrid : Ons Jabeur va en quarts    Hand – Coupe de Tunisie : programme des quarts de finale    HAYA : Journée sportive pour le jeunesse    Journées Romaines de Thysdrus : retour en vidéos sur la manifestation qui a animé la ville d'El Jem    Les étudiants tunisiens manifestent pour une Palestine libre et indépendante    Conférence de la ligue des parlementaires : Le soutien de la Tunisie au peuple palestinien est indéfectible    COMMENTAIRE | Entre Mai 1968 et Avril 2024 : les étudiants donnent de la voix et montrent la voie !    Expatriés | Rafia à la relance    POINT DE VUE | La tête sur les épaules !    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Comment désamorcer la bombe palestinienne ?
Le temps du monde
Publié dans Le Temps le 18 - 12 - 2006

Les deux principales forces politiques palestiniennes, à savoir le Hamas (mouvement islamiste radical), majoritaire depuis les dernières élections législatives, et le Fatah (mouvement national laïc), qui a perdu ces élections -mais pas la tête de l'exécutif, encore assuré par son leader, Mahmoud Abbas- semblent être arrivés à la conclusion qu'ils ne pourront pas, dans l'état actuel, se mettre d'accord sur la formation d'un gouvernement d'union nationale.
Mais est-ce là une raison suffisante pour qu'ils rompent le dialogue et se lancent dans une confrontation dont ils auraient tout à craindre pour l'unité de leur peuple ?
Ce qui s'est passé, mercredi soir, au point de passage de Rafah, à la frontière entre l'Egypte et Gaza, où le Premier ministre islamiste Ismaïl Haniyeh a été l'objet d'une tentative d'assassinat, et les heurts sanglants qui ont suivi cette tentative, devraient donner à réfléchir aux deux protagonistes, à leurs alliés régionaux et à la communauté internationale dans son ensemble. Autant d'ailleurs que la décision annoncée samedi par le président de l'Autorité palestinienne de convoquer le plus tôt possible des élections présidentielle et législatives anticipées. Car loin d'aider à calmer les esprits après le grave incident de mercredi, cette décision intempestive, car mal préparée, n'a fait qu'ajouter de l'huile sur le feu, rendant la situation encore plus explosive.
Si elle venait à se déclencher, une guerre civile entre Palestiniens serait difficile à contenir et ses conséquences sur toute la région du Moyen-Orient catastrophiques. Le feu ainsi allumé serait d'autant plus difficile à éteindre que le conflit inter- palestinien pourrait alimenter un autre, encore plus grave, dont on a déjà un avant-goût amer en Irak et au Liban, entre l'Iran perse et chiite, d'un côté, et de l'autre, les pays arabes et sunnites, avec une étrange alliance, celles des pays arabes sunnites et d'Israël, également concernés par la menace iranienne.
L'influence grandissante des chiites en Irak, conséquence directe de l'occupation américaine de ce pays, la montée du Hezbollah pro-iranien au Liban et le rapprochement récent entre le Hamas palestinien et la République islamique, qui est en voie de se doter de la bombe atomique, sont des données inquiétantes, non pas seulement pour Israël qui a été incapable de démanteler, l'été dernier, l'infrastructure militaire du Hezbollah au Liban, mais aussi pour les pays arabes à majorité sunnite, qui ont de bonnes raisons de redouter une contagion islamiste radicale. Ce qui s'est passé la semaine dernière dans la Bande de Gaza est très significatif à cet égard et doit être considéré comme un signal d'alarme.
Que s'est-il passé au point de passage de Rafah ?
Mercredi 13 décembre au soir. Le premier ministre palestinien, qui revenait d'une tournée de collecte au Soudan, en Syrie, au Qatar et en Iran, avait été bloqué au passage de Rafah, sur ordre du ministre israélien de la défense Amir Peretz, qui voulait l'empêcher d'introduire dans la Bande de Gaza la somme collectée dans ces pays, estimée à quelque 35 millions de dollars (1). C'est, en fait, à El Arish, en Egypte, pendant qu'il attendait l'autorisation de franchir le poste frontalier de Rafah, que le Premier ministre palestinien apprit la décision d'interdiction d'entrée dans la Bande de Gaza. Les directives venaient apparemment du Premier ministre Ehoud Olmert personnellement.
Haniyeh, qui avait abrégé son voyage en raison de la tension croissante entre le Hamas et le Fatah dans les territoires palestiniens, avait prévu de tenir une conférence de presse dès son arrivée à Rafah afin de faire le compte-rendu de sa tournée et annoncer à ses adeptes qu'il rapportait des sommes importantes qui serviraient à payer les salaires des employés, gelés depuis l'arrivée du Hamas au gouvernement, en mars dernier, et à améliorer le quotidien des populations.
Apprenant la nouvelle de l'interdiction d'entrée de leur leader, des centaines de membres du Hamas se sont rendus sur place, et des échanges de tirs ont commencé entre eux et les forces de la garde présidentielle d'Abbas, et même avec des forces égyptiennes de sécurité, faisant plusieurs dizaines de blessés et de nombreux dégâts aux installations.
Le chef des services de renseignements égyptiens, qui a été sollicité pour intervenir en faveur d'Haniyeh, a finalement conclu un arrangement avec ses homologues israéliens en vue de permettre l'entrée du leader palestinien dans la Bande de Gaza. Pour cela, ce dernier a dû se délester de l'argent qu'il transportait et accepter que cet argent soit versé sur un compte de la Ligue arabe en Egypte. On apprit par la suite que les sommes ainsi déposées seront transférées ultérieurement à l'Autorité palestinienne par l'intermédiaire de la Ligue arabe.
Le convoi d'Haniyeh avait à peine franchi la frontière entre l'Egypte et la Bande de Gaza que des « inconnus » ont tiré dans sa direction. L'un des gardes du corps du Premier ministre a été tué, son fils, Abdessalem, blessé, en même temps que l'un de ses conseillers politiques et de ses gardes du corps.
Dans l'entourage d'Haniyeh, les doigts accusateurs se sont immédiatement dirigés vers la « Force 17 », la garde présidentielle d'Abbas. Malgré les « regrets » exprimés par ce dernier au Hamas, les militants islamistes ont continué à crier vengeance et, dans un premier temps, exigé du président de l'Autorité palestinienne de mettre toute la lumière sur cet attentat.
Au Hamas, on affirme « savoir qui est derrière cet attentat et comment régler ce problème ».
Des accusations et des menaces précises ont même été proférées contre certaines personnes, dont Mahmoud Dahlan, homme fort du Fatah dans la Bande de Gaza.
L'incident a montré, s'il en était encore besoin, le profond fossé qui sépare désormais les deux principales forces politiques du pays, le Fatah et le Hamas, et les deux têtes de l'exécutif palestinien, le président Abbas et le Premier ministre Haniyeh, qui semblent déterminés à mettre fin à une cohabitation de plus en plus difficile à gérer.
C'est le cas, en tout cas, du président Abbas qui a annoncé, avant-hier, dans un discours transmis en direct à la télévision, sa décision de convoquer des élections présidentielle et législatives anticipées et recommandé qu'elles aient lieu le plus tôt possible. « Revenons vers le peuple, pour entendre sa voix, et laissons le être le juge », a-t-il lancé, sous les applaudissements d'une foule de ses partisans. Soit, mais il faudrait que cela soit accepté aussi par les gens du Hamas, qui ont de bonnes raisons de se prévaloir d'une légitimité déjà acquise par les urnes.
L'épreuve de force (ou « le coup d'Etat », selon la terminologie utilisée par les membres du Hamas) lancée par la présidence palestinienne contre le gouvernement islamiste est-elle donc bien entamée ? Va-t-elle déboucher sur de nouvelles violences inter- palestiniennes voire une guerre civile ? Le Proche-Orient, Israël compris, peut-il supporter le chaos généralisé qui s'ensuivrait ? La communauté internationale- Etats-Unis, Europe et Ligue arabe en premier lieu- peuvent-ils supporter plus longtemps les conséquences dramatiques de la situation actuelle où les Palestiniens sont maintenus sous pression, affamés et poussés à s'entretuer ?
'' 1,3 million d'êtres humains emprisonnés dans un espace clos comme des poulets de batterie''
La situation dans les territoires palestiniens et surtout à Gaza est dramatique et urgente : les écoles, les centres de santé, la distribution d'eau courante, d'électricité, de médicaments ne fonctionnement plus depuis avril, 79% des familles de Gaza vivent dans une pauvreté extrême (contre 30% en 2000), connaissent une hausse généralisée du chômage (45%), la famine et des risques accrus d'épidémie.
« Même selon les sinistres standards de Gaza, les 5 derniers mois ont été des mois cruels. Quelque 400 palestiniens, la plupart des civils non armés, ont été tués au cours d'attaques israéliennes (4 soldats israéliens et 2 civils ont été tués), Israël a bouclé Gaza, la coupant du monde extérieur, tandis que la communauté internationale a imposé des sanctions brutales, ravageant l'économie de Gaza déjà sinistrée », a écrit Norman Finkelstein, sur le site ''www.counterpunch.org''. « Gaza est entrain de mourir, son peuple est au bord de la famine, une société entière est entrain d'être détruite. Le bruit le plus terrifiant pour les Palestiniens, c'est celui d'une voix anonyme sur leur téléphone portable disant qu'ils ont une demi heure pour quitter leur maison avant qu'elle ne soit détruite par des bombes ou missiles. On ne peut pas faire appel », renchérit Patrick Cockburn sur le même site. « Gaza vit dans les pires conditions jamais connues, l'armée israélienne a semé la dévastation à travers Gaza-il n'y a pas d'autre mot pour le décrire- tuant et démolissant, bombardant et pilonnant de façon indiscriminée. C'est une punition collective, honteuse et choquante », ajoute Gideon Levy dans le quotidien de gauche ''Haaretz''. « Comme on pouvait le prévoir, Gaza s'est trouvée sur le bord d'une guerre civile fratricide. L'expérimentation a été un succès. Les Palestiniens se tuent entre eux. Ils se conduisent comme prévu, à la fin d'une longue période appelée ''qu'est ce qui arrive quand vous emprisonnez 1,3 million d'êtres humains dans un espace clos comme des poulets de batterie'' », observe Amira Hass de façon narquoise dans le même journal.
Autre témoignage israélien, celui des '' Femmes en Noir'' israéliennes (1), qui ont organisé la campagne « Levez le siège de Gaza ! Arrêtez la guerre ! » couronnée par une grande manifestation à Tel Aviv, le 2 décembre. Evoquant le « le terrible siège actuel de Gaza ». ces militantes pacifistes écrivent dans le manifeste publié à cette occasion : « Le siège a débuté il y a six mois pour répondre à l'élection du Hamas. Dans le but de couper les ressources financières du gouvernement du Hamas- soi- disant pour éviter le financement du terrorisme- la Communauté internationale a isolé la Palestine en imposant un embargo sur le commerce et les activités bancaires et en réduisant sévèrement l'aide internationale. Cela n'empêche pas Israël de continuer à limiter les déplacements à l'intérieur de la Palestine, restreindre presque toutes les entrées et sorties de la Bande de Gaza et à conserver les taxes qu'il prélève pour l'Autorité palestinienne ».
Résultat, ajoutent les ''Femmes en Noir'' : « le chaos, la violence et la pauvreté qui se sont alimentés l'un, l'autre. L'armée israélienne a fait pleuvoir des tirs sur les habitants de Gaza, tandis que des militants palestiniens ont envoyé des missiles artisanaux Qassam dans des villes israéliennes voisines. Rien que dans les quatre derniers mois, près de 400 habitants de Gaza ont été tués par la puissance de feu israélienne, deux Israéliens ont été tués par la puissance de feu palestinienne et, des deux côtés, les enfants sont à présent traumatisés pour le restant de leur vie. »
Autre témoignage alarmant, celui John Ging, directeur des opérations de l'UNRWA, l'agence des Nations unies pour les réfugiés de Palestine, qui décrit le naufrage de la Bande de Gaza, véritable prison à ciel ouvert, dans un entretien au magazine français '' L'Express'' (2 novembre). Environ un million de Palestiniens, sur un total de 1,4 million d'habitants à Gaza, dépendent désormais de l'aide fournie par son organisation. En moins d'un an, tous les indicateurs se sont dégradés. « Nous procurions alors une aide alimentaire directe à 650 000 personnes. Le total atteint désormais 850 000. Nos études les plus récentes montrent que 87 % de la population de la Bande vit dans la pauvreté, dont 79% dans un état de dénuement extrême », explique Ging.
Cette dégradation est due, selon lui, à la suspension des concours financiers internationaux depuis la victoire électorale de Hamas et son corollaire, le non-paiement des salaires des fonctionnaires locaux. Les incursions militaires israéliennes ont aggravé encore la situation. Ainsi, la destruction de la centrale électrique, qui fournissait 60% des besoins, a eu un impact terrible. Les gens dans l'enclave surpeuplée n'ont que quelques heures de courant par jour. La distribution d'eau courante est affectée elle aussi. Plus généralement, tous les services publics s'effondrent, à commencer par la collecte des ordures et le traitement des eaux usées.
« Mais rien à ce stade n'est plus inquiétant que le naufrage de l'ordre public, consécutif aux affrontements entre le Hamas et le Fatah. Quant au verrouillage quasi-total des trois voies d'accès-Erez, Karni et Rafah-, il accroît l'accablement », ajoute le fonctionnaire de l'UNRWA, qui souligne également le désespoir des civils, leur frustration et leur peur du lendemain. « La Bande de Gaza a connu bien des épisodes difficiles, dit-il, mais jamais une telle combinaison de désastres, évidemment propice à la radicalisation des esprits, notamment au sein de la jeunesse. Ne subsiste aujourd'hui aucune perspective d'avenir. Nous persistons, nous les gens de l'ONU, à préconiser la modération et la tolérance, mais que pèsent nos mots face à la réalité de terrain ? Ce territoire est peuplé avant tout de gens civilisés, qui aspirent à une existence paisible. Laissons-leur au moins cette chance. »
Puis, cette terrible conclusion, qui donne froid au dos à qui veut encore entendre, et peut-être agir : « La Bande de Gaza est une bombe à retardement. J'entends de plus en plus clairement le tic-tac. Le moment de l'explosion approche. Le temps presse. Ce n'est pas une formule, c'est la réalité telle qu'on la vit ici. »
Que faire pour éviter une catastrophe annoncée ?
Laisser pourrir davantage une situation déjà pourrie ? Continuer à affamer le peuple palestinien sous prétexte de bouter les islamistes du Hamas hors du gouvernement ? Attendre le déclenchement d'une guerre civile inter- palestinienne afin de démontrer de manière définitive qu'il n' y a pas d'interlocuteur en face, comme le font aujourd'hui les Israéliens ? Dans un chat sur le site '' lemonde.fr'' (15 décembre 2006), l'expert français Jean-François Legrain préconise une solution qui mérite d'être méditée : « L'une des portes de sortie, dit-il, serait l'autodissolution de l'Autorité d'autonomie par un commun accord entre le Fath et le Hamas, qui viserait à mettre la communauté internationale face à ses responsabilités. Cette communauté, depuis des décennies, préconise la création de deux Etats en Palestine, l'Etat d'Israël et l'Etat palestinien, mais elle n'a jamais pris les moyens pour parvenir à la mise en œuvre de ses propres résolutions. En dissolvant l'Autorité d'autonomie, les Palestiniens conduiraient la communauté internationale à une implication effective, plus seulement financière, mais également politique et éventuellement militaire, en accord avec ses propres principes ».
Le chercheur français admet cependant que cette solution constituerait « une rupture avec la politique internationale des dernières décennies, dont la dérive a pu être observée vers un désengagement politique au profit, de facto, de la première puissance dans la région, Israël, qui bénéficie du soutien actif des Etats-Unis. Donc un abandon des principes au profit d'une logique des simples rapports de forces. »
Traduire : seul le rétablissement des principes et, son corollaire, le respect de la légalité internationale et des engagements passés par chaque partie, ou en d'autres termes, la relance du processus de paix sur la base de la ''feuille de route'' élaborée par le Quatuor (Nations unies, Etats-Unis, Union européenne et Russie), pourraient éviter aux Palestiniens- et à leurs voisins israéliens- les affres d'un chaos généralisé.
1- Les '' Femmes en Noir'' constituent un réseau international informel où des femmes s'engagent à titre personnel, unies par des idéaux de pacifisme, de féminisme et de multiculturalisme. Les ''Femmes en Noir'' sont apparues pour la première fois en 1988, en pleine Intifada pour réclamer la fin de l'occupation israélienne des territoires palestiniens. Elles expriment leur protestation dans la rue contre leur propre gouvernement. Elles manifestent en silence et vêtues de noir.
Bien vu
Pour une poignée de dollars
Par Avi Issacharoff
« Regardez vers l'Est et vous verrez comment les Palestiniens vivent. Il y a chez nous un proverbe qui dit que si votre voisin a faim, il faut commencer à vous faire du souci. Les Palestiniens ont faim », dit Jibril Rajoub au confrère israélien de ''Ha' aretz'' Avi Issacharoff, qui témoigne ici de l'immense désespoir des leaders palestiniens.
Il y a environ six mois, un débat en profondeur a eu lieu au sein du Hamas sur la question de l'aide financière de l'Iran. A cette date déjà, il était clair que l'embargo international rendait difficile l'action du gouvernement Hamas, même si Téhéran promettait ses millions. Le chef du groupe parlementaire du Hamas, Salah al- Bardawil, avait affirmé à l'époque à ''Ha'aretz'' qu'il y avait désaccord au sein du mouvement : fallait-il, oui ou non, prendre l'argent ? Car il était clair que cela aurait un prix : le Hamas serait associé dans l'esprit de la communauté internationale à « l'axe du Mal », et l'Iran voudrait « conseiller » l'organisation dans ses décisions.
Mais depuis lors, il est devenu clair que le Hamas a laissé ses principes de côté et s'est concentré sur l'argent. Plus d'une fois, des éléments égyptiens ont accusé Khaled Mesh'al et ses collègues d'avoir, pour une poignée de dollars que l'Iran avait transférés au Hamas, fait échouer un accord de libération de prisonniers palestiniens en échange de Gilad Shalit.
L'annonce faite par le premier ministre palestinien Ismaïl Haniyeh de l'accord de l'Iran de transférer 250 millions de dollars US à son gouvernement en 2007 symbolise le changement qu'a connu le Hamas depuis son arrivée au pouvoir. Cette organisation, qui avait tenté depuis sa victoire aux élections de préserver ses relations avec l'axe irano-syrien en parallèle avec ses liens avec l'Egypte, la Jordanie et l'Arabie saoudite, a formé une alliance stratégique avec les « Perses », comme le président égyptien Moubarak les appelle. De hauts représentants du Hamas ont été déclarés persona non grata, non seulement en Jordanie, mais aussi en Arabie saoudite. Toutefois, les Egyptiens tentent encore de maintenir les apparences et n'ont pas coupé les liens avec le Hamas. Sur les 250 millions de dollars US (promis par l'Iran), environ 100 millions iront directement au Hamas, qui pourra renforcer sa puissance militaire dans la bande de Gaza et ses institutions sociales, qui lui apportent du soutien populaire.
Du côté du Fatah de Mahmoud Abbas, malgré les conséquences de l'aide iranienne pour l'avenir du Fatah, on ne panique pas encore, le président continue de faire preuve de ses habituelles hésitations (...)
D'autres représentants du Fatah refusent de céder à la panique : « Ce qui m'ennuie plus que tout, c'est l'occupation israélienne, et non l'alliance entre Téhéran et le Hamas », dit Jibril Rajoub. « La barrière sur la route vers chez moi, à Hebron, la clôture de séparation, comme vous l'appelez (il le dit en hébreu, d'un ton particulièrement méprisant), les clonies juives, tout cela m'ennuie beaucoup plus. Qu'ai-je à faire de ce qui se passe avec l'Iran ? »
Aujourd'hui, Jbril Rajoub étudie la société israélienne à l'université Al-Qods, mais il est toujours un dirigeant important du Fatah. Par le passé, le Hamas l'a accusé de trahison et de collaboration avec l'Israël. Maintenant, il fait attention à ne pas porter atteinte à l'honneur de l'Organisation, peut-être à cause des expériences amères qu'il a connues du côté isralien.
« Notre problème n'est pas le Hamas. Après le meurtre des enfants à Gaza, il est clair qu'il faut parvenir à un accord avec toutes les factions, pour qu'il n'y ait plus d'armes illégales à Gaza. Mahmoud Abbas doit dire : ''Assez, j'en ai marre''. Il doit prendre des mesures pour que les habitants de Gaza soient de nouveau en sécurité ».
Mais Rajoub ne se hâte pas de critiquer Mahmoud Abbas. Il explique la situation complexe à laquelle il doit faire face : « Il a trois options : la création d'un gouvernement d'unité nationale qui pourra lever l'embargo, un référendum ou des élections anticipées. Mais aucune n'est possible sans un accord avec le Hamas. Il doit donc négocier directement avec eux ».
Par ses études sur Israël, Rajoub connaît bien les questions du sionisme. Il énumère les pays que Theodor Herzl a visités pour tenter de convaincre le monde de la nécessité pour les Juifs de créer un foyer national. « Il n'y a que la France où il ne soit pas allé », explique Rajoub, puis il revient au conflit israélo-palestinien : « Regardez vers l'Est et vous verrez comment les Palestiniens vivent. Il y a chez nous un proverbe qui dit que si votre voisin a faim, il faut commencer à vous faire du souci. Les Palestiniens ont faim ».
(D'après ''Ha'aretz'' du 15 décembre 2006, traduit de l'hébreu par Gérard pour « La Paix Maintenant »).


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.