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Quelles sont les dipsoistions de l'entrepreneur tunisien
Décryptage : La culture de gouvernance entrepreneuriale
Publié dans Le Temps le 28 - 04 - 2009

Parmi les raisons qui expliquent le fossé qui sépare pays développés et pays en développement, on peut évoquer les rôles joués dans la réussite des entreprises par l'imagination créatrice, le talent d'organisation et le comportement innovateur du chef d'entreprise. Ces aspects sont fondamentaux pour le progrès technique et le développement social.
Plus que jamais, la création de nouvelles entreprises et leur réussite passent aujourd'hui par l'émergence d'une race de promoteurs éveillés qui appliquent de véritables principes de l'entrepreneurship. Il fut un temps où un commerçant ou un agriculteur disposant d'un capital suffisant se lançait dans la réalisation d'un projet industriel et le réussir. De nos jours, la complexification de la concurrence requiert d'un promoteur un grand potentiel de management, une parfaite connaissance de son futur projet et des conditions de sa réalisation et de sa pérennité.
Si nous analysons les statistiques relatives aux projets industriels en Tunisie nous constatons qu'une bonne partie des projets agréés ne se réalisent jamais et quand bien même ils se réaliseront, un grand nombre connaît des difficultés de survie et même périclite au bout des cinq premières années (on peut estimer le taux de mortalité des entreprises au bout de 5 ans de leur existence à 50%). Les causes de cet échec sont, hormis l'environnement difficile dans lequel s'insère l'entreprise nouvellement créée, sont d'ordre humain : insuffisance de la capacité entrepreneuriale chez le nouveau promoteur et mauvaise appréciation de son projet.
Quelles sont les dispositions générales de l'entrepreneur tunisien ? Qu'est ce qui caractérise son comportement managérial ?
La caractérisation de ces comportements révèle, d'une manière générale, l'appartenance des entrepreneurs tunisiens à une certaine culture industrielle. Mais qu'entend-t-on par culture industrielle ? La culture industrielle comme le souligne J.C. PERRIN est « à la fois la représentation des phénomènes techno-productifs, l'explication de leur fonctionnement et les solutions qui sont préconisées dans le développement des firmes et de leur environnement ». Dans ce cas, quel est le type de culture industrielle auquel s'apparente l'industriel tunisien ? Avant de répondre à cette question, il convient d'abord de dresser une typologie de la culture industrielle en fonction de la manière dont elle traite le dilemme risque/profit. En gros on peut dire qu'il existe deux types de réponses différentes, l'une est conservatrice l'autre est innovatrice.
L'attitude conservatrice se caractérise par sa préférence pour la profitabilité immédiate, elle s'efforce de maximiser le profit en minimisant le risque à court terme, elle mise sur les ressources ainsi acquises pour faire face aux risques futurs. C'est la logique de l'exploitation des ressources données et des rentes acquises qui prévaut. Ici les solidarités sont plutôt orientées vers la défense des intérêts particuliers, le milieu local étant plus segmenté, plus corporatiste, plus conservateur, moins innovateur.
L'attitude innovatrice a une préférence pour la profitabilité à long terme. Elle tend à maximiser le profit dans la durée en faisant prédominer la réduction du risque immédiat. Elle a une logique de création des ressources de l'innovation et de l'avantage de l'avance technologique. Les milieux sont plus ouverts et plus orientés vers l'innovation technologique.
Il paraît évident que dans notre cas, l'entrepreneur-type tunisien se caractérise, à des exceptions près, par son opportunisme, sa recherche du profit immédiat, sa vision court-termiste pour tout ce qui a trait à l'évolution de sa firme, son cloisonnement, sa rationalité limitée et l'absence de tout effort d'innovation et d'ouverture.
Ce type de comportement qu'on qualifie de conservateur est devenu anachronique et explique, pour une bonne part, la faiblesse structurelle des entreprises tunisiennes.
Les raisons de ce type de comportement ne sont pas seulement d'ordre psychologique ou sociologique mais découlent aussi du fait que ces entreprises ont opéré pendant des années dans un environnement protégé de la concurrence internationale et parfois locale (du fait du nombre limité des concurrents locaux), soutenues par un ensemble de mesures d'encouragement et d'incitation de l'Etat qui n'incite pas à l'effort, à la rationalisation des comportements et à l'innovation.
D'autre part, les programmes des institutions éducatives, tant en formation initiale qu'en formation continue, mettent l'accent sur les aspects techniques du management et se concentrent spécifiquement sur l'économie, les finances et les méthodes quantitatives. Ils n'accordent qu'une attention minimale au comportement humain et aux compétences relationnelles. Or, une bonne compréhension du comportement humain peut jouer un rôle déterminant dans l'efficacité des managers. Des études faites dans les pays développés sur les salariés ont montré que l'attrait d'un poste et le désir de rester dans la même entreprise ne dépendaient pas seulement du salaire et des avantages annexes. L'ambiance, le soutien apporté dans le travail, la possibilité de bénéficier d'une formation continue tout au long de sa carrière s'avèrent bien plus déterminants.
Pour réussir dans le management, certaines entreprises ont compris que les compétences techniques des managers sont certes nécessaires mais insuffisantes. Aujourd'hui dans un environnement de plus en plus concurrentiel et exigeant, de bonnes compétences relationnelles sont également indispensables.
Pour les entreprises modernes c'est-à-dire innovatrices, les objectifs ne se ramènent plus seulement à l'accumulation du profit mais se sont élargis pour englober l'expansion, l'innovation et l'épanouissement humain. Bloquer cette évolution et continuer de se comporter de façon obsolète nonobstant les défis lancés et ignorant les mutations en cours conduiraient inexorablement à des situations de plus en plus difficiles qu'on aimerait bien éviter. Il ne s'agit plus pour l'entreprise de chercher à réaliser seulement des profits, il faut créer de la nouveauté. L'innovation doit être l'une des principales finalités de l'entreprise lui permettant de rester jeune, compétitive et prospère. L'investissement dans la recherche et dans l'innovation technologique, dans la formation continue des ressources humaines, même si les résultats peuvent ne pas être immédiats, est certainement plus indispensable et en tout cas plus prometteur et sans lequel l'expansion à moyen et long termes n'aura pas lieu et les profits s'amenuiseront en conséquence.
Mais l'innovation est- elle seulement l'affaire des chefs d'entreprises ou de leurs collaborateurs ? La réponse est négative, elle concerne tous les acteurs de l'entreprise ; mais elle ne peut naître que là où le contexte socio-psychologique de créativité a atteint un niveau suffisant. Mais en raison du rôle catalyseur que joue le chef d'entreprise, celui-ci doit avoir la faculté de se soustraire des activités quotidiennes de routine pour se consacrer à la réflexion et aux activités tournées vers l'avenir. Dynamiser ses collaborateurs, ses employés et ses ouvriers est aussi une ligne de conduite d'un entrepreneur qui réussit. Les gens dans ce cas ne subissent pas le travail, ils l'assument et collaborent avec enthousiasme parce qu'on les a responsabilisés. A partir de ce moment là ils vont se passionner pour leur travail au lieu de le supporter. C'est cet esprit dynamisant qu'il incombe à la direction de l'impulser. En optant pour cette conduite, le chef d'entreprise reçoit en échange de meilleures informations à la fois quantitativement et qualitativement lui permettant de prendre les meilleures décisions.
L'idée que se font certains chefs d'entreprises se croyant disposer de tous les savoirs requis, prenant seuls les décisions sans se référer à leurs collaborateurs, mettant entre eux et leurs ouvriers une barrière d'incompréhension et de suspicion est révolue. Elle ne devrait pas être de mise, mais certains chefs d'entreprises persistent dans la voie contraire. Des traditions conservatrices latentes opposent leur force d'inertie à une évolution dynamique. Parmi celles-ci le phénomène bureaucratique tient une place particulièrement importante. Le danger de sclérose qu'il représente est de moins en moins acceptable. Les entreprises tournées vers la créativité résolvent quasi-automatiquement ce problème.
La responsabilisation du personnel suppose aussi qu'il soit au courant de la situation de l'entreprise face à ses concurrents, qu'il ait une perception de l'évolution de ses besoins, des contraintes du marché, de ses objectifs et des moyens à mettre en œuvre humains, techniques, financiers pour les réaliser. Autrement dit, le personnel doit comprendre que de l'avenir de son entreprise dépend son propre avenir, qu'il a une grande part de responsabilité dans le succès ou l'échec de l'entreprise. Cela dit, nous pensons que les moyens techniques et financiers sont importants à prendre en considération dans la bonne marche de l'entreprise mais les moyens humains qui sont plus difficiles à mobiliser sont certainement les plus importants. Une bonne gestion des ressources humaines est une condition nécessaire pour la réussite de l'entreprise. Nous ne nions pas la difficulté d'un redéploiement du personnel et sa mobilisation. Il y a en effet de mauvaises habitudes qui se sont créées, des inerties au sein de l'entreprise, des résistances à toute forme de changement, une indisposition naturelle à s'aventurer dans de nouvelles voies inconnues jusqu'alors. Mais tous ces problèmes qui sont réels peuvent être surmontés à condition de réaliser les impératifs suivants : Les objectifs généraux de l'entreprise doivent être clairement définis avec une décentralisation des pouvoirs de décision ; se donner les moyens pour réaliser ces objectifs ; la circulation de l'information doit être aussi complète et rapide que possible ; les résultats bons ou mauvais enregistrés par l'entreprise doivent être partagés et assumés par tous.
L'ouverture croissante des économies comme les stratégies de globalisation des entreprises ont promu la compétitivité au rang d'objectif majeur. Or, l'innovation est devenue plus qu'avant un facteur fondamental de compétitivité. Son rôle se manifeste dans tous les secteurs de l'économie et plus particulièrement dans les secteurs dits de pointe. De son côté la mondialisation met en contact de plus en plus étroits des entreprises d'origine différente, ce qui tend à favoriser à la fois les besoins et les possibilités d'innovation en termes de processus de production et d'organisation. Par l'innovation, les produits se modifient sans cesse ce qui explique le rôle et l'importance de l'innovation dans l'accroissement des échanges commerciaux entre nations et surtout entre nations développées.
Les avantages comparatifs entre nations s'articulent de plus en plus sur leur différentiel technologique. Mais l'avantage comparatif initial disparaît par diffusion des connaissances ; mais les nations ont des aptitudes différentes à assimiler les progrès techniques, ce qui ralentit le transfert technologique pour ceux qui n'y sont pas préparés.
Dans une optique dynamique de long terme, les meilleures positions ne sont jamais acquises définitivement. Ce qui est à la fois encourageant et stressant. Le droit d'entrée au concert des pays développés est, théoriquement, permis pour tous les pays à condition de mettre le prix. Ce prix ne peut être qu'une avance technologique elle-même dépendante d'un effort constant dans la recherche et l'acquisition du savoir-faire techno-organisationnel et l'amélioration des compétences humaines par le biais de l'éducation et la formation.
Si nous voulons l'ouverture et acceptons la compétition internationale, nous devons travailler d'une manière permanente à l'amélioration des produits pour satisfaire une demande de plus en plus exigeante. Autrement dit, il faut être aux aguets, attentifs à toutes les impulsions qui viennent de l'extérieur. Bref adopter une attitude agressive et éveillée à la fois sur le plan industriel en endogéneisant les progrès techniques et sur le plan commercial en cherchant à fidéliser nos clients traditionnels tout en prospectant de nouveaux marchés.
Dans ces conditions, l'ouverture des marchés n'est pas une panacée. Rien ne sert à s'ouvrir si on manque de compétitivité et de créativité. Cela dit l'ouverture est une bonne alternative en soi à condition d'y être préparé. Même si on n'est pas assez préparé pour plus d'ouverture, rien ne sert d'adopter une attitude frileuse et protectionniste, même en ces temps de crise économique mondiale, qui n'arrangeraient pas les choses mais les compliqueraient davantage. Le problème n'est donc pas dans le choix entre une stratégie d'ouverture et une attitude protectionniste mais la vraie question est de savoir comment s'ouvrir, à quel moment et de quelle manière.
Ainsi posée la problématique de l'ouverture associée à l'innovation, comment réagissent nos industriels à propos de ces deux phénomènes majeurs ?
Concernant l'ouverture, les chefs d'entreprises sont partagés. Il y a ceux qui sont favorables à l'ouverture et à la libéralisation accrue de l'économie. En général, ce sont des entreprises performantes et compétitives ou qu'elles essaient de l'être. Cela dépend de la personnalité du dirigeant et sa propension à exporter. Le niveau d'aversion au risque intervient aussi dans la détermination de cette attitude.
Quant à l'innovation, l'entrepreneur est d'autant plus innovateur qu'il est issu d'une grande école ou ayant fait des études supérieures poussées. Il multiplie les initiatives, admet la rentabilité différée, accepte toute forme de coopération productrice de savoir-faire nouveau, adopte une attitude ouverte.
Si certains chefs d'entreprises commencent à accorder de l'intérêt à l'innovation, la plupart continuent à pratiquer un système de gestion inadapté impliquant peu les travailleurs dans le succès de l'entreprise ce qui affaiblit leur sens de responsabilité et détruit leur capacité créative d'innovation. « Les pratiques d'un pouvoir centralisé, l'absence de participation des travailleurs ou de leurs représentants aux décisions relatives au travail, le découragement de l'innovation et de l'initiative, le peu de place accordé à la formation et au développement sont autant de handicaps à la réussite industrielle à une époque où les ressorts de la concurrence sont la synergie et la créativité » (R.ZGHAL-1993).
Mohamed ABDENNADHER - Géographe-économiste


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