Autrefois, les employés des études de notaires et d'avocats s'appelaient clercs et accomplissaient des tâches bien définies pour lesquelles ils étaient qualifiés, diplômes à l'appui. Ce genre de métier n'existe presque plus sous nos cieux et ce sont désormais de très jeunes secrétaires qui les ont remplacés. Ces filles (parce que les dames et les garçons sont rarissimes) sont recrutées sur la base d'une expérience antérieure acquise sur le tas dans diverses études, et ont au mieux le niveau du baccalauréat. Dans une seule étude, vous pouvez en rencontrer une ou plusieurs selon la notoriété de l'avocat chez qui elles travaillent et la quantité des dossiers instruits par ce dernier. Vous les voyez souvent à partir de 9 heures du matin dans les couloirs des tribunaux, une pile de chemises en carton à la main, passant d'un guichet à l'autre, d'une salle d'audience à l'autre, d'un service de photocopie à un bureau d'enregistrement, ne manquant jamais de téléphoner qui à son employeur, qui à une autre secrétaire ou à un auxiliaire de justice pour s'enquérir de l'évolution d'une affaire, de la date d'un procès ou des juges chargés des dossiers les concernant. Les plus rodées deviennent au bout d'un certain temps familières avec tout le personnel du tribunal et n'ont pas besoin d'arborer ni de montrer leurs badges à chaque fonctionnaire. Elles passent des heures entières dans les palais de justice (et pas forcément dans la ville où elles habitent) et accomplissent leur travail la plupart du temps debout et toujours dans la précipitation. Il leur arrive de rester jusqu'à l'après-midi et de se contenter d'un sandwich comme repas. Le travail qui les attend au bureau n'est pas forcément plus léger : classement et archivage des dossiers, rédaction de procès-verbaux, accueil, information et orientation des clients, contacts avec d'autres études, sorties pour diverses courses. Pour certaines, il faut aussi faire la femme de ménage à l'intérieur de l'étude et devant le local et rendre d'autres services qui n'entrent pas nécessairement dans la liste de leurs devoirs. Quand cela est nécessaire, elles font des heures supplémentaires et bénéficient du minimum de congés. Elles sont souvent sous contrat à durée limitée et touchent l'équivalent du SMIG. Pour être titularisées, elles mettent parfois des années et comme elles n'exercent que rarement chez le même employeur, elles désespèrent parfois de la stabilité professionnelle et renoncent à plusieurs droits, en particulier lorsqu'elles travaillent chez un avocat sans clientèle. Dans beaucoup de villes de l'intérieur, les jeunes avocats peinent en effet à honorer leurs engagements en ce qui concerne le loyer de l'étude et le salaire de leurs employées. Certes, les secrétaires des avocats ne connaissent pas toutes cette précarité mais la majorité d'entre elles vivotent. Leur métier est dur et ingrat, quant à leur statut, il reste encore très flou. Le temps est peut-être mal choisi pour demander à ce qu'on le révise et le clarifie, mais plusieurs familles n'ont que ces secrétaires comme soutiens.