Le Temps-Agences - La Cour suprême américaine a exclu hier des poursuites contre deux hauts responsables de l'Etat pour discrimination envers des musulmans arrêtés après le 11-Septembre, un dossier très sensible alors que les appels au procès des années Bush se multiplient. Par cinq voix contre quatre, la plus haute juridiction des Etats-Unis a renversé la décision d'une cour d'appel fédérale de New York. Cette cour d'appel avait établi que John Ashcroft, alors ministre de la Justice, et Robert Mueller, directeur du FBI ne disposaient pas de l'immunité dans les dérives de la politique antiterroriste de l'après 11-Septembre. Si elle avait au contraire confirmé la décision d'appel, la Cour suprême aurait ouvert la voie à un procès des années Bush. La Cour suprême s'inscrit là dans la même ligne que le président américain Barack Obama, qui s'est jusqu'ici montré réticent à entamer des poursuites judiciaires contre les responsables de l'administration précédente. Et ceci malgré l'insistance des organisations de défense des droits de l'homme et de plusieurs sénateurs démocrates. Au coeur de la décision hier, la Cour suprême a estimé insuffisants les arguments présentés par Javaid Iqbal, un Pakistanais arrêté en novembre 2001 à New York pour une infraction à l'immigration puis déclaré suspect de "haut intérêt". Il affirme avoir été, comme des centaines d'autres Arabes musulmans à cette époque, enfermé plusieurs mois, 23 heures sur 24 dans une cellule de confinement où la lumière était allumée en permanence, et avoir été sujet à des fouilles au corps à répétition et à des brimades. Il a ensuite été expulsé vers son pays d'origine sans qu'aucune charge n'ait été retenue contre lui. M. Iqbal souhaitait obtenir le droit de poursuivre ses geôliers et interrogateurs mais aussi les deux hauts responsables américains, soit 34 personnes, en justice. Pour lui, M. Ashcroft était en effet l'"architecte" d'une politique inconstitutionnelle d'arrestations et de détentions antiterroristes sur des critères raciaux et religieux. Et M. Mueller a "joué un rôle" dans la mise en application de cette politique. Mais pour la Cour suprême, "le plaignant ne fournit pas d'indications factuelles suffisantes pour qu'un état d'esprit discriminatoire chez la partie adverse apparaisse de manière plausible", ajoute-t-elle. Elle rappelle que, dans les mois qui ont suivis le 11-Septembre, "le FBI a interrogé plus de 1.000 personnes soupçonnées d'être liés aux attentats". Parmi elles, 762 ont été détenues pour des infractions à l'immigration dont 184 ont été déclarés de "haut intérêt".