L'encouragement de l'exploitation collective des propriétés agricoles par les ayants droit, au lieu de leur partage en cas de succession, en Tunisie, a été préconisé, hier, par les professionnels et experts du secteur, comme solution idoine pour améliorer le rendement des exploitations agricoles et les protéger contre les périls de l'éparpillement et de l'abandon. Lors d'une conférence nationale organisée, hier, au siège de l'Union tunisienne de l'agriculture et de la pêche (UTAP), à Tunis, sur le Code des droits réels, et les dispositions relatives aux crédits agricoles et la lutte contre l'abandon et la mauvaise exploitation des terres et propriétés agricoles, M. Abdessalem Mansour, ministre de l'Agriculture et des Ressources hydrauliques, a mis en garde contre le rétrécissement croissant de la superficie moyenne de l'exploitation agricole en Tunisie et ses incidences négatives sur le rendement et la productivité des terres agricoles et de l'activité agricole en général.
Alternatives rentables D'après le ministre, la superficie moyenne de l'exploitation agricole en Tunisie se réduit et se rétrécit au fil des ans, et à moins de mesure appropriée, elle risque de chuter à 6 hectares, en 2015, contre 10 hectares en 2004, et une moyenne de 12 hectares dans les années 1990. Par contre, le nombre des exploitations agricoles a augmenté, atteignant 517 mille en 2004, contre 471 mille dans les années 1960, et ce, en raison de l'éparpillement et de la division des exploitations agricoles, suite au partage des exploitations héritées par les ayants droit. L'augmentation des exploitations agricoles n'a pas été, ainsi, le résultat de la mise en valeur et de gain de terres agricoles supplémentaires. Or, des petites exploitations agricoles empêchent l'usage des machines agricoles et des techniques culturales modernes, et n'offrent pas à leurs exploitants individuels le moyen de maîtriser les coûts et d'en tirer des revenus et des bénéfices conséquents. Elles ne permettent pas un rendement à la mesure des attentes et incitent à l'abandon. D'autant que la moyenne d'âge des agriculteurs en Tunisie atteint 55 ans. Dans ce contexte, un conseil ministériel tenu le 20 mai dernier a recommandé d'organiser cette Conférence nationale pour faire connaître aux agriculteurs, et à leurs représentants ainsi qu'à tous les professionnels et intervenants dans le secteur agricole les alternatives rentables à cette situation. Sur ce plan, l'exploitation collective des propriétés agricoles héritées par les ayants droit, en tant qu'entités indivises, sous forme de sociétés de production agricole, s'avère une solution idoine, car elle respecte le droit de propriété et préserve les exploitations agricoles contre l'éparpillement et les divisions quasi-infinies. Le Code des droits réels, entre autres mécanismes, comporte des dispositions qui encouragent cette orientation. Dans une communication faite à ce sujet, le vice-président du tribunal foncier a indiqué que la propriété privée ne peut pas s'opposer à l'intérêt public et privé, de sorte que la propriété privée assume une fonction sociale. Le Code des droits réels stipule que le propriétaire doit prendre en considération dans l'usage de son droit les dispositions législatives relatives à l'intérêt public et privé. Dans le cas d'une propriété collective, les ayants droit peuvent convenir par écrit de ne pas procéder à son partage, pour une certaine période. Cependant, comme l'a dit le ministre de l'Agriculture et des Ressources hydrauliques, la mise en application de cette panoplie de dispositions remontant à plus de 40 ans, est restée limitée. L'éparpillement et les partages semblent être dues à l'ignorance de ces dispositions, encore que la mentalité conservatrice régnant dans les zones rurales et agricoles continue de privilégier le partage des héritages. L'ordre du jour a comporté aussi l'examen de l'amélioration des conditions d'octroi des crédits agricoles. Le président de l'UTAP, Mr Mabrouk Bahri, a encore plaidé pour une simplification des procédures dans ce domaine. La réforme agraire dans les périmètres publics irrigués a été aussi parmi les points examinés par les participants à la Conférence.