Le Temps-Agences - Au cœur du projet immobilier de la discorde entre Israël et les Etats-Unis, le riche Américain Irving Moskowitz consacre depuis 20 ans une partie de sa fortune à l'achat de terrains dans des secteurs politiquement explosifs d'Al Qods. Ce magnat du bingo est l'une des figures-clé, bien qu'obscure, des efforts pour asseoir l'emprise de l'Etat hébreu sur la ville Sainte tout entière. Il y a plusieurs mois, le Dr Moskowitz a obtenu un permis de construire de la mairie d'Al Qods pour 20 appartements destinés à des familles juives sur le site du Shepherd Hotel, désaffecté, qu'il avait acquis en 1985. Le projet de construction à Al Qods-Est, que les Palestiniens revendiquent comme capitale de leur futur Etat indépendant, a soulevé la colère de l'administration Obama, qui presse depuis des mois le gouvernement israélien de geler totalement les constructions dans les implantations juives pour favoriser la reprise du processus de paix israélo-palestinien. L'ambassadeur d'Israël à Washington a été convoqué par le ministère des Affaires étrangères, qui a demandé la suspension du projet, ont confirmé des responsables israéliens. La France a également convoqué l'ambassadeur d'Israël à Paris. Dimanche, Benyamin Nétanyahou a balayé les critiques américaines. "Nous ne pouvons tolérer que des Juifs ne soient pas autorisés à vivre et acheter n'importe où à Jérusalem", a affirmé le Premier ministre, proclamant la souveraineté "incontestable" d'Israël sur la ville tout entière. Ancien médecin, Irving Moskowitz a gagné de l'argent en vendant des cliniques et multiplié sa fortune avec des cercles de jeux de bingo et de casino dans la région de Los Angeles. En Israël, il est le généreux donateur des colons déterminés à imposer la domination de l'Etat hébreu sur les parties disputées de la ville Sainte. Le millionnaire américain a ainsi acquis depuis deux décennies des terrains qui ont rendu son nom célèbre en Israël et fait de lui la bête noire des Palestiniens. "Depuis plus de 20 ans maintenant, il finance et soutient l'activité des colons", essentiellement dans l'est de Jérusalem, explique Danny Seidemann, un avocat d'Ir Amim, organisation israélienne qui soutient la coexistence en Al Qods. Pour lui, on assiste aujourd'hui au "retour de Nétanyahou et Moskowitz pour un nouveau spectacle". En 1996 déjà, lors du premier passage de M. Nétanyahou à la tête du gouvernement, Irving Moskowitz avait participé à la restauration d'un ancien tunnel de la Vieille ville d'Al Qods, qui avait déclenché des émeutes palestiniennes dans lesquelles 80 personnes avaient été tuées. Les récentes tentatives pour contacter Irving Moskowitz ou ses représentants par l'intermédiaire de sa fondation ont été vaines et son avocat à Al Qods s'est refusé à tout commentaire. On lui prête par le passé des propos très critiques sur les pourparlers de paix israélo-palestiniens, qu'il considérerait comme "une pente vers des concessions, la reddition et le suicide israélien". Le Dr Moskowitz est aussi impliqué à des degrés divers dans des projets de construction de centaines de logements dans d'autres quartiers autour d'Al Qods-Est. Des projets tous autorisés par la législation israélienne, mais également extrêmement controversés, car situés au cœur de quartiers palestiniens entourant l'un des sites les plus sensibles de la vieille ville, le Mont du Temple pour les juifs et l'Esplanade des mosquées pour les musulmans, l'un des principaux lieux saints de l'Islam. Environ 180.000 Israéliens vivent à Al Qods-Est, dont Israël s'est emparé lors de la guerre des Six jours en 1967. L'annexion de la partie arabe de la ville, divisée entre la Jordanie et Israël de 1948 à 1967, a beau ne pas être reconnue par la communauté internationale, Israël n'en juge pas moins que les constructions dans cette zone ne peuvent être considérées comme des colonies comme en Cisjordanie.