Le Temps-Agences- La Chine, par la voix de son chef de la diplomatie en visite à Paris, a fait front hier en rejetant la volonté française et américaine d'imposer de nouvelles sanctions à l'Iran, accusé de vouloir développer une arme nucléaire sous couvert d'un programme civil. Au sein du groupe des six puissances chargées de ce contentieux - Etats-Unis, Chine, Russie, France, Grande-Bretagne et Allemagne -, Pékin est isolé et sous pression pour reconnaître que l'Iran viole des résolutions de l'ONU en continuant d'enrichir de l'uranium. "Parler de sanctions en ce moment compliquera la situation" et les Iraniens n'ont pas "complètement fermé la porte", a affirmé hier le ministre chinois des Affaires étrangères, Yang Jiechi, devant l'Institut français des relations internationales (Ifri), un institut de recherche indépendant. Cette déclaration survient deux jours après l'affirmation du président iranien Mahmoud Ahmadinejad que son pays n'avait "pas de problème" pour un échange d'uranium avec les grandes puissances et au lendemain de déclarations françaises et américaines en faveur de prochaines sanctions renforcées. Elle intervient aussi quelques heures avant un entretien de Yang Jiechi avec le président français Nicolas Sarkozy. La veille, le chef de la diplomatie française n'avait pas réussi à infléchir la position de Pékin, dont les intérêts commerciaux et énergétiques sont très importants en Iran. "Les choses continuent de bouger et nous pensons qu'il est très important de se concentrer sur le processus diplomatique, à travers le dialogue et la consultation", a martelé Yang Jiechi. En fin de semaine, il devrait réitérer ce leitmotiv à la Conférence sur la sécurité de Munich (Allemagne) qui accueillera pour la première fois un ministre chinois des Affaires étrangères. Pour la Chine, la non-réponse de l'Iran à l'offre de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) de lui fournir du combustible nucléaire pour un réacteur de recherche à partir d'uranium enrichi par les Iraniens n'est pas sans appel et le "dialogue" doit rester une priorité. Pour les Etats-Unis, la France, l'Allemagne ou la Grande-Bretagne, les rodomontades de l'Iran ne visent qu'à lui faire gagner du temps. Imaginée à l'automne pour faire diminuer la tension, sans régler le problème de fond des centrifugeuses iraniennes qui continuent de tourner, l'offre de l'AIEA reste officiellement sur la table. Mercredi soir, le Premier ministre français François Fillon a estimé que "le moment est venu d'agir" et annoncé que Paris allait demander à l'ONU une nouvelle résolution avec "des sanctions fortes" contre l'Iran. Le secrétaire américain à la Défense Robert Gates a aussi menacé Téhéran de "fortes sanctions". Reste à savoir si la Chine, qui a un droit de veto au Conseil de sécurité, ira jusqu'à l'utiliser. Des diplomates occidentaux relèvent que Pékin a voté les trois dernières résolutions incluant des sanctions à l'égard de l'Iran. Et ils n'imaginaient pas ces dernières semaines encore que la Chine, même avec une puissance de plus en plus affirmée sur la scène internationale, s'oppose seule, lors d'un vote, aux quatre autres membres permanents du Conseil de sécurité de l'ONU. Dans le cas contraire, les Etats-Unis n'auront d'autre recours que d'adopter des sanctions nationales renforcées et la France a déjà fait part de son intention de plaider dans le même sens au sein de l'Union européenne.