Les forums tuniso-français sur l'emploi offrent l'occasion d'évaluer objectivement et - comment dire ! - scientifiquement les opportunités offertes, les secteurs-cible et la logistique conçue pour. Il est tout à fait logique que la Tunisie et la France travaillent de concert sur l'emploi, plaie béante des deux côtés de la Méditerranée. Mais nous relevons tout de même que c'est bien la France qui s'arroge l'exclusivité du rôle normatif dans ce flux à travers lequel le pays émetteur, la Tunisie, attend un assouplissement des procédures et, en même temps, l'enrichissement et non pas la fuite de sa matière grise. Dans notre article en page 3, on remarque bien que les secteurs sollicités par la France sont pointus et que ce sont des domaines où la France accuse un certain déficit de cadres et de compétences. Maintenant on affirme qu'il y a bien neuf mille postes mis à la disposition annuellement - et sur trois ans - des Tunisiens. Cela aiderait à décongestionner la demande locale et nous enlèverait carrément une épine du pied. On ne s'explique pas, néanmoins, que l'affluence escomptée ne se vérifie pas et que, jusque-là, seuls 2500 " cerveaux " tunisiens ont franchi le pas, alors que le gouvernement tunisien encourage ce " partenariat " tout en gardant un droit de regard et, même, au besoin, un droit de réserve sur le processus. Or, que nos jeunes ne manifestent plus l'engouement migratoire effréné et obsessionnel des générations passées, cela prouve que la perception du travail en France n'est plus aussi " déculturée ". Peut-être ne sont-ils plus, par ailleurs, portés sur cet aventurisme, ayant toujours fini par mal tourner. Peut-être aussi, refusent-ils d'être les cobayes d'une nouvelle politique française de l'immigration choisie, ciblée et sélectionnée au prétexte, disent-ils, pour mâter l'immigration clandestine. La Tunisie a bien besoin d'employer 70 mille jeunes par an - dont la plupart porteurs de diplômes supérieurs. Elle cultive toujours la mythique capacité de nos concitoyens à s'expatrier. Mais elle ne peut plus se permettre des fuites de cerveaux. La France en souffre elle-même, puisque ses chercheurs et ses scientifiques vont aux Etats-Unis... Cette immigration sélective est finalement un nouveau phénomène mondial. Et alors, faisons attention : la scolarité d'un Tunisien revient à près de 100 mille dinars à la communauté nationale. Et la communauté nationale est en droit d'attendre un retour sur investissement.