Le Temps-Agences- Après une semaine de chaos causé par l'éruption du volcan islandais Eyjafjöll le trafic aérien était quasi normal hier, mais la polémique enflait sur le coût de cette paralysie pour les compagnies aériennes et les passagers, dont des dizaines de milliers étaient encore coincés. "Le trafic aérien a été assuré normalement en Europe avec entre 28.000 et 29.000 vols", a indiqué hier dans la matinée l'Organisation européenne de la navigation aérienne, Eurocontrol. "Un petit nombre d'annulations est attendu, en raison de quelques restrictions de vol limitées (en Suède et Norvège, NDLR) et de problèmes logistiques rencontrés par les compagnies reprenant leurs activités". Ailleurs en Europe, l'activité était "de retour à la normale" à l'aéroport parisien Roissy-Charles de Gaulle, mais Heathrow, principale plate-forme mondiale en nombre de passagers, avait encore besoin de "quelque temps" pour fonctionner à 100%. Et alors que des dizaines de milliers de voyageurs étaient toujours bloqués loin de leurs destinations, la capacité, les vols disponibles ne permettant pas de régler immédiatement la situation, la polémique enflait sur les indemnisations, ou leur absence, et les responsabilités pour la paralysie. La compagnie "low-cost" irlandaise Ryanair a ainsi annoncé mercredi qu'elle ne rembourserait les dépenses de ses passagers, hébergement ou nourriture, qu'à hauteur du billet d'avion acheté pour leur voyage. Le patron de Ryanair Michael O'Leary, s'est dit prêt à aller en justice, alors même qu'une réglementation européenne prévoit, en théorie, une prise en charge du séjour supplémentaire auxquels sont contraints les passagers en attendant de pouvoir partir. O'Leary a mis en cause l'attitude des autorités publiques, qui ont décidé d'interdire les avions de vol. "Pourquoi exactement est-ce qu'on attend des compagnies aériennes qu'elles remboursent les hôtels, les repas et tout le reste quand ce sont le gouvernements qui en sont la cause?" Plus policée, l'Association des représentants des compagnies aériennes (BAR) au Royaume-Uni a jugé "injuste" d'appliquer une loi "censée s'appliquer aux retards et aux annulations individuels des compagnies, mais pas à la fermeture générale du système aérien imposée par des gouvernements sans limitation dans le temps". Même son de cloche côté compagnie aériennes, dont l'Association internationale du transport aérien (IATA) estime les pertes déjà subies à 1,7 milliard de dollars et a critiqué la "pagaille" causée par la réaction européenne. Giovanni Bisignani, patron de l'IATA avait ainsi appelé hier les gouvernements européens à "prendre leurs responsabilités" et à venir en aide aux compagnies, victimes d'une "force majeure, à laquelle nous ne pouvons rien". Les gouvernements européens, eux, avaient argué au plus fort de la crise que le principe de précaution, les cendres volcaniques peuvent en certains cas se vitrifier dans les réacteurs d'avion, les mettant hors d'usage. D'autant qu'aucune norme internationale sur le niveau dangereux de concentration de cendres n'existe, selon l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI). Ce que souligne également Henry Gaudru, vulcanologue français et conseiller technique des Nations unies, pour qui les scientifiques ne peuvent fournir "des données fiables concernant la concentration exacte de cendres dans l'atmosphère et à partir de quand un avion peut voler ou ne pas voler à l'intérieur". Les conséquences économiques seront en tout cas lourdes, même hors secteur aérien et tourisme. Des usines jusqu'en Asie ont dû suspendre leur production faute de pièces, des produits périssables ont été perdus et, selon Royal Bank of Scotland, l'absence de millions de salariés coincés a causé une perte de productivité de 500 millions d'euros par jour pour la seule Europe. Le ministre allemand de l'Economie, Rainer Brüderle, a même jugé que la paralysie des cieux européens allait "mettre un bémol" à la vigueur de la reprise dans le pays.