Tunisie: 70% du gaz naturel provient d'Algérie    Hausse de 18% des investissements étrangers au premier trimestre 2024    Programme des huitièmes de finale de la Coupe de Tunisie    376 morts sur les routes et 2204 blessés en à peine 4 mois    Féminicides: 25 femmes tuées en 2023    La Mechouia et Omek Houria dans le TOP 10 des meilleures salades au Monde    City Cars Kia renouvelle son partenariat avec le Tennis Club De Tunis et présente la 18ème édition du « Kia Tunis Open »    Des difficultés en cascade pour les producteurs de fraises [Vidéo]    Leila Hadded sur la migration : jusqu'à quand va durer cette hémorragie !    Vague de soutien à Sherifa Riahi    « La Tunisie de jadis et de naguère » nouvel ouvrage de Mohamed El Aziz Ben Achour, retrace l'histoire riche et complexe de la Tunisie    Le Commandant Ahlem Douzi reçoit le prix "Trailblazer" de l'ONU (vidéo)    Tunisie – Leishmaniose cutanée : entre 4 000 et 5 000 cas par an    Un séminaire sur la Philosophie et monde arabe : quelles perspectives face aux crises et à la révolution technologique ?    Sfax: Limogeage du secrétaire général de cette municipalité    Révolution dans l'obtention du visa Schengen : Vers une procédure entièrement numérisée    Fermeture temporaire de l'église Saint-Louis à Carthage    Ambassade de France en Tunisie: Hommage aux tirailleurs Tunisiens    Huile d'olive / campagne 2023-2024: Hausse de 91% des recettes d'exportation à fin avril    UNRWA: Envrion 80 mille Palestiniens déplacés de force de Rafah en 3 jours    Sénégal: 11 blessés dont 04 graves dans la sortie de piste d'un avion    La Nasa finance le projet d'un système ferroviaire sur la lune !    2ème édition du manifestation « un monument... et des enfants... » au Palais Abdellia    La famille médiatique en deuil : Le journaliste Ali Jridi n'est plus    Union européenne –Tunisie : Aux jeunes qui donnent le cap !    Tournoi de Rome : Ons Jabeur connaît son adversaire    Nacir Triki, nouveau DG d'Amen Invest    La répression contre les universités françaises s'intensifie : à quand la fin du scandale ?    Exposition personnelle de Rym Hajjem à la Galerie Saladin : Des œuvres picturales pleines de vie et de fraîcheur    Ce vendredi, au Rio, Projection et débat : «Bye Bye Tibériade» et la Nakba en toile de fond    Hommage à un héros méconnu, le Dr Fadhel Samir Ftériche, "le chirurgien des pauvres"    Rallye Tanit : Plus de cent motards au rendez-vous!    Baisse vertigineuse des bénéfices de Sotipapier en 2023    Qui peut le plus, peut le moins… : A table avec le Stade Tunisien    Chokri Hamda : nous devrions recevoir la réponse de l'Agence antidopage dans un délai de quinze jours    EXPATRIES : L'EST veut récupérer Montassar Talbi    Grève de deux jours des cheminots    La Tunisie réaffirme son soutien inconditionnel au peuple palestinien frère    Sourires, chantages et quelques marchandages    Kasserine : grève présentielle des avocats le vendredi 10 mai    Chaima Issa condamnée à un an de prison    Météo : Temps partiellement nuageux avec des pluies éparses    Tunisie : appel à la solidarité mondiale contre les crimes sionistes    Blessé, le nageur tunisien Ahmed Ayoub Hafnaoui est forfait pour les JO 2024    La troupe "Mâlouf Tunisien Paris" en concert le 11 mai à Paris    Jabir Ibn Hayyan: Le «père de la chimie expérimentale»    Retour sur «Danse pour tous» au Théâtre de l'Opéra de Tunis à l'occasion de la Journée internationale de la Danse : 10 heures de danse non-stop    Une épine au pied    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Tout commence avec la mort
«Des petits coins de paradis» de Jacques Weber
Publié dans Le Temps le 05 - 05 - 2010

Cet homme n'a pas de vrai combat avec les mots. Pour lui, ils ne sont ni leitmotiv ni finalité. Ils servent tout simplement à cacher (et à relever par la même action) ce qui doit être dit. C'est-à-dire ce qui vient d'être rêvé.
Cet homme n'est pas un écrivain qui s'échine à construire la phrase pionnière, à placer le mot qu'il faut exactement là où il faut. Non, par pudeur ou par facilité, ce comédien laisse le mot voler de lui-même ou venir à lui “évident, nu et beau, sans encore d'intonation. Il est, à lui seul, mémoire d'un instant, d'un visage, d'une odeur. Il est lui aussi un lambeau, un fragment, un bout qui commence par “Je me souviens” et finit par “Je ne sais plus”.
Je ne sais plus pourquoi cette histoire a commencé par un enterrement au Père-Lachaise. Après tout, ce n'est nullement un polar. Est-ce parce qu'on sait qu'au fond de nous mêmes, toute vie qui commence met en branle la machine à tuer… à tuer le temps, les gestes effacés, les mots trahis, la douleur carnivore et tendre d'avoir aimé, d'avoir rêvé, d'avoir cru qu'on était quelque part éternel ?
Peut-être que toute mort comporte quelque part, une nouvelle façon d'être. Une vie jusque-là inconnue parce qu'une autre existence l'aurait empêchée de voir le jour. Le départ vers le “Grand Ailleurs” de l'un donnerait-il le droit d'accéder à la lumière à “L'autre”.
Si Serge n'était pas mort, Weber aurait-il écrit ce livre ? Pourtant Serge n'est pas un héros. C'est juste quelqu'un qui campe un rôle - certes important – dans “cette farce à mener par tous qu'est la vie”.
Le véritable héros de cette histoire est une héroïne. Non, ce n'est ni Michèle, ni Emmanuelle ni Simone mais l'époque. Une époque fabuleuse parce que la magie du théâtre héritée des grands classiques et glissant délicieusement dans les bains mousseux de la modernité était encore là.
Derrière l'Ecrit, Jacques Weber continue à jouer. Discrètement, pudiquement, intensément il tente de disparaître derrière ce rôle qu'un metteur en scène impalpable lui aurait légué et qui ne serait rien d'autre que sa propre vie. Par la mort de Serge, Jacques ne lui donne-t-il pas une nouvelle existence tout en s'essayant à nous faire oublier la sienne.
Derrière ce sourire humain, (trop humain), ne chercherait-il pas encore à nous manipuler, à nous mener en bateau, à nous faire oublier ce monde de platitude où nous végétons pour nous pousser dans la plus insidieuse des fantasmagories.
Weber est un tricheur. Il nous dénude de ce que nous sommes pour faire de nous ce qu'il est. Comme si ce grand Serge qu'on enterre n'était pas son ami mais le nôtre, que Michelle était la première femme que chacun d'entre nous aurait aimée ou que c'est grâce à Brasseur que nous avions eu notre premier rôle au théâtre.
Chacun d'entre nous aurait-il quelque part un Serge (j'en ai connu un, moi aussi, qui me parlait de Brasseurs, rue de Sévigné) à enterrer pour se réveiller à la vie qui vient de passer et découvrir que la vraie vie ce n'est pas cet instant mais celle qui est ailleurs. Ailleurs, dans ce rêve idiot de vouloir changer le monde, de vivre la plus belle histoire d'amour, d'exercer le plus prestigieux des métiers, d'avoir les meilleurs amis et d'être – enfin – un héros né pour vaincre, né pour échapper à tous les pièges de la mort et demeurer pour l'éternité auréolé de trente-six mille feux de gloire.
Weber est un grand. Tout ce qu'il a approché ou touché le fut, de même, parce que cette époque qui les a tous pris à bras – le – corps était une mer immaculée, infinie.
Ce livre n'a pas été écrit pour un lecteur connu ou inconnu. Non, c'est encore une ruse de comédien pour échapper (et nous faire échapper) de cette prison où l'on nous tient assagis en attendant que la mort vienne.
Cet écrivain n'écrit pas. Il joue... et il est merveilleux sur scène.
* Edition le cherche midi, 2009, 205 pages.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.