Mohamed Ben Slama continue de nous surprendre avec ses personnages singuliers, mystérieux et inquiétants. Ses peintures « humaines », nous font poser de multiples questions. S'il s'agit de contre - temps, il y a fort à parier qu'il n'y a pas de contre façon. A travers son âme d'enfant, Mohamed Ben Slama n'est pas sans humour, les titres de ses œuvres en sont un véritable témoignage : « Doigt dans le nez », « Tête à l'envers », « Géant », « Harissa », « Tirer la langue », « Nationalisme abstrait » ou « Grosse tête », etc. Et sans en avoir l'air, ses peintures correspondent à une réelle critique de la société. Sans faire de discours prolixe, Mohamed Ben Slama s'exprime à travers sa peinture. Il préfère susciter des réactions, des émotions avec l'appui des titres de ses œuvres, c'est la manière dont la peinture se raccorde à la parole. Plus il peint, plus il raconte de choses, et plus il parle à travers sa peinture. Il n'est alors pas vraiment nécessaire d'attendre de l'artiste qu'il nous explique le sens de son travail ou qu'il réponde directement à la question de savoir ce que ça représente. Il se mesure à la matière pour saisir la vie, transforme la couleur en émotion et confusion. Ce qui l'intéresse au fond, c'est l'homme, alors il le peint, plus bizarre et effrayant encore, avec un visage défiguré, à la peau souvent trop rose. Parfois un doigt trop long, certainement, s'avise à traverser un nez pour aller transpercer l'œil d'un voisin, une manière de se mettre le doigt dans l'œil ? Les yeux globuleux qu'on a du mal à fixer, semblent lutter pour stabiliser son regard. Parfois ses personnages se retrouvent affublés d'un corps animal comme caricaturés. Les figures de Mohamed Ben Slama sont inhumaines, mais sa peinture l'est-elle ? Il représente l'humanité, alors que d'autres veulent représenter une patrie. De toute manière, à Tunis, New York ou à Paris, la solitude humaine est la même. La différence est dans la tête de chacun. Si ses personnages vivent à travers ses toiles, elles sont peut-être des créatures sans oxygène, mais n'en sont pas moins fortes. Mais qui sont toutes ces personnes ? Elles sont certainement tout son entourage, famille, frères, sœurs, tantes, oncles et cousins. Dans sa déférence à autrui, dans sa fantaisie, Mohamed Ben Slama laisse place à notre imaginaire. Le contour cerné localise l'espace du jeu, libérant introspection et réflexion. Le fantasme se marque de l'intérieur du décor, prend pose, se teint des valeurs et des tons tout en s'imprégnant de l'ambiance. On apprécie sa liberté, celle qui ne subit aucune influence. Une peinture singulière et étonnante à voir ... jusqu'au 17 mai.