Hamma Hamma, l'enfant de la rue du feuilleton Casting – qui vient par ailleurs de prendre fin – constitue l'un des problèmes sociaux soulevés par le réalisateur. Et bien que son rôle ait été plus petit que d'autres, le message est arrivé aux téléspectateurs. Ces derniers ont aimé le personnage, il a fait rire beaucoup d'entre eux, mais a également fait vivre leurs émotions. Cet enfant n'a pas été formé pour jouer la comédie. Il passe bel et bien tout son temps dans la station de Barcelone. Il renifle la colle, fume cigarettes et chicha et boit même de l'alcool. Hamma Hamma ne va pas à l'école, ne fréquente pas les institutions de l'enfance tel les clubs et la bibliothèque et se comporte déjà comme un bout d'homme, sous la peau d'un enfant. Plus qu'un simple jeune homme, c'est un débrouillard qui sait se défendre. Du haut de ses dix ans et de sa petite taille, ses répliques, son ton ferme, l'intonation de sa voix ont laissé plus d'un ébahi. Seulement, quelle réaction susciterait un Hamma Hamma rencontré dans la rue, en marge de la vie réelle ? Au mieux, de la pitié, sinon de l'indifférence, sans compter l'exaspération que ressente une personne contre un enfant qui insiste à mendier et on passe les insultes et le dégoût quand sa petite main sale s'agrippe à nos vêtements. Pourquoi notre société a-t-elle eu besoin d'un casting pour remarquer et « aimer » ce petit garçon qu'elle ne voit même pas au quotidien. Et pourtant des Hamma Hamma, il en existe. Ses réponses et ses réactions qui ont fait rire les téléspectateurs devraient pourtant attirer leur attention sur le fait qu'un enfant qui se comporte ainsi est un enfant qui a perdu son innocence. « Il a dû faire toutes les guerres, pour être aussi fort aujourd'hui » dirait la chanson française si les paroles étaient adressées pour Hamma Hamma et ses semblables. Sauf qu'il n'y a pas plus dur que la guerre de la rue et que derrière son apparence d'enfant indifférent et sûr de lui, Hamma Hamma reste un enfant fragile et vulnérable. Il a fallu l'objectif cru et franc de Casting pour ouvrir les yeux des Tunisiens sur un phénomène qui prend forme et grandit tous les jours sous leurs yeux. Et loin des histoires, de gloire et de beauté qui peuplent en général les feuilletons tunisiens, cette problématique soulevée, d'une manière fine qui ne dérange point la sensibilité d'un Tunisien qui aime veiller le Ramadan dans la bonne humeur, constitue une réussite pour Casting. Maintenant que la question est soulevée au grand jour, il nous reste à espérer que l'attendrissement de nos concitoyens dépassent l'affection qu'ils ont porté au personnage fictif de Hamma pour la tourner vers ces centaines de Hamma réels et leur tendre la main, chacun comme il le peut dans une nation où la solidarité, la famille et les droits de l'enfant constituent des normes basiques et fondamentales.