Malgré la volonté affichée par l'UGTT d'établir un certain équilibre quant à la représentation syndicale de la femme en introduisant un quota de femmes militantes au sein des hautes instances de la Centrale ouvrière, il est dommage qu'aucune femme ne figure sur la liste des membres du nouveau Bureau Exécutif élus lors du 21ème congrès tenu récemment à Monastir. Encore une fois, la mentalité masculine a prévalu au cours des élections : les femmes candidates n'ont pas obtenu le nombre de voix requis. On aurait voulu avoir une ou deux femmes au sein du nouveau bureau. L'investissement de la femme dans le militantisme, qu'il soit syndical ou associatif, est un phénomène qui ne cesse de s'imposer chez nous chaque jour davantage. Pourtant, le fait qu'une femme ait un poste de responsabilité et de pouvoir qui lui permette de concevoir les choses autrement, d'agir et de décider différemment, met certains hommes dans l'embarras. Car, la femme, arrivée à ce stade de pouvoir, ne pourrait être que surestimée et considérée comme étant une femme « extraordinaire » ; ce qui n'est pas malheureusement accepté par une certaine mentalité dite « anti-féministe » qui veut encore imposer son modèle. Cette attitude n'est pas propre à la Tunisie : il existe encore en Europe des associations syndicales où les femmes ne sont pas représentées ; dans les pays arabes aussi, la représentation féminine aux syndicats est presque inexistante. En ce qui nous concerne, aujourd'hui, en Tunisie, le nombre de femmes salariées a fait que leur proportion dans les syndicats s'accroît et, par conséquent cela doit se traduire dans la réalité non seulement en tenant compte de leurs revendications mais aussi en les chargeant d'une responsabilité syndicale plus large. Il est vrai que l'octroi d'un poste éminent au sein de la Centrale ouvrière peut susciter des sensibilités pouvant déboucher sur des divergences parmi les syndicalistes. C'est qu'il y a toujours une tendance de la part de certains hommes à séparer entre la lutte menée par la femme pour améliorer son statut familial, économique et social d'un côté, et, d'un autre côté, son désir (d'ailleurs légitime) à aspirer à un poste de pouvoir et de décision dans le domaine syndical. La participation de la femme tunisienne au syndicalisme n'est pas à démontrer, elle remonte au siècle dernier depuis le mouvement national jusqu'à nos jours. Elles peuvent contribuer en militant dans les différentes instances de l'UGTT, soit au niveau des syndicats locaux, régionaux ou à l'échelle nationale, à renforcer les acquis de la population féminine active qui devient de plus en plus importante en participant massivement aux réunions et aux assemblées générales et aux diverses activités syndicales en échangeant leurs expériences de terrain. La femme tunisienne a occupé la fonction de ministre et de chef d'entreprise et d'autres fonctions non moins importantes, on imagine mal pourquoi certains persistent à penser que les responsabilités syndicales sont l'apanage des hommes. D'ailleurs, les deux mouvements, syndicaliste et féministe, ont toujours mené leur combat en commun tant qu'ils portent les mêmes principes : lutter contre toute forme d'exploitation de l'homme et œuvrer pour sa liberté et son bien-être. La femme tunisienne a atteint aujourd'hui un niveau professionnel et intellectuel tel qu'il est tout à fait légitime qu'elle revendique des postes dans les lieux de pouvoir, le Bureau Exécutif de l'UGTT en l'occurrence. L'avenir du syndicalisme, compte tenu de la conjoncture socio-économique nationale et internationale, est avec la femme militante et pas sans elle. Le temps est venu pour l'avilissement de tous les obstacles afin de permettre aux femmes syndicalistes d'accéder aux postes du pouvoir et des décisions, la main dans la main avec les hommes, et mettre fin à toutes sortes de descriminations au sein de cette honorable institution qui fait la fierté de tous les Tunisiens.