Raouf KHALSI -Les quarante six pays réunis au Sommet « Europe – Asie » - ou plutôt : Asie - Europe » représentent tout de même les 58% de la population mondiale et les 60% du commerce mondial. Créé en 1996 sous la forme d'un forum de dialogue, voilà que ce sommet a aujourd'hui l'ambition de représenter une force de frappe économique – et exclusivement économique – dès lors qu'il n'existe pas d'enjeux géostratégiques réels. Les pays participants grincent des dents. Néanmoins, Européens et Asiatiques sont obligés de reconnaître et d'introniser de facto, l'ogre chinois, première puissance économique mondiale. Et de surcroît, les appels désespérés de Strauss-Kahn, président d'un Fonds Monétaire Mondial, titubant face à la frénésie de dumping chinois, ne sont pas pour calmer les esprits européens. Pour autant les trois priorités annoncées par le président de l'Union Européenne : meilleure gouvernance économique et financière ; développement durable et coopération dans le domaine de la sécurité, ces trois priorités, justement, ne représentent pas des enjeux vitaux pour la Chine. Celui qui avait prophétisé que le monde tremblerait quand la Chine s'éveillerait (Alain Peyrefitte) avait échafaudé, ou du moins, tracé un tout autre processus. Le fait que la Chine soit devenue le mastodonte mondial après la fin des blocs et l'éclatement de l'Union Soviétique, enlève précisément le côté « scientifique » à l'affirmation de Peyrefitte. Mieux : personne n'aurait prévu que le principal allié de la Chine dans un nouveau partage du monde serait en fait les Etats-Unis, demeurés trop longtemps seul gendarme de la planète. Entre temps du coin de l'œil, l'administration américaine regarde, amusée, se déployer ce duel inégal euro-asiatique (ou plutôt euro-chinois). Le Panda sort ses griffes, en effet. Il va même proposer sa protection à une Grèce étouffée l'année dernière par l'arrogance franco-allemande… De sorte, que la vedette du sommet est bien M. Wen Jiabao, Premier ministre chinois, subtil mélange –comme l'est toute la Chine moderne – entre l'arrogance idéologique d'un Mao Tsé Tung et la force visionnaire et manœuvrière d'un Den Xiao Ping. Bien sûr, Madame Merkel et M. Sarkozy, porte-drapeau de l'Europe, essaieront de démanteler l'axe sino-américain. Quelles chances d'aboutir cependant, surtout que le Panda prend goût au Mc Donald ?