Il ne s'agit pas de sanctionner, mais de réinsérer le délinquant dans la société. C'est l'approche tunisienne et elle est saine et pragmatique. - Parler de la délinquance juvénile dans le monde arabe fait mouche. Le sujet fait grincer des dents de plus d'un et pourtant il continue à faire irruption et à alimenter les débats les plus passionnés, quoique les plus enrichissants. Le sujet est l'objet d'un cycle de formation ciblant les spécialistes et les cadres de l'enfance dans le monde arabe qui se tient à Tunis les 23, 24 et 25 novembre. Une manifestation organisée par la Direction du développement et des politiques sociales et le Secrétariat technique du Conseil des ministres arabes des Affaires sociales, relevant de la Ligue des Etats arabes. Pendant ces journées, il n'est pas question de lever le voile sur un univers impitoyable de l'enfance gangrénée par les affres de l'abandon, mais plutôt de parler d'un sujet supposé être connu de tous. « On ne dispose pas pour autant de statistiques sur la délinquance juvénile dans le monde arabe mais c'est un sujet qui nous concerne tous et aucune société ne peut y échapper » commente un expert égyptien Abdallah Najjar qui a procédé à l'analyse des causes de la délinquance et proposé des solutions qui peuvent être valables pour tout le monde arabe. Car selon Mme Najah Belkhiria Karoui la Secrétaire d'Etat auprès du ministre des Affaires Sociales, de la Solidarité et des Tunisiens à l'Etranger, cette question concerne de la même manière les pays arabes à quelques exceptions près. Mais qui est ce délinquant qu'on montre du doigt et qu'on risque a fortiori d'en faire le bouc émissaire des maux qui rongent nos sociétés ? Il a été défini par l'universitaire, Abdallah Najjar comme « un enfant âgé entre 12 et 18 ans et dont le développement physique est à son summum, mais dont les capacités intellectuelles ne sont pas complètement requises. Ils sont, de ce fait, assez fragiles pour être facilement manipulés. » remarque-t-il. La violence semble faire partie de l'univers de ces délinquants, qui dans sa variante arabe est traduite par l'addiction, le vol à l'arraché et la mendicité .... Cette réalité qui mine de l'intérieur les sociétés arabes a été considérée, par les spécialistes présents comme une résultante du milieu où se développe l'enfant. Le quel peut être protégé de sa conduite à risque si l'on s'en prend à ses causes profondes. Ces jeunes qu'on trouve volontiers incultes et dangereux et qui représentent même une menace pour la sécurité des uns et des autres, surtout lorsqu'ils s'organisent en 'bandes' sont selon le Pr Najjar victimes de conditions familiales, sociales et personnelles. Ils sont pour commencer, nés dans des familles dont les parents sont aux ‘'abonnés absents'' de l'éducation de leurs enfants, parce que épuisés par les charges familiales. Le spécialiste relève aussi la question de l'exode qui berce de fausses illusions des jeunes ennuyés par l'école et donc ‘'avides de liberté''. Sans oublier les facteurs sociaux comme le chômage, la pauvreté qui enfoncent encore plus les jeunes dans le mal. Quant aux facteurs psychologiques qui peuvent être aussi la cause de la délinquance, ils sont considérés par le conférencier comme étant l'apanage des psychologues et des psychiatres. Quelles solutions peut-on envisager ? Le Pr Najjar tire de l'essence même des préceptes de notre religion des solutions à la délinquance juvénile comme par exemple la possibilité de placer un enfant qu'on a du mal à élever dans une famille d'accueil dès la maternité. « L'être humain est vénéré par notre religion où l'homme a un caractère divin. C'est en ce sens que l'on devrait considérer l'éducation à dispenser aux jeunes générations comme étant une noble mission. » dit-il. « L'homme est aussi au centre de notre politique nationale. » souligne Mme Najah Belkhiria Karoui dans son allocution d'ouverture. Elle évoque dans la foulée l'expérience tunisienne en matière d'encadrement des jeunes délinquants. « Il ne s'agit pas de sanctionner par la loi un délinquant ou encore de l'isoler. Bien au contraire il faut l'accompagner et l'aider à se réinsérer dans la société. » avance la Secrétaire d'Etat auprès du ministre des Affaires sociales. Pour nous Tunisiens, la délinquance juvénile rappelle un tant soit peu, le cas de Hamma Hamma, l'enfant abandonné propulsé au devant de la scène artistique dans le feuilleton ramadanesque de Sami Fehri , “Casting”. Celui-ci a permis le temps d'une fiction réaliste, d'éveiller les consciences et d'approcher un sujet jamais abordé jusque là avec autant d'audace et de vérité dans nos médias. Pourvu que cela dure et que les actes suivent.