Hassan ARFAOUI - [email protected] - L'un des 7 péchés capitaux du 7 novembre est d'avoir renié Bourguiba. Ce déni, qui prenait les allures d'un meurtre du père, annonçait déjà la déchéance du fils... illégitime. A sa mort, le " combattant suprême " a été mal et vite enterré. Cet enterrement prenait les accents d'une insulte faite à tout un peuple. Il en demeure cependant l'image, qui résonnait déjà comme une promesse, de ces gamins de dix ans, qui n'ont pas connu Bourguiba, et qui hurlaient, toutes gorges déployées : Yahya Bourguiba (Vive Bourguiba !). Un véritable bras d'honneur à ce mépris de la mémoire de toute une nation. A ce déshonneur qui conjuguait l'ignorance à l'arrogance. De Tunis à Monastir, le cercueil de cet homme immense a été transporté à bord d'un avion baptisé " 7 novembre ". Exemple parfait de l'adéquation entre dictature et vulgarité. Et voilà maintenant que le père, ressuscité, savoure sa revanche. Car, il faut le dire, cette révolution du jasmin doit beaucoup au savoir. A l'éducation dans laquelle Bourguiba a investi et s'est investi. Il s'agit, peut être de la première révolution cognitive et électronique de l'histoire. En effet, c'est cette société du savoir, voulue par Bourguiba, qui a permis l'acquisition des compétences nécessaires à la coordination d'activités politiques temporellement et spatialement éloignées. Compétences sans lesquelles nous étions condamnés à rester en dehors de la vie politique et de l'histoire. C'est grâce au savoir que nos jeunes sont devenus plus aptes à prendre part au processus politique, voire même à l'initier. Une participation qualitativement différente de celle de leurs aînés, qui s'est traduite par l'exigence de citoyenneté et de liberté et de prendre part à la prise de décisions, conjuguée à la remise en cause des élites. Les partis politiques d'opposition furent, d'une manière générale, des organisations fantomatiques avec un nombre restreint de dirigeants au sommet et des partisans peu nombreux et domestiqués à la base. Ces organisations ne produisaient qu'un niveau bas de participation politique, qui se réduisait le plus souvent à l'acte de voter dans des scrutins dont les résultats étaient connus d'avance. Le nouveau mode de participation conduit par les jeunes était plus orienté vers des thèmes précis, plus mobilisateurs, s'opérant souvent à travers des réseaux sociaux électroniques, ce qui exigeait des compétences cognitives avancées. Cette nouvelle donne rend désormais possible une nouvelle configuration politique plus pérenne dans notre pays, où les réseaux sociaux électroniques (1.400.000 Tunisiens seraient sur Facebook) constituent une sorte de ferment politique. Transformation des valeurs et mobilisation cognitive semblent aller de pair pour nous révéler une Tunisie qui s'est montrée capable de se libérer par le savoir. Revanche suprême du " combattant suprême " ! Loin de vouloir mytifier Bourguiba -car il fut aussi celui de l'autoritarisme et de la présidence à vie- cet appel destiné à ceux qui ne cessent d'insulter la mémoire de cet homme, héros de l'éducation, de la santé et du code du statut personnel, en le traitant de " vendu " et d'aliéné à l'occident !