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La Révolution dans la presse internationale
Kiosque inrernationale
Publié dans Le Temps le 27 - 01 - 2011


Maroc Hebdo International
Rachid Amar, le nouvel homme fort ; l'armée tunisienne au cœur de l'événement
Assurément, on commence à y voir un peu plus clair dans les tenants et les aboutissants de ce qui s'est passé mi-janvier en Tunisie avec la fuite puis la destitution de Zine Al Abidine Ben Ali. En particulier, des informations encore partielles, mais significatives, font état du rôle de l'armée dans les événements qui ont conduit à cette nouvelle situation.
Un homme fort sort de cette épreuve en la personne de Rachid Ammar, chef d'état-major de l'armée de terre. Appelé au début de la révolte populaire dans les villes de Kasserine, Thala et Sidi Bouzid, par Ben Ali, à mater l'insurrection, il s'est opposé à cette politique de répression «D'accord pour déployer les soldats, afin de calmer la situation, mais l'armée ne tire pas sur le peuple», a-t-il répliqué à l'ancien dictateur. Ce qui lui valut sur le champ son limogeage et son assignation à résidence.
Quatre jours plus tard, le 14 janvier, il est rétabli dans ses fonctions par le Premier ministre, président par intérim durant quelques heures, Mohamed Ghannouchi.
Une armée apolitique
Depuis, l'armée s'est imposée comme un acteur-clé du changement en Tunisie. Elle s'est donc opposée au maintien de l'ordre, qui ne pouvait que se traduire par un bain de sang. Pas davantage, elle n'a voulu prendre le pouvoir, qui était pratiquement à portée de main. Enfin, elle n'a pas été tentée non plus par l'exemple portugais d'avril 1974 de la “Révolution des Œillets” en faisant face à une situation d'exception avant de remettre le pouvoir dans les meilleurs délais aux civils. Bref, il n'y a pas eu de coup d'Etat. L'armée tunisienne a su et pu résister à cette tentation peu répressible sous d'autres latitudes régionales ou continentales...
Si elle a imposé au président déchu de quitter le pouvoir, c'est parce qu'elle a voulu sauver le pays d'une tragédie aux effets incalculables et imprévisibles. Une retenue liée à l'histoire de ce corps dans la société tunisienne depuis plus d'un demi-siècle, même si ce schéma a été validé par de fortes pressions internationales, notamment américaines.
Ce statut de l'armée dans le passé tient à plusieurs facteurs. La lutte pour l'indépendance n'a accordé qu'une place marginale aux “maquis”. Le Néo-Destour et son leader historique, Habib Bourguiba, privilégiaient en effet, plutôt qu'une révolte armée, une action sur l'opinion et les dirigeants français et internationaux, combinée avec des manifestations publiques de mobilisation et d'adhésion à son programme. C'était là une voie politique jugée pratiquement exclusive dans l'accession à l'autonomie interne et à l'indépendance.
L'armée nouvelle qui est ensuite mise sur pied participe d'un modèle: celui de l'armée classique. Les “fellagas” -comme on les appelait alors- sont désarmés et certains d'entre eux sont intégrés dans la Garde nationale qui est aussitôt créée. Ce choix répond au souci du Combattant suprême tant par tradition que par formation. Bourguiba constitue alors une armée vouée aux seules tâches militaires; il la voulait apolitique. Un contre-modèle de ce qu'il voyait dans le projet algérien de l'époque avec une Armée de Libération nationale dont l'état-major, dirigé par un certain colonel Boumédiène, se trouvait sur le territoire tunisien, à Ghardimaou...
Un corps sous-équipé
Que ce soit avec Bourguiba ou avec Ben Ali l'armée était ainsi contenue dans un rôle strict. On peut faire référence à son insularité dans la mesure où, à la différence de tant d'autres au Maghreb et ailleurs, elle n'a pratiquement pas un rôle extramilitaire. C'est qu'elle ne dépend pas seulement de ce qu'elle est mais encore du reste dans lequel il faut inclure en bonne place le passé de la société et de l'Etat.
Qu'est-ce que l'armée tunisienne aujourd'hui? Une armée dont Ben Ali se méfiait. Marginalisée donc, elle était supplantée par l'appareil sécuritaire (police, garde présidentielle,...) fort de plus de 120.000 hommes. Une armée décapitée en avril 2002 depuis un mystérieux accident d'hélicoptère où l'état-major des forces terrestres avait trouvé la mort.
La confiance du peuple
Mais comment se pense aujourd'hui cette armée? Même si elle reste faiblement politisée -par une tradition plus que cinquantenaire-, la révolte actuelle du peuple conforte certaines inclinations naturelles: souci de préservation de l'unité nationale, sensibilité à l'ordre social, loyalisme envers les principes qui fondent le bloc de légitimité. Mais la situation actuelle pose un problème de principe: loyalisme envers quelle autorité politique puisque deux responsables seulement, le président par intérim Fouad Mebazaa et le Premier ministre désigné Mohamed Ghannouchi, en sont l'expression formelle ?
Or, le discrédit de plus en plus marqué qui marque tout le personnel politique lié au RCD paraît frapper également ces deux personnages. Le processus de “normalisation” initié depuis le 14 janvier courant va-t-il pouvoir être mené à son terme, à savoir la mise sur pied préalable d'un gouvernement largement représentatif devant préparer des élections législatives dans les six mois ?
Aujourd'hui, l'armée est garante en dernière instance et tutélaire du bon déroulement de cette étape historique que traverse la Tunisie. Elle bénéficie du soutien de la population parce qu'elle n'a pas eu les “mains sales” par le passé et qu'elle l'a protégée contre les exactions des milices policières de Ben Ali.
M. SEHIMI

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Le Monde
La Tunisie ; symbole de la perte des valeurs de la France
Rarement la France n'aura autant failli à sa réputation, hélas bien dévaluée, de patrie des droits de l'Homme. Pendant deux décennies, elle a préféré fermer les yeux devant les exactions d'une dictature tunisienne de plus en plus répressive et corrompue. Elle est demeurée sourde aux appels à l'aide des opposants, journalistes, syndicalistes, avocats, défenseurs des droits de l'Homme tunisiens. Pire, non contente de s'abstenir de la moindre dénonciation, elle n'a pas hésité, toutes classes politiques confondues, à décerner des brevets de démocratie à l'autocrate Zine El-Abidine Ben Ali.
Pourtant chacun savait que la Tunisie n'était pas seulement une terre de tourisme mais aussi une terre de torture où toutes les libertés étaient bafouées de façon à bâillonner la moindre voix discordante. La liste est longue des multiples violations des droits de l'Homme commises par un régime policier entièrement tourné vers la répression : musellement des médias, absence de liberté d'opinion, de réunion et de manifestation, harcèlement des militants contestataires, recours systématique aux mauvais traitements et à la torture, arrestations et condamnations arbitraires, impunité pour les actes de violence des sbires de Ben Ali, système politique verrouillé interdisant tout pluralisme, élections du chef à la soviétique avec 99% des suffrages, sans compter l'incroyable corruption du clan du président et de son épouse.
Alors que la France se félicitait de l'organisation d'un Sommet de l'information à Tunis, elle n'a jamais protesté contre les refoulements des journalistes, ou encore du président français de la Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme (FIDH) expulsé à trois reprises à son arrivée à l'aéroport. De même, lorsque la FIDH a initié en 2001, en France, une procédure contre un haut fonctionnaire du ministère tunisien de l'Intérieur pour des faits de torture à l'encontre d'une tunisienne, les autorités françaises, plutôt que de saisir cette occasion pour dénoncer haut et fort la pratique constante de la torture par le régime de Ben Ali, ont tout fait pour étouffer cette procédure et n'ont pas davantage cherché à mettre en œuvre l'exécution d'une condamnation à douze années de réclusion criminelle enfin prononcée en septembre 2010.
La France a préféré soutenir le dictateur, plutôt que d'entendre la colère et la souffrance croissantes du peuple. Alors que le pouvoir tunisien ne cessait de se durcir, elle a même continué, au sein de l'Union européenne, elle aussi largement aveugle, à militer pour l'octroi du statut avancé de partenariat avec la Tunisie. Aucune des justifications mises en avant pour un tel soutien inconditionnel ne résistait pourtant à l'examen. Le prétendu danger islamiste n'était en particulier qu'un leurre, dont a abusé le Président Ben Ali pour pourchasser tous les opposants, la plupart des laïcs. Jusqu'au départ du tyran, l'attitude des autorités françaises a autant manqué de moralité que de lucidité, comme l'ont démontré jusqu'à la caricature les déclarations affligeantes de Madame Alliot-Marie.
La vérité est que les politiques français ont renoncé à défendre les valeurs universelles. Sous le fallacieux prétexte qu'il convient de préserver une certaine stabilité internationale, et qu'il n'est pas possible de se brouiller avec tous les Etats autoritaires de la planète, la référence au respect des valeurs élémentaires de la démocratie et des droits de l'Homme est mise sous l'éteignoir. Une telle doctrine, également dictée par la primauté des intérêts financiers, est appliquée aussi bien pour la Russie ou la Chine que pour des pays arabes ou africains. Il s'agit là d'une vision à courte vue. Non seulement la France y perd son âme, mais elle risque fort d'être discréditée et marginalisée.
Contrairement à l'hypocrite discours officiel sur la non ingérence dans les affaires intérieures des Etats, la France s'est bien ingérée dans la politique tunisienne en vantant contre toute évidence les «vertus démocratiques» du président Ben Ali. Or, elle aurait pu et du au moins s'abstenir d'un tel appui à la tyrannie, et au contraire aider la société civile tunisienne à préparer l'inévitable chute du dictateur et la transition consécutive vers un régime démocratique. Le paradoxe était qu'alors que la Tunisie frémissait d'aspirations et de capacités démocratiques, elle devait subir l'une des pires dictatures de la région. En refusant d'apporter son concours à une évolution vers la démocratie, la France a témoigné d'un mépris coupable envers le peuple tunisien, considéré comme inapte à vivre dans un espace de liberté.
Plutôt que d'essayer de trouver de mauvaises et alambiquées justifications à son comportement, la France doit aujourd'hui s'engager pleinement pour apporter tous les soutiens nécessaires au succès de la révolution tunisienne. Elle doit également tirer les leçons de ses défaillances dans la détermination de sa politique étrangère vis-à-vis des pays qui se trouvent dans des situations largement similaires à la Tunisie et où elle fait preuve de la même lâcheté et du même manque de clairvoyance. A défaut, ce sont les peuples marocain, algérien, égyptien, jordanien et autres qui se chargeront de sanctionner sa complicité avec des dictateurs corrompus.
Patrick Baudouin, Avocat à la Cour de Paris et président de la FIDH
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Aujourd'hui Le Maroc
Besoin d'un projet politique collectif et révolutionnaire
Parmi les révolutionnaires eux-mêmes, ou parmi ceux qui veulent gérer la transition, les désaccords apparaissent et parfois même la violence s'installe entre eux.
Un historien, Jean Tulard, spécialiste de la Révolution française, dans une savante interview au quotidien français Le Monde, a fait passer un examen de conformité à la révolution tunisienne. Entre une révolte généralisée qui délégitime totalement un pouvoir passablement discrédité et une révolution, il y a encore du chemin à faire. Dans la première étape, celle du refus violent et spontané, il n'y a ni leader ni idéologie. Des émeutes concomitantes, sur tout le territoire, expriment un ras-le-bol généralisé par une violence multiforme. La coordination des actions est intuitive et l'effet de contagion fait le reste. En Tunisie, c'est cette étape qui vient d'être terminée. Suit, ensuite, selon notre spécialiste, une période d'instabilité assez importante, et assez durable, au cours de laquelle la violence continue et met en scène diverses forces de résistance — une fraction de la police et la garde présidentielle en Tunisie — et des forces «nouvelles» qui commencent à se positionner pour le pouvoir. L'alternative politique n'est pas encore élaborée, les élites de l'ancien régime sont toujours là, incontournables, et l'offre révolutionnaire n'est pas au point. Parmi les révolutionnaires eux-mêmes, ou parmi ceux qui veulent gérer la transition, les désaccords apparaissent et parfois même la violence s'installe entre eux. Entre les débuts d'une purge, les règlements de comptes, les revanches et la finalisation d'un nouveau projet de société, pour le coup, cette fois-ci, révolutionnaire, plusieurs mois, ou plusieurs années, peuvent passer. Les Tunisiens en sont là aujourd'hui. Une élite de l'ancien régime est aux commandes pour préparer la transition et assurer un minimum de continuité de l'Etat. Des ex-opposants, des courants politiques antagoniques, pris de court par la révolte, n'arrivent pas encore à formuler un projet politique collectif de nature révolutionnaire, c'est-à-dire qui constitue une rupture totale avec l'ancien régime. Un bricolage constitutionnel sert de viatique à tout le monde. La Révolution française a mis près de trois ans pour clarifier un peu les choses, sans jamais y arriver. Entre-temps, il y a eu la terreur qui a fini, à la fin du processus, par la liquidation des révolutionnaires entre eux. Après, il va y avoir Bonaparte, mais cela est une autre histoire. La Tunisie est aujourd'hui dans la phase confusion. Entre les ex-élites honnies qui ont trusté le pouvoir de la transition et ceux qui se réclament d'une révolution du Jasmin indéfinie, pour l'heure sans projet, sans leaders, et qui, avec la fuite de Ben Ali, a perdu son objet «fédérateur», le pays se cherche une voie. La voie révolutionnaire pacifique est historiquement très rare : l'exemple portugais est quasi unique. La neutralité absolue de l'armée est, elle aussi, historiquement impossible. Dans les périodes révolutionnaires, les armées jouent un rôle décisif quand elles ne pilotent pas elles-mêmes les événements. En Tunisie, le dernier mot reviendra probablement à l'armée, c'est elle qui va faire pencher la balance d'un côté ou de l'autre.


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