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« Les structures du RCD fonctionnaient pour le compte de la mafia » Politique: Fethi Jerbi, membre du bureau politique du Parti du Congrès pour la République (PCR)
Titulaire d'un doctorat d'Etat en économie de l'Université libre de Bruxelles, M. Fethi Jerbi est l'un des fondateurs du Parti du Congrès pour la République (PCR) et il occupe le poste de membre du Bureau politique de ce parti. M. Jerbi en tant qu'économiste et homme politique nous parle ici des causes qui sont à l'origine de la Révolution du 14 janvier et les moyens pour redresser la situation actuelle. Interview. * Le Temps : Quelles sont les causes de la Révolution? - M.Fethi Jerbi : Ce sont des causes sociales plus que politiques. Durant le règne du président déchu une nouvelle frange de la population s'est appauvrie. En 1987 un rapport confidentiel de la Banque Mondiale a déjà prévu ce phénomène. En plus, les Tunisiens n'avaient plus confiance dans les institutions de l'Etat et dans les institutions para-étatiques du RCD et ses structures. Ils étaient au courant du détournement des revenus pour financer l'Etat mafiosi. Les structures du RCD fonctionnaient pour le compte de la mafia et non pour le compte des classes sociales. Avant 1987, il n'y avait pas de collusion entre l'Etat et le RCD. Mais après, la collusion est devenue totale. Ils se sont mobilisés pour enrichir les membres de la famille de Ben Ali et ses proches. • Quels sont les moyens utilisés? - Ils procédaient par la distribution des liquidités extérieures qui proviennent de l'endettement. Avant ils étaient distribuées aux ménages, aux entreprises et à l'Etat. Ces dernières années c'est la mafia qui en bénéficie. Il y a aussi les créances douteuses. Certaines personnes contractent des prêts mais ne les remboursent pas. Les membres de la famille de Ben Ali et les proches ont pratiquement vidé les banques. Il y a eu donc un déficit de légitimité des institutions étatiques et para-étatiques. La corruption s'est ainsi généralisée. • Mais le taux de croissance de l'économie tunisienne s'est maintenue à un niveau honorable ? - Justement, on se pose la question si vraiment l'économie tunisienne fait de la croissance réelle. Tout porte à croire que c'est faux. La preuve, aujourd'hui, elle est en faillite totale. L'ancien régime annonçait le taux de 6% alors que la Banque Mondiale le situait à 1,7%.Il ne faut pas oublier que l'Institut national des statistiques qui publiait les chiffres n'est pas autonome. • Quelles solutions proposez-vous pour redresser la situation ? - Des solutions classiques. A commencer par une politique d'austérité qui ne touche pas les ménages mais qui doit être ciblée vers l'Etat et les entreprises quitte à ce que l'Etat creuse un déficit budgétaire. Il faut procéder à un audit et faire appel pourquoi pas à des auditeurs étrangers. Aujourd'hui, on ne sait pas exactement combien on a de chômeurs ni quel est le volume de la masse monétaire. Il faut aussi procéder à une réforme fiscale équitable pour éradiquer la fraude fiscale. Il est nécessaire aussi de réformer le régime de la sécurité sociale qui ne représente que 5 à 6% du PIB alors que dans d'autres pays il dépasse les 40%. Le gouvernement doit appliquer une politique monétaire volontariste au service de l'économie et il doit aussi assurer une totale autonomie de la Banque Centrale. Je souligne avec force que le gouvernement doit le plus rapidement possible baisser de 20% les prix pour augmenter le pouvoir d'achat du Tunisien sans pour autant augmenter les salaires. Interview réalisée par Néjib SASSI