Il est plus que temps d'ouvrir et d'élargir le débat concernant le paysage médiatique, la liberté d'expression, le financement, les objectifs des médias écrits et audiovisuels et les lois qui les régissent. Ceci est de la plus haute importance pour un pays qui a pour ambition d'atteindre la zone démocratique et où, jusque-là, la notion de l'appartenance et de l'allégeance des médias au pouvoir était ancrée si profondément dans la conscience atteinte de soporifiques des gens qu'elles en étaient devenues presque divines. Je me rappelle qu'après la destitution de Bourguiba en 1987, j'avais tenté de regrouper quelques intéressés autour de l'idée d'une radio libre. La majorité des personnes interpellées me regardaient comme si j'avais perdu la raison où que je descendais de la planète Mars, tellement elles étaient persuadées que la Radio et Bourguiba ne faisaient qu'un seul corps. Pour leur majorité, je proférais des paroles qui étaient pires que si j'avais mis en cause l'existence des humains et de leur créateur. Cela ne m'a empêché de faire une campagne allant dans le sens de la création des radios libres qui a été relatée par la majorité des quotidiens et des périodiques de l'époque et puis j'ai disparu. Je sus, plus tard, qu'un petit groupe s'était formé pour militer pour cette alternative et qu'un rassemblement avait eu lieu à la Goulette, où tous les articles publiés avaient été accrochés. Plus tard, lors d'un rassemblement organisé par l'Association des Journalistes Tunisiens (AJT) et en présence des observateurs étrangers et, ou beaucoup de gens du métier se sont plaints de la vétusté de leur situation et des tortures qui leur étaient infligées, je n'avais pas crû bon de faire pareil et je me suis contenté de demander qu'on m'explique clairement quelle est la loi qui régit le secteur de la presse écrite et ce que je dois faire pour devenir « Patron », fonder mon propre journal et exploiter, enfin, cette masse de pauvre journalistes qui ne demandaient que cela. Les gens présents se sont contentés de rire puis d'applaudir longuement. Quand on a peur, on fait souvent semblant que la personne qui nous menace, ne fait que plaisanter. Et puis tout s'arrêta là ! Nous avions atteint la cime du fatalisme désespéré et de l'aveuglement. La Révolution semble avoir rouvert les yeux des Tunisiens. Tout le monde parle de nouveau de réorganiser le domaine médiatique et de lui donner la place qui lui revient de droit dans un terreau démocratique. Des associations sont nées. D'autres sont appelées à voir le jour. Et de nouveau ces mêmes questions qui se reposent : quelle est la loi qui régit le secteur ? Faut-il la réviser ? Que faut-il faire pour créer un média ? Comment garantir la liberté d'expression et éviter l'asservissement des nouveaux médias aux « trusts » financiers ou politiques ? En un mot quel genre de médias la Révolution tunisienne va-t-elle et doit-elle créer ? Nous tenterons d'apporter notre modeste participation à répondre à tous ces questionnements dans un très prochain avenir. Vos suggestions seront – évidemment – les bienvenues.