Lamine Nahdi vient de présenter samedi dernier au complexe culturel Néapolis, un spectacle intitulé ‘‘Baâd Echeda Iji Lefraj'' (Après la crise, la délivrance) avec la participation de son neveu Riadh Nahdi. Un show plein d'humour et de rire et des reprises qui ont retenu le jeune public présent. L'artiste a voulu à la fin du spectacle se confier pour dévoiler sans détour, sa conception du métier de comédien, l'avenir du théâtre tunisien après la révolution et ses projets futurs Le Temps : pouvez-vous nous présenter votre spectacle ‘‘Baâd Echeda Iji Lefraj'' (Après la crise, la délivrance) ? Lamine Nahdi : je retourne sur les planches après ma maladie avec un spectacle intitulé ‘‘Baâd Echeda Iji Lefraj'' (Après la crise, la délivrance), avec la participation de mon neveu Riadh Nahdi. C'est ma troisième sortie après celles de Sfax et Monastir. Je suis très heureux de retrouver mes fans surtout en cette période de la révolution. J'ai eu de la chance de partager avec les jeunes cette révolution de la liberté et de la dignité. Le peuple tunisien a triomphé du despote prédateur qui le gouvernait. Personnellement, j'ai toujours dénoncé ce régime policier à travers mon discours critique et inspiré de la réalité. Durant mon show, j'ai essayé de proposer des moments forts extraits de mes anciennes pièces produites dans les années 70 et 80, souvent censurées pour leurs sujets tabous sous le régime de Bourguiba. Ces extraits seront tirés des pièces ‘‘Fi Bilad Al Haw Haw'', ‘‘Kadha Wa Kadha'', ‘‘Ahl El Hawa'' et ‘‘Al Fourja''. Les recettes du spectacle seront versées aux familles nécessiteuses dans les zones défavorisées. *Quelle a été la réaction du public ? -Le courant a passé. Sur scène, les cris de joie, d'enthousiasme et d'amour du public étaient grands surtout qu' il est difficile aujourd'hui de le faire rire. Et puis cet art qui faisait les beaux jours de notre théâtre se fait rare. Nous ne voyons plus de nos jours des artistes à l'image de Mohamed Ben Ali, Hattab Dhib, Jamila Ourabi, Hamadi Jaziri, Hédi Semlali. La comédie est pour moi, plus qu'une passion ; c'est une manière d'exister, de se laisser toucher et de communiquer avec les gens. Ce qui me plaît dans la comédie, ce sont toutes ces émotions que l'on arrive à avoir et, avant tout, celles que l'on peut transmettre. *Vous niez donc les jeunes comédiens d'aujourd'hui comme Lotfi Abdelli par exemple? -Non, je ne doute pas de leurs talents mais ils n'ont pas le même poids par rapport à l'ancienne génération. Je respecte beaucoup le travail de Lotfi et les autres... Mais ils doivent travailler plus, diversifier leur expérience et chercher de nouveaux outils de rire. Ils ne doivent pas s'arrêter en si bon chemin vu qu'ils peuvent apporter beaucoup au théâtre tunisien. Je le dis et répète, que seul Lotfi Abdelli a su émerger du lot relativement. Les autres n'ont pas laissé de traces et leurs œuvres en témoignent. *Quel sera l'avenir du théâtre tunisien après la révolution ? -Il y aura beaucoup de sélections. Seuls les vrais hommes de théâtre auront le dernier mot. Les autres qui ne peuvent pas rester dans le nouveau paysage théâtral, doivent plier leurs bagages. Il faut essayer un peu, faire un tour de piste mais si on voit que ce n'est pas ça, que ça n'accroche pas, il faut s'éclipser car le théâtre est avant tout, un métier passionnant en contact avec la scène *J'imagine que vous avez des projets en cours. Pourriez- vous, nous dire lesquels? -Un one woman show, dont je suis auteur du texte et de la mise en scène , avec Wahida Ferchichi, une jeune actrice du Kef qui a beaucoup de talent. Comme vous le savez, le one man show est un art difficile et personnellement, je n'ai pas vu beaucoup d'artistes qui ont su tirer leur épingle du jeu dans ce genre de théâtre. Je n'en dis pas plus sur ce projet car il est en phase d'écriture. J'espère qu'il plaira. *Comptez-vous présenter un travail personnel sur scène ? -Pas pour le moment. Je dois doser mes efforts, vu l'état de ma santé et selon les conseils de mon médecin, je ne dois pas me forcer durant un an. *Où est passé votre projet « Maki Wa Zakiya » avec Moncef Dhouib ? - Peut-être, je le reprendrai l'année prochaine. J'aime diversifier et enrichir mon expérience. J'ai essayé le tragique, le comique et d'autres formes d'arts. J'étudie tout projet sérieux car je rêve toujours de réussir sur scène. *Et la télévision ? -Cette force m'inspire aussi à être présent à la télé durant le mois de ramadan prochain avec des sketchs courts et comiques dans la chaîne nationale , El Watania *Le cinéma vous tente-t-il? -Je participerai à un long-métrage qui sera réalisé par mon fils Mohamed Ali Nahdi. Le comédien égyptien Mohamed Saâd , alias Lembi , nous accompagnera dans cette aventure cinématographique. *Une dernière question, que répondez-vous à cette prise en charge de votre hospitalisation par le Président déchu ? -Personnellement, j'ai donné 35 ans de ma vie au théâtre. Des années de réussite et de richesse culturelle et théâtrale. Je n'ai jamais collaboré avec le régime. Au contraire, mes pièces m'ont valu des problèmes avec les autorités de l'époque, voire quelques mois de prison. Bourguiba m'a mis à la prison. Ben Ali aussi. Il a même censuré mon œuvre « Fi Hek Essardouk Enraychou » que j'ai repris un an après. Je ne pense pas que le Président déchu a bien traité Lamine durant sa carrière théâtrale. Mon travail m'attira les hydres du pouvoir en place qui me considérait comme un perturbateur de l'ordre public Propos recueillis par : Kamel Bouaouina
« Durant mon show, j'ai essayé de proposer des moments forts, extraits de mes anciennes pièces produites dans les années 70 et 80, souvent censurées par l'ancien régime » « Il est difficile aujourd'hui de faire rire le public. Les comédiens se font de plus en plus rares » « Je prépare un woman show avec Wahida Ferchichi, une série de sketchs pour le Ramadan et un film avec mon fils Mohamed Ali » « Je reprendrai peut-être l'année prochaine «Maki Wa Zakia » avec Moncef Dhouib »