Ce n'est pas la chaîne « Nessma » qui a été en procès hier, mais bien la liberté d'expression ; et ce n'est pas un film – Persépolis – mais bien la liberté de création, qui a été sommée de se présenter devant les juges, pour répondre de « crimes », qui n'existent que dans la tête d'une poignée de « Salafistes » et fondamentalistes déchaînés, qui se sont investis, sans que personne ne leur ai rien demandé, d'une mission de « purification » qui prend ici, les allures d'une « purge ». Purification et purge : quels vilains mots et à quelle époque vivons-nous, pour permettre que de pareilles insanités aient cours, en toute impunité, sous nos latitudes ? Un procès contre qui, contre quoi ? En vérité, cela se passe de tout commentaire. Et peu importe la façon dont vont se dérouler les choses puisque cela crée un précédent, autrement significatif, sur le nouveau climat qui prévaut désormais sous nos latitudes, puisque le passage d'un film, à la télévision, peut vous incriminer en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire, et vous faire accuser d' « hérésie », comme dans les temps obscurs où l'on brûlait des êtres, faits de chair, de sang, et d'âme, sur la place publique, parce que pointés du doigt par une quelconque instance, plutôt moralisatrice que morale, laquelle imbue d'un pouvoir, pour le moins usurpé, se plait à distribuer, sentence et sermons, si ce n'est les châtiments les plus extrêmes, à tous ceux qui n'appartiennent pas à sa « chapelle ». On en est là aujourd'hui en Tunisie. Et c'est gravissime. La liberté de créer ne se donne pas ; elle s'arrache. Idem pour la liberté d'expression. Alors, condamner l'une ou l'autre, c'est condamner tout un pays, à tomber sous la coupe des obscurantistes, sans foi ni loi, qui ne dialoguent que par la violence et n'acceptent point l'altérité. Que peut-on opposer au fanatisme ? Le silence ? Ce n'est pas une bonne idée. Il faut continuer à se battre, pouce par pouce, pour préserver un espace où les libertés les plus fondamentales, sont respectées. Il n'y a pas d'autre alternative, car autrement, que laisserons-nous pour nos enfants dans ce pays ? Une prison à ciel ouvert ? Un purgatoire ? A Dieu ne plaise. Le procès de « Nessma » et de « Persépolis » c'est notre procès à nous tous. C'est ainsi que nous le vivons.