Depuis que Me Abderrazak Kilani a quitté le bâtonnat pour occuper ses nouvelles fonctions de ministre chargé de la coordination entre la Constituante et le Gouvernement, les remous intervenant sans cesse au sein de l'Ordre National des Avocats ne font qu'instaurer un climat d'agitation, qui ne fait que nuire à l'image de marque de cette instance à laquelle appartiennent les défenseurs de la veuve et de l'orphelin. Pourtant, les avocats ont été à l'avant-garde au cours des manifestations qui ont abouti à déboulonner cette icône de la dictature le 14 janvier 2011, après 23 ans d'injustice, durant lesquelles, les droits de l'Homme étaient bafoués. Le bâtonnier Abderrak Kilani a reçu, du conseil des Barreaux Européens le prix des droits de l'Homme, décerné, au-delà de sa personne, à tout le corps de métier, et à la Tunisie du printemps arabe. Mais les problèmes au sein du barreau ont commencé depuis la polémique autour du choix du nouveau bâtonnier. A vrai dire, c'est un poste de bâtonnier par intérim, en attendant les élections de 2013. Toutefois certains membres de l'ordre ont contesté la nomination de Me Chawki Tebib, qui n'a pas 10 ans d'ancienneté, comme l'exige la nouveau décret-loi réglementant la profession. Thèse que réfutent Chawki Tébib et ses adeptes, arguant qu'il s'agit en l'occurrence d'un poste de bâtonnier par intérim, cas n'ayant pas été prévu par le décret-loi précité. Mais le secrétaire général de l'Ordre ainsi que certains autres membres du barreau, persistent, allant jusqu'à intenter une action devant la cour d'appel, juridiction compétente en la matière, aux fins d'annuler la nomination de Chawki Tebib, qu'ils considèrent contraire à la loi et au règlement intérieur. et depuis, la polémique alla crescendo. Cela a été de nature à retarder le travail du barreau, consistant à étudier les dossiers de différentes natures, et qui concernent aussi bien les avocats que les justiciables. Bien plus, certains membres n'assistent plus aux réunions du barreau, estimant que l'actuel bâtonnier n'a aucune qualité légale. Ce qui augmenta les tensions et divisa les membres du barreau en deux clans : Les adeptes du nouveau bâtonnier, et ceux du secrétaire général. Vendredi dernier, au cours d'une réunion, à laquelle participèrent les adeptes de l'actuel bâtonnier, il a été mis fin aux fonctions de secrétaire général de Me Rached Fray et il a été décidé de le remplacer par Me Boubaker Betthabet. Or il y a deux problèmes, qui viennent s'ajouter aux autres problèmes existants, pour compliquer la situation davantage : 1) Quelle est la valeur juridique de la nomination du nouveau secrétaire général ? A cette question Me Fray nous répond qu'il considère que c'est une décision qui ne lui est pas juridiquement opposable, étant donné qu'elle émane « d'une minorité des membres du barreau, de surcroît présidée par Me Tébib dont la qualité de bâtonnier est contestée. » Quant à l'appel à une assemblée générale, le 10 mars pour discuter du choix du bâtonnier par une plus large audience, « c'est le vœu d'une grande frange des confrères en exercice » a expliqué encore Me Fray. 2) Par ailleurs, la nomination du nouveau secrétaire général, achoppe sur un problème, représentant la goutte qui a fait déborder le vase, à savoir le cumul des fonctions. En effet, le nouveau secrétaire général est également membre de la Haute Instance des Elections, et pour lequel il perçoit un salaire. Ce genre de cumul de fonctions est interdit par le décret-loi réglementant la profession d'avocat. Un avocat a envoyé une opposition par exploit d'huissier de justice aux fins d'annuler cette nomination contraire à la loi. Bref, tout un remue-ménage qui ne sert en aucun cas la profession et qui nuit essentiellement au justiciable. Ahmed NEMLAGHI