C'est du cru, apparemment, de cette Tunisie nouvelle, où tout semble des plus logiques et des plus naturels. Qu'une jeune fille ait le culot de s'attaquer, seule, à des « représentants » du sexe opposé et parvenir à les déplumer, était, il y a quelques années, du domaine de l'irréel. Or tout est normal, désormais, et tout ce qu'il y a de concevable de nos jours. Rien, manifestement, ne peut plus nous étonner. Jugez-en, d'ailleurs, par vous-mêmes, avec cependant ce petit conseil, celui de parcourir ces lignes dans un moment de détente. Ensuite, vous avez le choix, en rire ou plutôt en pleurer. Bref, allons pour le récit. C'est la dernière victime en date qui a déclenché l'affaire et permis à la machine judiciaire de se mettre en branle pour résoudre l'énigme, s'agissant en fait d'un honnête père de famille et qui était ce jour-là en route pour rejoindre son poste de travail, étant propriétaire d'un atelier de confection. Le pauvre était d'ailleurs à mille lieus de penser que le hasard, souvent des plus capricieux, lui réservait une de ces surprises qu'il n'aurait jamais imaginées. En tout cas, arrivé à un croisement, il fut subitement troublé par l'apparition, comme par enchantement, d'une jeune fille à l'allure hésitante. Elle paraissait mal en point, la pauvre, d'autant que son visage était marqué par quelques égratignures évidentes. A première vue, la malheureuse était victime d'une quelconque agression, impression qui a été confirmée par l fille, priant dans la foulée le conducteur de l'amener à l'établissement hospitalier le plus proche. Requête que le bonhomme ne pouvait aucunement repousser, se pliant donc volontairement à la demande pressante de sa passagère. Or, à peine eut-il démarré qu'elle lui a suggéré de bifurquer vers le domicile parental où elle devait prendre des papiers. En répondant à cette nouvelle sollicitude, il ne savait nullement qu'il venait de tomber dans le piège. D'une simplicité effarante, d'ailleurs ! Car une fois parvenue à destination, la passagère allait montrer son vrai visage, celui d'une criminelle de la pire espèce. En tout cas, elle n'a pas hésité à menacer son bienfaiteur d'ameuter tout le quartier s'il ne se montrait pas « coopératif » et lui refiler tout l'argent qu'il possédait. Pour son malheur, cependant, la victime ne portait que rarement des liquidités, ce qui explique qu'elle eut finalement droit à une centaine de dinars, mais se rachetant tout de même en le soulageant de son portable. Une fois la braqueuse disparue, le malheureux s'est empressé de porter plainte, permettant aux auxiliaires de la justice de procéder le lendemain à son arrestation grâce essentiellement au signalement fourni. Elle ne pouvait d'ailleurs qu'avouer son forfait, d'autant qu'elle était encore en possession du portable, ainsi que d'une quarantaine de dinars, le reste du butin ramassé la veille. Elle fut accablée par l'apparition de sa génitrice, celle-ci apportant un second portable, que la fille aurait chipé à une autre victime. Une surprise de taille attendait toutefois les enquêteurs, lorsqu'ils vont apprendre que la braqueuse, malgré les apparences concernant notamment sa corpulence, était en vérité une adolescente, n'étant en fait âgée que de quinze ans.