L'annonce par le ministère de la Justice, vendredi dernier, de la révocation de 81 magistrats a suscité les réactions les plus diverses tant au sein de la magistrature que chez les différents membres de la composante de la société civile. D'autant plus que cette décision annoncée d'une manière laconique, a été suivi d'un bref commentaire, en guise de justification, mais qui ne peut en aucun cas tenir lieu de motif de ladite révocation. en effet, ce commentaire est formulé comme suit : « il s'agit d'une première liste de magistrats accusés d'avoir persévéré dans l'erreur, ne tenant pas compte de l'opportunité offerte par la révolution pour se remettre en cause et retrouver le droit chemin……. »
Dans ce même communiqué du ministère de la Justice il est encore précisé :
«Il est devenu impératif de mettre un terme à cette situation marginale qui porte atteinte à l'honneur de la magistrature, et place la crédibilité et des institutions de l'Etat …dans une situation douteuse et suspecte ».
Il n'y a pas le moindre détail ni le moindre commentaire concernant la manière par laquelle les magistrats concernés ont porté atteinte à l'honneur de la magistrature et à la crédibilité des institutions de l'Etat.
S'agit-il de corruption, de malversations ou de comportements contraire touchant aux bonnes mœurs.
Décision unilatérale Quoi qu'il en soit, plusieurs organisations syndicales et juridiques ont dénoncé cette façon par le ministère de la Justice de prendre des décisions, à la hâte et de manière unilatérale et sans une consultation préalable des différentes composantes de la société civile. D'autant plus que le problème de l'indépendance de la Justice est encore à l'ordre du jour.
Le syndicat de la magistrature ainsi que l'Association des Magistrats Tunisiens, ont fait part de leur étonnement que le ministère de la Justice s'y prenne de la sorte, sans donner l'occasion à une enquête sur les corruptions pratiquées dans le secteur avec une plus grande transparence, afin de mieux consolider la Justice transitionnelle.
A ce propos, Kalthoum Kennou, présidente de l'Association des Magistrats Tunisiens, a déclaré à l'issue de l'assemblée générale, tenue dimanche dernier au Palais des congrès, que cette décision suscite « une grande interrogation, d'autant plus que l'assemblée a pour objet l'Instance provisoire de l'ordre judiciaire, le, mouvement des magistrats et le groupement judiciaire ».
Pour sa part Raoudha Laâbidi, présidente du syndicat des magistrats tunisien a exprimé son rejet de cette méthode pratiquée par le ministère de révoquer subitement les magistrats concernés, sans leur donner l'occasion de se défendre.
Recours possible devant le tribunal administratif Quoi qu'il en soit, les magistrats concernés ont tout à fait la possibilité, comme l'a souligné à certains médias le porte parole du ministère de la Justice, d'agir devant le tribunal administratif, pour révocation irrégulière et abusive.
Ils peuvent invoquer le motif que l'occasion ne leur a pas été offerte afin qu'ils puissent se défendre.
Ont-ils été traduits devant un conseil de discipline,, et ont –ils eu accès préalablement à leurs dossiers afin de leur permettre de préparer leur défense ? sur tous ces points, le communiqué du ministère n'a pas été explicite.
Ce qui laisse le mystère entier sur cette révocation intervenant à un moment où l'indépendance de la Justice est en question.