Houda Chérif : «Nous ne voulons ni d'une justice sélective, ni d'une autre revancharde» Depuis la Révolution de la Dignité et de la Liberté, les Tunisiens n'ont pas cessé de patienter à vouloir connaître la vérité sur tout ce qui s'est passé.
Issam Chebbi :«Il est malheureux que le Gouvernement s'informe et décide à partir du Facebook»
La mise en place de la justice transitionnelle ne fait que traîner en longueur et demeure encore loin à être traduite sur le terrain. Le rendre compte, la reconnaissance des faits et éventuellement le pardon et la réconciliation viendront par la suite. Vu les retards enregistrés dans le déclenchement du processus de la justice transitionnelle, le Parti républicain (PR) a pris l'initiative de confectionner un projet de loi dans ce sens qu'il soumettra au groupe Démocrate de la Constituante avec l'idée de le proposer à l'ANC d'ici à la fin de cette semaine.
Issam Chebbi, porte-parole du PR a précisé hier, lors d'une conférence de presse au siège d'Al Mawkef, que les retards enregistrés dans la mise en place de la justice transitionnelle, ne pourront en fin de compte qu'amener à recourir à des demi-solutions et à des arrangements fabriqués sous la table.
Houda Chérif, membre du Bureau politique du PR, expliquera la nécessité d'une justice transitionnelle. Des années durant, les atteintes aux Droits de l'Homme et la marginalisation étaient le lot des régions. « D'un côté la justice ordinaire ne peut traiter toutes les atteintes aux Droits de l'Homme et de l'autre, on ne peut passer sous silence des dépassements qui ont eu lieu durant des années ». Certes la Tunisie n'est pas le Rwanda, Sierra Leone ou l'Afrique du Sud. Toutefois, toutes les atteintes aux droits de l'Homme doivent être réprimées. La Justice transitionnelle est parvenue à l'opinion publique internationale à travers les défenseurs des Droits de l'Homme après l'expérience de la Yougoslavie et de l'Afrique du Sud. Si en Yougoslavie, c'est la sanction qui primait, en Afrique du Sud c'était plutôt le pardon qui dominait. L'expérience traversée et vécue par l'Afrique du Sud a permis de mieux connaître et apprécier la vérité et a eu un effet social plus profond. Ainsi, est née l'idée d'une solution mixte où participent à la fois des structures juridiques ordinaires et des structures non juridiques. « Le projet du Parti républicain, s'inspire des expériences étrangères et des conventions internationales des Droits de l'Homme. Ce projet se fonde sur quatre mécanismes : l'investigation et le dévoilement de la vérité, la poursuite judiciaire ou la reconnaissance de la faute et l'accord sur le pardon entre le bourreau et sa victime, les réparations aux victimes et les réformes institutionnelles pour éviter la répétition des dépassements », dira Houda Chérif. Elle considère que la Tunisie a nécessairement besoin d'une justice transitionnelle. Vu la détérioration de la situation sécuritaire et économique et la multiplication des actes de violence dans le pays, la mise en route des mécanismes de justice transitionnelle est de nature à apaiser les esprits et donner de l'espoir. La justice transitionnelle ne concerne pas uniquement les individus, elle intéresse aussi bien les groupes, les secteurs autant que les régions. Ce qui est de nature à participer à la résolution des grands problèmes de la société. Les situations de crise sociale sont, entre autres, le résultat de la peur que les fautifs ne soient pas sanctionnés et qu'il y ait recours à une justice transactionnelle au lieu d'une justice transitionnelle. « Nous ne voulons ni d'une justice sélective, ni d'une autre revancharde. Nous voulons parvenir à une réconciliation nationale dans le cadre d'une obligation claire et juste de rendre des comptes, des réparations justes et une réforme globale pour un non retour, loin d'hégémonie gouvernementale et des partis politiques » insiste Houda Chérif. L'instance qui s'occupera de la justice transitionnelle doit être totalement indépendante. Il est souhaitable que le public puisse suivre à la télévision les séances d'écoute et de déclaration de la vérité. Ainsi, la vérité sera connue par les Tunisiens et sera gravée dans la mémoire collective. « Il est inquiétant de voir des opérations de confiscation, des arrangements, des juges et des directeurs d'établissement démis de leurs fonctions, sans que la justice transitionnelle ne démarre effectivement », déplore-t-on dans le projet du PR. L'instance indépendante qui se chargera de la justice transitionnelle, ne supplantera pas les tribunaux. Elle traite avec eux. Elle associera les victimes. Un slogan lui sera trouvé. Lotfi Mejri, développera les bases juridiques du projet du PR et précisera qu'il «évitera les frustrations des Tunisiens de connaître la vérité et rétablira le dialogue entre les différentes parties dans la clarté et la transparence ».
Les questions d'actualité politique immédiate ne peuvent échapper à une conférence de presse du Parti républicain. Faouzi Abderrahmène parlera des dernières démissions au sein du parti qui n'affectent en rien son dynamisme. Il répond aux démissionnaires qui prétendent que le PR opte pour la bipolarisation en précisant que le parti n'a jamais défendu la bipolarisation. Quant au parti de Si El Béji Caïd Essebsi, il n'a jamais été question que le PR s'y dissolve. Le PR a des points de rencontre avec ce nouveau parti ainsi que des points de divergence.
Issam Chebbi, affirme que le PR soutient l'initiative de dialogue lancée par l'Union Générale Tunisienne de Travail (UGTT). A propos des faux tableaux collés au Palais Al Ibdilya, il dira que le gouvernement et les trois présidents auraient dû s'excuser auprès du peuple tunisien. « Il est malheureux que le Gouvernement s'informe et décide à partir du réseau social facebook ».