Le ministère du Commerce est déjà à pied d'œuvre pour parer aux exigences ramadanesques. Les stocks de régulation sont reconstitués à un rythme frénétique et, déjà, les Tunisiens sont assurés de ne guère avoir à affronter de pénurie en ce qui concerne, initialement le lait, les dattes et les œufs. Mais, pour faire une hyperbole, les pouvoirs publics sont en train de marcher sur les œufs. C'est le cas de le dire. L'éternelle Caisse de compensation subit déjà les soubresauts des prix des hydrocarbures. Et voilà que les perspectives de rendement (PDR) revoient leurs estimations de décembre dernier à la hausse en ce qui concerne les céréales et l'orge fourragère. On le sait : les PDR sont des estimations produites par la CCB (le baromètre patenté de l'agriculture mondiale), sur le produit financier anticipé de la campagne agricole. Les PDR ne constituent donc pas - à l'échelle mondiale - des garanties de prix et ne doivent pas être confondues avec l'acompte à la livraison, c'est-à-dire, le prix initial. La semaine dernière la conjoncture mondiale nous a donné froid dans le dos : le cours du blé a soudainement flambé à cause d'une forte demande internationale et la sécheresse qui avait frappé l'Ukraine, le grenier de la Russie. Du coup, la demande a nettement dépassé l'offre, tandis que les stocks sont au plus bas. Baisse de récolte en Europe Centrale et en Russie, alors que les Etats-Unis, le plus grand producteur de blé, annoncent que seuls les 5% des blés d'hiver ont été ramassés à cause des pluies diluviennes qui s'abattent sur les Grandes Plaines. Cela fait que les réserves de froment seront de 112 millions de tonnes, au printemps prochain, soit leur plus bas niveau, depuis trente ans. L'économie mondiale est plus que jamais régie par la logique du donnant/donnant... La Chine et l'URSS fournissent de l'énergie et surtout du gaz (russe). En retour, ils raflent les stocks de céréales. Au point que la tonne de blé européen s'échangeait à 177 euros, la semaine dernière, avec l'effet d'entraînement que l'on suppose : flambée des prix des produits laitiers au point que le beurre en Allemagne se vend 50% plus cher, mais là-bas, il n'y a pas de caisse de compensation. Et c'est que l'on en arrive au fin mot de l'histoire : en Tunisie, la Caisse de compensation a toujours secouru la bourse du consommateur, veillant à ce que l'inflation soit maintenue dans des limites raisonnables. De sorte qu'on enregistre très rarement des ajustements aux prix des produits de première nécessité dont les céréales. Mais le comportement du consommateur suit-il ? Non. Les Tunisiens sont, en effet, portés sur le gaspillage. Quitte à s'endetter perpétuellement, ils ont tendance à abuser des vannes qui s'ouvrent à eux parce qu'ils ne sont pas conscients - ou alors mal informés – quant aux risques d'une consommation « schizophrénique », (c'est la formule utilisée par les spécialistes du consumérisme). C'est aussi une affaire de culture citoyenne. Et force est de reconnaître que les campagnes de sensibilisation – surtout durant le mois du Ramadan – ont toujours systématiquement échoué. « On n'attrape pas les mouches avec du vinaigre », et encore moins avec des bio-carburants.