Ils étaient trois, le Trio Jubran, trois frères luthistes, accompagnés d'un percussionniste. Ils sont palestiniens, ayant quitté leur pays natal pour l'Occident, d'où ils sillonnent le monde pour faire entendre leur musique qui chante la paix, l'espoir et la solidarité. Le trio avait rendu hommage en cette soirée au poète palestinien Mahmoud Darwich, mort en 2008 à travers des extraits musicaux de leur avant-dernier album intitulé « Fi Dhil Al Kalimet » (À l'ombre des mots), mais aussi d'autres morceaux puisés dans leur dernier album « Asfar » (Voyages). Les compositions qu'ils avaient élaborées comportaient les gammes et les modes de la musique arabe qui demeurent la base de leur musique, mais qui sont imprégnées d'une multitude de tons et de rythmes qui rappellent le pays natal : La Palestine.
C'est avec tout leur talent et toute leur virtuosité que les trois frères ont enchanté le public assez nombreux du théâtre plein air d'Hammam-Lif, un public qui s'est absenté, pourtant, dans la plupart des spectacles programmés à ce Festival d'été de Boukornine. Certains imputent ce manque de public à la nature même des spectacles qui sont d'une certaine portée culturelle et artistique destinée à l'élite intellectuelle plutôt qu'au large public (à part un ou deux spectacles) ; d'autres pensent que l'absence du public est surtout due à la vague de chaleur qui a coïncidé avec la plupart des dates des spectacles qui aurait drainé les gens vers la corniche où ils préféraient passer leurs veillées dans la fraicheur de la mer. Cependant, les membres du comité directeur attribuent ce manque de spectateurs tout simplement à un coup fomenté par certains groupes hostiles à toute activité culturelle ou
artistique dans la région, qu'on accusait d'avoir boycotté par tous les moyens cette manifestation estivale, vieille déjà de 33 ans : d'abord par le vol d'une bonne quantité de câbles électriques à la veille même de l'ouverture de cette session, provoquant une perturbation dans l'éclairage du théâtre plein air, et ensuite par la détérioration préméditée des affiches publicitaires destinées à informer le public du programme des soirées. Ce sont là les déclarations des membres du comité organisateur qui, malgré tout, avaient tenu bon, rien qu'avec les moyens du bord, pour mener jusqu'au bout et avec le minimum de dégâts, cette 33è session qui s'est déroulée sous le signe : « Pour que l'art de rêver continue... »
« Cette 33è session a le mérite de garantir une certaine continuité dans notre action citoyenne, entamée déjà depuis la dernière session, a témoigné Ghazi Abroug, l'un des membres du comité directeur, on peut dire que le bilan est positif, sauf que certains spectacles n'ont pas attiré suffisamment le public. Non qu'ils soient médiocres, loin s'en faut, mais parce qu'ils s'inscrivent dans la ligne de conduite choisie dès le début par le comité du festival, qui consistait à privilégier la culture engagée à dimensions humaines et civilisationnelle. Celle qui consacre les valeurs citoyennes et universelles. Des lacunes ? Il y en a certes et nous nous emploierons à les combler dans les prochaines sessions. »