C'est la vidéo de trop ! Celle où on nous montre Rached Ghannouchi discutant avec des membres de la mouvance salafiste et leur montrer le chemin à suivre pour parvenir à l'instauration de l'Etat religieux. Le doute quant à l'authenticité de la vidéo diffusée, il est du droit de chaque Tunisien de s'interroger sur les objectifs du patron du parti gouvernemental et de ce qu'il entend faire de ce pays et de son peuple. Il n'y a plus l'ombre d'un doute que M. Ghannouchi demeure fidèle à ses convictions du début de sa carrière de militant islamiste.
Les vingt ans d'exil n'ont rien changé à ses convictions qui ne diffèrent que de peu de celles des salafistes. Sur le fond, le leader d'Ennahdha est en parfaite symbiose avec cette mouvance ultra-fondamentaliste dont l'aile la plus extrémiste prône le Jihad pour islamiser la société tunisienne. Seule la stratégie et les tactiques à suivre pour arriver à cette fin sont le sujet de désaccord. Le but est donc le même ! Ni Etat civil, ni armée et police républicaines, ni, non plus, une administration neutre et au service de tous les citoyens sans distinction de leurs idées, de leur religion ou de leur appartenance politique.
Le plus inquiétant dans tout cela est cette division des citoyens entre laïcs et musulmans ou plutôt islamistes.
Voilà qui est choquant et qui pourrait semer la discorde entre les composantes d'un peuple qui a toujours su dépasser ces clivages idéologiques pour vivre ensemble. Ceci est de nature à ajouter à la confusion déjà existante qui fait du laïc presque un mécréant qu'il faudrait, d'un point de vue jihadiste, combattre. Nous avons cru à tort que M. Ghannouchi qui a vécu des années en Europe, dans des pays de vraie démocratie, avait eu suffisamment le temps pour voir comment cela fonctionne où tout le monde peut vivre sans heurts avec ses convictions et ses idées. Et où on s'accepte les uns les autres pourvu qu'on respecte la loi.
Non, M. Rached Ghannouchi n'a rien appris de ce passage obligé de deux décennies et il est resté tel qu'il était parti en dépit de son discours et celui de ses adeptes qui se voulaient rassurants.
Cette vidéo donne, ainsi, raison à ceux et à celles qui ont toujours claironné que le parti islamiste use du double-langage en attendant d'être sûr de pouvoir imposer le modèle politique qui est le sien et le mode de société qui demeure son objectif final.
A la hâte de ses interlocuteurs salafistes qui veulent entamer l'islamisation de la société et la mise en place des lois charaïques, Ghannouchi préfère patienter pour éviter de se retrouver dans la situation de ses frères algériens qui leur avait coûté le pouvoir.
Tout a été dit dans cette vidéo qui constitue l'événement majeur à la veille de ce 23 octobre, date que nous avons niaisement jugée celle de l'émancipation des Tunisiens pour une vraie démocratie et un Etat de droit.
Le 10 octobre 2012, date de la parution de cette vidéo, devra bien être retenu car, désormais, il y a avant et après le 10 octobre.