Le chapitre de l'avant-projet de la nouvelle Constitution, relatif au pouvoir judiciaire a suscité les commentaires les plus controversés de la part des membres de la composante civile. Etant l'un des trois pouvoirs constituants de l'Etat, il est primordial que soient garantis tous les mécanismes susceptibles de consolider son indépendance. Tel fut le thème du colloque organisé le samedi dernier par l'Observatoire Tunisien pour l'Indépendance de la Justice, au cours duquel il y a eu des échanges de points de vue entre les participants dont des juristes, magistrats, avocats, membres des médias écrits et audiovisuels, et des composantes de la société civile en général, afin d'élucider notamment la question de l'indépendance de la magistrature, pierre angulaire sur laquelle repose le pouvoir judiciaire, tant dans son sens organique (organisation judicaire)que dans son sens fonctionnel,(la faculté de trancher les litiges) lesquels sont d'ailleurs strictement liés. Mainmise de l'exécutif Les décisions judiciaires sont en effet tributaires de l'organisation des tribunaux et leur structure. Les juges tenus de dire le droit sont tenus d'appliquer la loi de la manière la plus stricte et en leur âme et conscience, en toute indépendance. Pour ce faire il faut surtout que le juge ne subisse pas d'influence, ni de pression d'où qu'elles émanent. C'est le problème qui a hanté les magistrats car depuis l'aube de l'indépendance, le juge a commencé à subir toutes sortes de pressions, ce qui a affecté aussi bien la crédibilité que l'honorabilité du secteur judiciaire et pour cause : certains juges qui ont subi des pressions, ont été enclins à sombrer dans la corruption à titre de compensation. Ils ont en quelque sorte, troqué leur honorabilité. Ce qui affecta considérablement le secteur judiciaire, avec des jugements iniques et une pratique des deux poids deux mesures. Ceux par contre qui refusaient de suivre les instructions, se voyaient réprimandés de différentes manières. Faute d'être révoqués ou mis à la retraite d'office, ils se voyaient mutés à Perpète lés Oies, loin de l'endroit où il est installé avec sa famille à dessein de le perturber. Le pouvoir judiciaire était donc englouti et accaparé par l'exécutif, dans lequel le dernier mot revenait à celui qui tenait les rênes de l'Etat. Au lendemain de la Révolution, quelles solutions doivent être entreprises afin de mieux garantir l'indépendance de la Justice ? Car il ne s'agit pas uniquement de consacrer ce principe d'indépendance O combien sacré dans la nouvelle Constitution. Il faut également que le ministère de tutelle, mette en place des mécanismes en vue d'une réelle et tangible indépendance des magistrats. Or, au jour d'aujourd'hui, ce sont les mécanismes de l'ancien qui prévalent encore, et ce notamment en ce qui concerne la nomination, la mutation et la révocation des magistrats. Le Conseil Supérieur de la Magistrature, instance aux mains de l'exécutif créée depuis l'aube de l'indépendance, a été plutôt un obstacle à la consolidation de l'indépendance de la magistrature. C'est la raison pour laquelle, il a été décidé de mettre en place une Instance supérieure de la Magistrature, en vertu d'un décret-loi qui devait être adopté par la Constituante. Ce qui n'a pas été encore fait et en attendant les décisions concernant les magistrats sont prises par ledit Conseil, appelé pourtant à disparaître au profit d'une instance indépendante. C'est ce qui a été essentiellement déploré au cours du colloque qui a abouti sur certaines recommandations dont notamment, la nécessité d'instituer les mécanismes nécessaires à la consolidation de l'indépendance de la Justice, conformément au principe de la séparation des pouvoir. Le pouvoir judiciaire, doit intervenir en troisième, au sein de la nouvelle Constitution, à la suite des deux pouvoirs exécutif et législatif. Pour une meilleure consolidation du pouvoir judicaire, il est recommandé par les participants au colloque de consacrer dans la nouvelle Constitution les principes de l'autonomie administrative et financière des tribunaux et ce par la création d'instances régionales indépendantes dont les membres seront élus par les magistrats. Par ailleurs, il est nécessaire selon les mêmes recommandations de l'OTIM, de incriminer d'une façon générale toute intervention ou immixtion dans le secteur judiciaire, pour en faire un délit et ce afin d'éviter les abus et de mieux consolider l'indépendance du pouvoir judiciaire.