En dépit des remous constatés chez les partis politiques (Troïka et opposition comprises), M. Hamadi Jebali a tenu fermement à sa décision de constituer un nouveau gouvernement de technocrates qui n'appartiennent à aucun parti. Un nouveau gouvernement qui sera chargé en cette période transitoire et ô combien délicate – de gérer les affaires, et combler les lacunes, dans une tentative de répondre à l'attente du peuple. « Un nouveau gouvernement composé de compétences nationales dont la fin de la mission coïncidera avec l'élaboration de la Constitution » a confirmé le Chef du Gouvernement, tout en précisant, encore une fois, que les membres de ce nouveau gouvernement ne se présenteront pas aux prochaines élections. En vérité, c'est presque le même appel lancé par les partis de l'opposition sauf que M. Jebali a insisté sur le fait que les nouveaux membres du gouvernement seront privés des prochaines élections. Et c'est peut-être, la pomme de discorde avec ces partis qui ne peuvent se dévêtir de leurs ambitions politiques. Quant aux partis qui gouvernent aujourd'hui (Ennahdha, CPR et Ettakatol), ils ont tiqué car, ils vont être écartés du pouvoir. Ils considèrent que le Chef du Gouvernement a carrément transgressé leur légitimité, comme étant élus du peuple. Or, les Tunisiens, à notre connaissance, se sont dirigés vers les urnes pour élire uniquement les membres de l'Assemblée nationale de la Constituante. Il est vrai que les résultats des suffrages ayant permis aux trois premiers partis de se partager les pouvoirs et de former un gouvernement, mais les prérogatives du Chef du Gouvernement, selon la petite Constituante, permet à M.Hamadi Jebali, d'apporter des réajustements (remaniements, permutations), sans se référer toutefois, à l'ANC. Cette précision a été longuement clarifiée par M. Iyadh Ben Achour, expert en matière de droit constitutionnel, qui a attiré l'attention sur une règle juridique qui précise la primauté de l'intérêt suprême du pays (esprit de la loi). Dans le cas échéant, il ne suffit pas de cramper aux règlements juridiques, et laisser le pays se surfondre dans la violence, l'insécurité, voire le chaos, constatés dans toutes les régions. On passe par une phase exceptionnelle qui exige de la part du premier responsable de l'exécutif d'assumer pleinement ses responsabilités et de prendre les mesures nécessaires, afin de sauver le pays des dangers qui le menacent et d'atténuer un tant soit peu les sentiments de frustration et de déception qui ne cessent de gagner les Tunisiens d'un jour à l'autre. Un homme d'Etat ne doit agir que de la sorte. Et c'est bien le cas de M. Hamadi Jebali qui a fait preuve de patriotisme certes, mais aussi de beaucoup de courage. N'oublions pas qu'il s'agit du numéro 2 (après Rached Ghannouchi) d'Ennahdha, le parti le plus puissant, le mieux structuré ayant le plus grand nombre d'adhérents, depuis la Révolution du 14 janvier 2011. Prendre une telle initiative, sans consulter son propre parti, ni ses bases. Il faut de l'audace, de la personnalité et des nerfs d'acier, pour oser un tel défi. Or, ces qualités sont le propre de ceux qui veulent ancrer leurs noms dans l'histoire. C'est un choix qui comporte des risques. C'est évident. La volonté du Chef du Gouvernement reflète une envie sincère de servir l'intérêt du pays, considérant que le pouvoir n'est guère un gâteau à partager. L'histoire va retenir, sans aucun doute, cette initiative. Elle va retenir aussi la position des contestataires qui refusent d'adhérer à cette initiative. Mais, l'histoire ne pardonnera jamais ceux qui ont fait du mal au pays et qui continuent à le faire, pour des considérations qui n'échappent plus à personne. Le peuple tunisien n'est pas dupe !!