« Nous sommes des citoyennes tunisiennes, pourquoi voulez-vous nous priver de notre droit à l'enseignement public» fait remarquer Amina jeune femme niqabée « Nous sommes en sit-in ouvert depuis 34 jours en vue d'amener le comité scientifique à revenir sur sa décision de priver les niqabées de passer les examens. » dit-elle. Elles sont 17 étudiantes tunisiennes et par-dessus tout des citoyennes du monde qu'on révoque des salles d'examens et de la faculté là où elles sont inscrites et à qui on fait comprendre qu'elles ne méritent pas d'étudier voire même de vivre parmi les humains. Avec toute la haine que l'on voue aux niqabées, toute une campagne de dénigrement est orchestrée dans les murs de la faculté des sciences de Tunis en vue de départir des Tunisiennes de leur part de citoyenneté, voire d'humanité pour les réduire à un moins que rien, au néant. Amina une jeune niqabée inscrite en première année ingéniorat, ne compte plus les insultes, qu'elle tout comme les jeunes filles niqabées, subissent quotidiennement. « On nous traite de sachet de poubelle, de chose noire, d'inhumaine, etc. Nos détracteurs ne lésinent pas à utiliser tous les noms possibles et imaginables pour nous dénigrer et nous faire comprendre que notre place n'est pas à la faculté,», raconte-t-elle, en ajoutant « Nous menons un véritable combat pour accéder au droit à l'apprentissage. Nous avons pour ce faire fait des concessions en acceptant de dévoiler nos visages si l'enseignant nous le demande ou pour des raisons de sécurité. » Les jeunes femmes sont privées d'assister au cours et de passer leur examen suite à la volonté des comités scientifiques qui en ont décidé ainsi. «Nous sommes des citoyennes tunisiennes, pourquoi voulez-vous nous priver de notre droit à l'enseignement public », avance Amina non sans amertume. La sympathie des participants au forum social mondial Les jeunes femmes qui se sont vu privées de leur droit le plus élémentaire, celui d'exister en tant que telles et de fondre dans la masse estudiantine ont fini par attirer la sympathie de bon nombre de participants au Forum social mondial. « Parmi eux 66 journalistes étrangers alors que les journalistes tunisiens font l'oreille sourde au combat de liberté des niqabées », avance Seif Eddine Al Kaouache, un jeune étudiant en 5ème année ingéniorat et membre du conseil scientifique. Le jeune homme qui soutient les niqabées, lui comme bon nombre d'étudiants de la fac ont décidé d'organiser un sit-in ouvert pour revendiquer la non application de cette décision intempestive et répressive vis-à-vis de femmes qui ont choisi d'être pieuses. Ils en sont au 34ème jour du sit-in de la liberté. Mais pourquoi donc sit-in de la liberté, demandons-nous ? « C'est parce que ces étudiantes ont le droit de se vêtir librement tant qu'elles ne dérangent personne. Elles sont là pour étudier. Dans des facultés britanniques, et américaines les niqabées étudient librement. Pourquoi veut-on priver les Tunisiennes de ce droit en Tunisie, », répond Seif Eddine qui insiste sur le fait que leur combat est apolitique et qu'ils refusent que des politiques s'en mêlent, pour ne pas tomber dans le piège des tiraillements idéologiques. Une marche à la faculté des sciences La dernière journée de cette grande rencontre mondiale d'activistes rejetant l'injustice sociale, était décisive pour les militantes niqabées pour faire connaître leur juste combat aux âmes libres du monde entier. Au moment où on récoltait les témoignages des membres du comité de soutien aux niqabées, des voix s'élèvent vociférant des slogans appelant à préserver le droit de ces étudiantes au savoir. Les jeunes militantes niqabées brandissaient des banderoles telle une oriflamme où l'on lisait des inscriptions dans trois langues : arabe, française et anglaise : « Le Niqab est mon choix, ce n'est point une compulsion » Et pour ce choix, les jeunes femmes sont prêtes à mener un combat intellectuel et un débat d'idées pour contrecarrer l'effet des idées reçues qui ont la vie dure. Quoi qu'on fasse pour les en dissuader, les jeunes femmes tout comme les membres du comité, ne comptent en aucun cas rebrousser chemin. « Le doyen a fermé toutes les issues même celles donnant sur les toilettes pour brimer les sit-inneurs et les affamer. Il a fait appel aux agents de la sécurité pour les congédier de force. Ces pratiques répressives ne font qu'accroître la détermination de ces jeunes à mener leur combat juste », se rappelle Seif Eddine. La sincérité du discours de ces que jeunes étudiantes qui s'engagent à mener un combat contre vent et marrées, dans un pays où la laïcité radicale des uns et des autres fait encore des siennes ne peut que nous toucher au plus profond de nous même. Cela nous amène, un tant soit peu, à repenser certains concepts en dehors des clichés. On retiendra de cette visite dans les murs sourds de ce haut lieu du savoir, qu'il s'agit bel et bien d'un combat pour la liberté individuelle. Bien à vous messieurs dames, les militants des droits de l'homme et des libertés.