“Un ex-ministre et dirigeant d'Ennahdha s'est réuni à la veille du meeting avec des partisans de son parti à Gafsa pour les inciter à saboter la réunion", accuse Khémaïes K'sila, membre du Bureau exécutif de Nidaâ Tounes. Le meeting de Nidaâ Tounes (L'Appel de la Tunisie) à Gafsa a finalement eu lieu, dimanche, en dépit des tentatives de plusieurs centaines de protestataires se présentant comme “hostiles au retour des RCDistes" d'en empêcher la tenue. Et pour cause: un imposant dispositif de sécurité a été déployé tout autour du théâtre El Borj où des “milliers" de sympathisants du parti de Béji Caïd Essebsi ont afflué a permis d'empêcher les manifestants de prendre d'assaut les lieux. La police est allée jusqu'à faire usage de bombes lacrymogènes pour disperser les manifestants qui dénonçaient la tenue de la grande réunion de Nidaâ Tounes dans leur ville. “Dégage espèce de pourri", “Non au retour de la bande RCdiste" , “Essebsi Dégage" ont notamment scandé les manifestants à l'adresse de l'ex Premier ministre qui a dirigé le pays pendant environ huit mois après la révolution. Le parti fondé par Caïd Essebsi est accusé par Ennahda et ses alliés au sein de la Troïka au pouvoir d'avoir réuni en son sein des cadres du Rassemblement Constitutionnel Démocratique (RCD) de Ben Ali. Il est , de ce fait, régulièrement la cible d'attaques de militants pro-gouvernement sans que les forces de l'ordre n'interviennent de façon énergique comme ce fut le cas hier. Selon les organisateurs, les protestataires seraient proches du mouvement islamiste Ennahdha. “ Nous soupçonnons fortement le mouvement Ennahdha d'être derrière cette tentative de sabotage de notre réunion. Un ex-ministre et dirigeant d'Ennahdha s'est d'ailleurs réuni à Gafsa avec des partisans d'Ennahdha dans la ville", précise Khémaïes K'sila, membre du Bureau exécutif de Nidaâ Tounes. “Nidaâ Tounes prône l'unité nationale" L'intervention des forces de l'ordre a été fortement saluée par les participants au meeting et les dirigeants du parti honni par les islamistes. “ C'est grâce aux agents de l'ordre qui se sont placés cette fois-ci au dessus des tiraillements politiques que le meeting a eu finalement lieu», se félicite Mohsen Marzouk, dirigeant de Nidaâ Tounes. Dans son discours, Béji Caïd Essebsi s'est réjoui de la tenue du meeting, lançant au passage des critiques à peine voilée au gouverneur de Gafsa qui n'aurait pas fait, selon lui, assez pour garantir la sécurité des participants à la réunion. “La tenue de cette réunion à Gafsa, constitue un défi que nous avons relevé» a -t-il indiqué, tout en rappelant que “ le gouverneur de Gafsa est au service de la nation et non du mouvement Ennahdha" Le fondateur de Nidaâ Tounes a également fait remarquer qu'il cherche à travers son déplacement à Gafsa entrer en contact avec les citoyens et à discuter avec eux de la situation à Gafsa et dans le pays. Il n'a pas manqué, à cette occasion, de lancer une pique en direction de la troïka. “Le climat général dans le pays n'est pas bon", a-t-il indiqué M. Caïd Essebsi a également tenté de donner une idée sur l'identité et le positionnement de son parti, régulièrement accusé de servir de cheval de Troie pour le retour des RCD-istes. “Nidaâ Tounes est ouvert à tous les Tunisiens. Ce n'est pas un parti d'élites, puisqu'il regroupe des Destouriens, des gens de gauche et des indépendants». Notre parti entreprend, aujourd'hui, une lutte qu'il va gagner et qu'il va aller de l'avant, pour la réalisation de l'unité nationale, loin de toute exclusion», a-t-il martelé. Tourner la page de la marginalisation Le leader de Nidâa Tounes a, par ailleurs, mis en exergue les contributions de la région de Gafsa et de ses hommes, dont Ahmed T'lili et Béchir Ben Sedira,dans le mouvement de libération nationale et dans la lutte armée contre la colonisation, estimant que la révolte du bassin minier en 2008 est la première étincelle qui a mené à la révolution du 14 janvier 2011. Pour tenter de gagner davantage de sympathie à Gafsa , Caïd Essebsi a insisté sur la nécessité de tourner la page de la marginalisation dont souffre cette ville minière défavorisée depuis l'indépendance. Il a souligné dans ce même registre, que la région enregistre un taux de chômage de 28 % contre un taux national de 18 %, tout en indiquant que son parti a élaboré un programme de développement de toutes les régions intérieures, dont le gouvernorat de Gafsa. L'homme qui semble avoir lancé une campagne électorale avant l'heure a même recommandé de lancer deux chantiers de nature à atténuer le chômage et la précarité dans le gouvernorat de Gafsa : l'autoroute Gafsa-Tunis pour désenclaver la région et la mise à niveau du secteur des mines de façon à fournir davantage d'emplois aux jeunes. Caïd Essebsi a, d'autre part, plaidé pour la relance de l'activité de la Compagnie des phosphates de Gafsa (CPG) en tant qu'importante entreprise nationale et l'un des piliers de l'économie nationale et régionale." Les exportations des phosphates ont rapporté plus de 2,5 milliards de dollars en 2010 contre 800 millions de dollars en 2012. La variation due à la baisse de la production aurait pu nous éviter d'avoir recours aux crédits du FMI et ses conditions draconiennes', a-t-il indiqué en présence du leader syndicaliste très respecté dans la région, Adnène Hajji.