Alors que le pays célèbre l'anniversaire des événements du 9 avril 1938, il est primordial de s'interroger sur la capacité des Tunisiens à assimiler l'essence de la commémoration des événements glorieux de l'histoire de la Nation et d'en tirer les enseignements profonds. Des doutes récurrents persistent et continuent d'alimenter l'angoisse des Tunisiens. Au fil des années les célébrations se succédaient, sans saveur. Elles s'apparentaient plus à des rituels contraignants et servant de propagande à la gloire des régimes en place qu'à honorer la mémoire des martyrs, des résistants et des militants, morts ou emprisonnés pour que vive la Tunisie libre, indépendante et démocratique. C'était du temps de la dictature. Un temps révolu, balayé par la Révolution. Celle-ci ouvrait de grands espoirs devant le peuple tunisien et autorisait le rêve à la dignité, à la liberté et à la démocratie, les idéaux pour lesquels les jeunes révoltés ont versé leur sang, comme leurs ancêtres ont versé le leur pour l'indépendance, la cohésion et l'union nationale. C'est l'héritage militant tunisien, riche et glorieux, qui doit servir de phare et qu'il est vital d'entretenir. Plus de deux ans après la révolution, est-on resté fidèles à la mémoire des martyrs et reconnaissants à leurs sacrifices ? Pas évident, car ici et là des déviations font surface. La commémoration des dates phares de l'histoire de la Tunisie est aujourd'hui l'otage des familles politiques et le reflet de leur lutte pour le pouvoir. Il n'y a qu'à voir comment on a occulté la fête de l'indépendance pour des considérations loin d'être nationales ou les tentatives de récupérer la fête des martyrs pour des raisons purement politiques. Hier dans la capitale, chaque parti avait sa fête, ses propres martyrs. Comme s'il y a plusieurs Tunisie et non une seule. Un état de division et de désunion qui fait peur et qui ravive la crainte des Tunisiens quant à l'avenir de la transition démocratique et de l'union nationale.