• Le rejet pur et simple du projet de l'Instance provisoire ne sert pas les intérêts des magistrats Lors d'un point de presse tenu, hier matin, au palais de la justice, à Tunis, le bureau directeur de l'Association des magistrats tunisiens(AMT) a réitéré son opposition à l'appel lancé par le syndicat des magistrats tunisiens aux juges tunisiens pour l'observation d'une grève de deux jours, mercredi et jeudi 17 et 18 avril dans tous les tribunaux du pays. La vice-présidente de l'AMT, Mme Raoudha Grafi, a estimé que de tels mouvements ne sont pas de nature à servir les intérêts des magistrats tunisiens, du moment qu'ils procèdent d'une attitude visant à bloquer l'adoption du projet de loi relatif à la mise en place de l'Instance provisoire indépendante de la magistrature, en cours de discussion par l'Assemblée nationale constituante. Or, a-t-elle dit, un tel blocage ramène la justice et la magistrature, en Tunisie, à la précédente situation de dépendance totale à l'égard du pouvoir exécutif et du ministre de la Justice, et il faudra attendre des années avant de mettre en place une Instance indépendante permanente. Elle a signalé que l'ancien Conseil supérieur de la magistrature avait été mis en place 9 ans après l'adoption de la Constitution de 1959. Aussi, l'AMT soutient le projet d'Instance en cours de discussion avec quelques correctifs faciles à faire et réclame son adoption au plus vite afin que l'Instance soit, aussitôt, opérationnelle et supervise, entre autres, le prochain mouvement des magistrats, afin d'éviter les dérives enregistrées à l'occasion du précédent mouvement supervisé par le ministre de la Justice. Afin de sortir de l'impasse créée par l'article 6 du projet relatif à la composition de l'Instance, l'AMT a proposé, officiellement, par lettre, à l'Assemblée constituante, que les membres n'appartenant pas au corps de la magistrature devant faire partie de l'Instance, selon la version actuelle dudit article, soient remplacés par deux juges du tribunal administratif et deux juges de la Cour des comptes. De cette manière, tous les membres de l'Instance appartiendront au corps de la magistrature, ce que réclame le syndicat des magistrats. D'après l'AMT, il n'est pas non plus nécessaire de réclamer la révision de certains articles du statut particulier des magistrats de 1967, qualifiés par le syndicat d'incompatibles avec l'indépendance de la justice et de la magistrature, ce qui demanderait du temps et retarderait la mise en place effective de l'Instance, mais qu'il suffit d'ajouter un article au projet en cours de discussion stipulant leur abrogation. Position de principe A cet égard, les membres du bureau directeur de l'AMT ont rappelé que l'Association s'est toujours inspirée, dans ses mouvements de revendication, d'une position de principe. Ainsi, l'AMT avait été, depuis juillet 2012, à l'origine de l'échec du premier projet proposé car il ne présentait pas les garanties d'indépendance de la justice et de la magistrature conformément aux normes internationales. L'Association avait refusé, aussi, de collaborer à l'élaboration de l'ancien projet comme du nouveau projet en cours de discussion, alors que le syndicat avait collaboré à son élaboration et « aurait dû s'apercevoir de ses lacunes, dès le départ » en ce qui concerne tant l'article 6 que d'autres articles incriminés, comme l'article 18 relatif aux procédures intéressant la prise de mesures disciplinaires contre les juges en cas de faute professionnelle ou d'abus quelconque. L'AMT a annoncé son intention d'examiner de plus près cet article 18 , suggérant de confier à l'inspection générale de la justice le soin de faire opposition devant le tribunal administratif concernant les sanctions prises à l'encontre des juges. Sur un autre plan, l'AMT a dit rechercher à rétablir la confiance de l'opinion et des forces du pays envers la justice et la magistrature, en montrant que les magistrats et les juges n'ont rien à cacher et ne craignent pas l'ouverture de la magistrature à son environnement.