Le projet du nouveau Code des investissements suscite d'ores et déjà la controverse. Dans un mémorandum publié dimanche sur son site officiel, l'Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT) a émis plusieurs réserves sur ce projet. La centrale syndicale rappelle, en premier lieu, que les mesures d'incitation ne peuvent en aucun cas être suffisantes à elles mêmes pour relancer l'investissement. «Les encouragements et les mesures incitatives fournis aux investisseurs ne pourraient pas aboutir aux résultats escomptés si la situation sécuritaire dans le pays demeure marquée par une instabilité ou encore si les infrastructures nécessaires à l'épanouissement des activités économiques manquent », précise le mémorandum publié par la section des études et de la législation relevant de l'UGTT. Les auteurs du rapport insistent par ailleurs sur l'urgence de mettre en place un nouveau modèle de développement. « La révision du Code des investissements ne peut donner ses fruits que dans le cadre d'une vision globale axée sur la détermination d'un nouveau modèle de développement. Il est aussi impératif de réformer et de repenser toutes les législations et les secteurs ayant des liens directs avec l'investissement comme les marchés monétaire et financier, le capital humain, les autres lois relatives à l'investissement et les infrastructures », soulignent-ils. Développement régional L'UGTT estime, d'autre part, que le projet du nouveau Code des investissements pèche par le manque d'une vision globale du développement adossée à des objectifs précis ; chose qui fait planer une confusion sur le rôle de l'Etat et son champ d'intervention. Volet incitations aux investissements, l'organisation note que les mesures d'encouragement adoptées par le passé ont grevé le budget de l'Etat sans pour autant avoir des retombées positives palpables en matière d'impulsion des investissements. «Le fait d'accorder de nouvelles incitations aux investisseurs ne pourrait avoir lieu sans augmenter le volume des impôts que la classe moyenne sera appelée à payer», indique le mémorandum. Les experts de la centrale syndicale s'inquiètent, par ailleurs, du fait que 70% des incitations fiscales prévues dans le nouveau code soient orientées vers les activités exportatrices contre 7% seulement des incitations destinées au développement régional. Ils ont , sur un autre plan, averti contre des dispositions pouvant constituer des menaces pour la souveraineté nationale telles que l'octroi de droit de propriété des terres agricoles aux étrangers. Selon la centrale syndicale le recours systématique à l'arbitrage international en cas de litiges entre les investisseurs et l'Etat pourrait également discréditer la justice tunisienne et ouvrir la voie à la remise en cause de son indépendance. Main d'œuvre étrangère L'UGTT précise, par ailleurs, que l'article 10 du nouveau Code des investissements autorise les entreprises à recruter jusqu'à 30% de leurs cadres parmi les compétences étrangères, notant que cette disposition est en déphasage complet avec l'objectif de la réduction du taux de chômage chez les diplômés de l'enseignement supérieur. En ce qui concerne la couverture sociale, le nouveau Code des investissements accorde aux salariés étrangers exerçant en Tunisie le choix entre le régime tunisien ou ceux de leurs pays d'origine. « Outre le fait qu'il soit en contradiction avec le principe de la territorialité des lois, ce choix pourrait avoir des effets néfastes sur le système national de sécurité sociale », indique le mémorandum élaboré par l'UGTT. L'organisation brocarde également l'absence de mesures incitatives aux investissements dans certains secteurs prometteurs comme les services financiers, la marginalisation des régions qui ne peuvent pas attirer les investissements privés du fait de leur situation géographique ou de l'état des infrastructures, le passage sous silence de la question de transfert des technologies par les investisseurs étrangers, et le manque de mesures de nature à encourager les acteurs de l'économie souterraine à rejoindre le secteur formel.